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La lumière des parfaits

La lumière des parfaits

Titel: La lumière des parfaits Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Hugues De Queyssac
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librairie, qui était peu fréquentée par quiquionques d’autres que la comtesse, obéissait à d’autres desseins que ceux de parfaire ma culture des ordres de chevalerie. Je ne m’étais pas ouvert à ma dernière mie du piège que j’envisageais de tendre, depuis la veille, à celui qui avait tenté de mettre fin à mes jours. En se trompant de cible.
    Or donc, aussi déchirante que fût notre séparation, il était préférable que je restasse seul en cette pièce pour confondre notre meurtrier. Si mon plan se déroulait selon mes attentes.
    J’avais repéré un cadre qui enchâssait un miroir d’argent poli et le disposai sur une étagère, au-dessus du pupitre devant lequel je pris place, dos à la porte de la librairie. Dans l’attente d’un évènement qui ne devrait pas tarder à se produire si mon intuition n’était pas prise en défaut.
    Le mur, côté sud, était percé d’une petite fenêtre à meneaux qui laissaient passer deux ou trois rayons de soleil. Ils s’écrasaient sur le haut de la porte.
    Tous les sens en alerte, je compulsai nonchalamment quelques traités sur la chasse à courre et sur l’art de la fauconnerie. N’entendant presque rien à la langue alémanique, je parcourais les gravures, sans porter d’intérêt au texte. Pour tuer le temps. En levant régulièrement les yeux vers le miroir poli.
     
    Sexte sonna bientôt à la chapelle du château. L’on cogna le heurtoir, à la porte de la librairie.
    Sur mon tabar, mes armoiries avaient été brodées autrefois par la princesse Échive de Lusignan. De face et de dos. De sorte qu’aucune confusion n’était possible quant à ma personne.
    « Qui va là ? » m’écriai-je par-dessus l’épaule, les muscles bandés.
    Pas de réponse. Je surveillai la crémone de la porte. Le miroir ne révéla aucun mouvement dans mon dos. La surface en était un peu noircie par les dépôts de fumée. Je la frottai du revers de la manche.
     
    Cette fois, le loquet se souleva. Sans bruit aucun.
    Je tenais ma dague à senestre. À m’en faire blanchir les phalanges.
     
    Prêt à faire rendre gorge à l’inconnu venu m’occire.

Le palais n’est pas seul à déguster   ; les oreilles aussi ont faim de la parole de Dieu.
     
    Extrait de la Règle du Deutsche Ritterorden, l’Ordre de Sainte-Marie des Allemands de Jérusalem, précisant l’obligation d’une lecture évangélique pendant les repas servis dans le réfectoire de leur communauté, tel que fixé par les nouveaux statuts adoptés lors du chapitre général de l’Ordre, tenu à Venise en 1297.
    Chapitre 3
    De la forteresse de Kœnigsbourg à celle de Marienbourg, siège de l’Ordre de Sainte-Marie des Allemands, entre les calendes de novembre et la fête de Saint-Nicolas, le lendemain des nones de décembre, en l’an de grâce MCCCLIII {4} .
    En guise de réponse, le loquet de la porte de la librairie revint en position. L’inconnu ne comprendrait-il pas le français ? J’essayai un des rares mots d’allemand que j’avais entendu : «  Herein  ! Entrez ! »
    La porte s’ouvrit enfin sur des gonds bien huilés. «  Holzbedienung  ! Zervice de bois ! », éructa une voie gutturale. Je me retournai. Un casque que, par un curieux effet de lumière, je crus voir surmonté d’une pointe en guise de cimier, s’effaça. Je tenais ma dague à la main, devant moi, paré à toute éventualité. Fausse alerte. Le page, visage fermé, remplit sa mission, posa une cruche d’eau sur la margelle, ajusta son pourpoint, s’inclina sans porter les yeux sur moi et se retira avec son panier d’osier, suivi par le garde qui s’était tenu chef baissé et dont je surveillais le moindre mouvement dans le miroir poli. Étrange tout de même pour un garde, de chausser des poulaines lorsqu’il est en service, observai-je lorsqu’il eut tourné les talons et refermé la porte derrière lui.
    Je reniflai la cruche. L’eau n’avait apparemment aucune odeur. Point de tentative d’empoisonnement cette fois. Or donc, l’assassin entendait commettre son crime autrement. Les nerfs à fleur de peau, je bouillais d’impatience. Je ne dus pas attendre bien longtemps.
     
    Moins d’un quart d’heure plus tard, une mouche se posa sur le métal poli du miroir. Au même instant, la crémone de la porte se souleva tout doucement. Je toussis. Le mouvement s’arrêta net. Je me raclai la gorge et poussai un fort bâillement. Peu après, la crémone fut soulevée derechef avec

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