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La lumière des parfaits

La lumière des parfaits

Titel: La lumière des parfaits Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Hugues De Queyssac
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couettes de fin duvet et d’un oreiller tout aussi moelleux.
    L’immense salle était tapissée d’un nombre considérable d’étagères sur deux niveaux, saturées d’un nombre encore beaucoup plus considérable de magnifiques ouvrages reliés et de parchemins empilés sous des presses ou enroulés autour de rubans de soie.
    Près de la porte des commodités, une grande cheminée diffusait une douce chaleur pour des raisons liées à la conservation des archives de l’Ordre. Les mêmes raisons avaient imposé la construction d’une cheminée dans la librairie du château de Kœnigsbourg. Mais, pour d’autres et évidentes raisons, nous l’avions particulièrement appréciée, la jeune et très belle comtesse Mathilde et moi, certaines matinées…
     
    Quel bonheur ! Pour une fois, je jouissais du silence qui régnait céans, du regard attentif de ce frère d’un âge indéfinissable, seul frère autorisé à porter la barbe qu’il avait de couleur poivre et sel, intrigué par ma présence, mais remarquablement prévenant.
    Attentif à mes moindres désirs, avec grande discrétion toutefois, il me fit comprendre avec moult gestes et pantomimes la magnificence de la librairie et me permit de fouiner à loisir parmi les archives de l’Ordre.
    À une seule condition toutefois : que je me munisse des gants de soie avant de feuilleter les ouvrages que j’avais repérés. Aimable frère-servant qui comprenait le latin et qui sut, en toutes circonstances, prévenir ma curiosité en me proposant tel ou tel traité avant que je n’en exprime parfois le désir, comme s’il souhaitait orienter des recherches qu’il n’avait aucune raison de supputer. À moins que…
    Homme de grande érudition, étonnante pour un orphelin issu d’un milieu simple et incroyant, il se penchait parfois sur mon épaule, souriait lorsqu’il me voyait sourire, s’attristait s’il me voyait me remochiner, jubilait si je m’esclaffai, se renfrognait si je m’emburlucoquai dans quelque lecture sans intérêt.
    La principale raison qui m’avait conduit à entraîner mes compains en un Grand Pèlerinage en cette lointaine terre de Prusse trouvait enfin sa justification.
    Mes compagnons n’en semblaient pas affectés outre mesure.
    En quête d’émotions nouvelles, de découvertes d’une manière de vivre et de combattre au sein d’un ordre militaire et religieux qui, mutatis mutandis , devaient leur évoquer les images d’une épopée qu’ils n’avaient pas connue, mais que d’aucuns de leurs ancêtres avaient vécue dans le royaume de Jérusalem, ils faisaient preuve, de jour en jour, d’un enthousiasme contagieux et s’adaptaient, bon an mal an, à la plupart des contraintes que leur imposait la Règle teutonique.

    Ainsi, pendant sept jours et sept nuits, je feuilletai fébrilement les folios d’innombrables traités. Certains ne présentaient guère d’intérêt pour l’avancement de mes recherches. D’autres excitèrent ma curiosité : De Fratres militae Christi sub speciale sedis protectione, De Chronicon Terra Prussiae du chroniqueur Peter von Dusburg De tabulae ordinis Theutonici sur les origines de l’Ordre, De narratio de primordiis ordinis Theutonici sur la vie, la règle, l’administration des commanderies et des hôpitaux, et surtout, De historia orientalis rédigé par un chroniqueur, évêque de la ville de Saint-Jean d’Acre, Jacques de Vitry.
    Ce dernier registre, magnifiquement relié et enluminé, retraçait la vie politique, militaire et diplomatique de l’Ordre jusqu’en l’an 1293, deux ans après que le maître allemand, Konrad von Feuchtwangen, participe d’héroïque façon, à la tête des chevaliers teutoniques, aux ultimes combats qui avaient précédé la chute sanglante, le 18 mai de l’an 1291, de la ville, dernier bastion chrétien, dernier témoin de la présence des Croisés en terre d’Orient.
    Le maître allemand avait été élu par le chapitre général à la tête de l’Ordre teutonique, à Venise, un an après l’effondrement de ce qu’il restait du royaume de Jérusalem. Mais le massacre de plus de trente mil chrétiens par les Mameluks du sultan Qualaoun n’avait pas changé la destinée de l’Ordre allemand.
    Il s’était déjà largement replié depuis l’âge d’or du magistère de son grand maître, Hermann von Salza, cinquante ans plus tôt, vers ses possessions en Prusse et en Allemagne orientale qu’il avait considérablement élargies,

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