Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
La malediction de la galigai

La malediction de la galigai

Titel: La malediction de la galigai Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean (d) Aillon
Vom Netzwerk:
comme pour une bataille. Une épée de côté, une autre de selle, deux pistolets d'arçon, son pistolet à quatre coups, une main gauche et un mousquet.
    Elle s'étonna.
    â€” Les routes sont peu sûres, Armande, mais rassure-toi. On est samedi. Je serai revenu au milieu de la semaine prochaine. D'ailleurs, je dois assister à une assemblée du Conseil jeudi.
    Huit jours plus tard, il n'était pas rentré.
    1  Rideau de lit.
    2  Le dîner était le repas pris entre onze heures et midi.
    3  C'est-à-dire le parquet : avocats et procureurs du roi.
    4  L'exécuteur de la haute justice de Paris.

13
    R ue du Pas-de-la-Mule, la boutique de Ganducci était plus souvent tenue par un commis que par le gantier parfumeur. Ceux qui cherchaient Alberto Fenicci (nom sous lequel on le connaissait dans le quartier) le trouvaient surtout là où il pouvait laisser traîner ses oreilles et surprendre des indiscrétions transmises ensuite à Ondedei et Mazarin.
    Le 1 er  août, après avoir écouté, sur la place Royale, une intéressante conversation entre l'épouse d'un traitant et la maîtresse d'un échevin, Ganducci se rendit à la Fosse aux Lyons pour se désaltérer d'un clairet de Montmartre bien frais, tant la chaleur se révélait insupportable.
    Le cabaret était surtout fréquenté par des gens de plume et des pamphlétaires. L'endroit avait longtemps abrité la Confrérie des bouteilles, association d'écrivains libres-penseurs dont Vincent Voiture constituait l'un des membres les plus éminents. Du vivant de Voiture, on n'y voyait pas Ganducci, car le poète connaissait ses activités douteuses auprès du cardinal. Désormais, le poète étant mort l'année précédente, les seuls qui auraient pu le démasquer étaient l'abbé Ménage 1 et le baron de Blot. Mais avec les troubles de la fronderie, le secrétaire du coadjuteur Paul de Gondi n'avait plus le temps d'aller au cabaret et Blot, auteur des plus violentes mazarinades, ne prenait pas le risque de s'y montrer.
    Obscure, la salle était enfumée à la fois par la cheminée, dans laquelle un feu brûlait quelle que soit la saison, et par la fumée des pipes des clients. La Coiffier, maîtresse des lieux, imposait le souper à prix fixe avec un repas à six pistoles. Malgré ce tarif élevé, le cabaret ne désemplissait pas au moment du souper.
    *
    Pour l'instant – il était encore tôt –, il n'y avait que quelques buveurs faisant un vacarme infernal, chantant et s'interpellant à qui mieux mieux.
    Ses yeux accoutumés à l'obscurité, Ganducci balaya la salle du regard et retint un sourire satisfait en découvrant Canto, Pichon et Sociendo attablés dans un coin. Depuis trois jours, il les cherchait.
    Canto, seigneur de La Cornette, n'avait pas le teint sombre et le corps trapu qu'ont souvent les montagnards béarnais. Bien au contraire, s'il possédait la musculature puissante des Gascons, il était d'une belle taille. Son visage aux plis marqués, au nez mince, à la moustache et à la barbe piquées de gris, n'aurait pas attiré l'attention s'il n'avait eu le regard sinistre qu'affichent ceux qui prennent plaisir à faire le mal. Vêtu d'un grossier habit de drap lie-de-vin avec un baudrier de buffle élimé soutenant une lourde rapière à poignée de cuivre, il était coiffé d'un vieux feutre à plumes de coq et chaussé de bottes à revers, souillées et décousues.
    Son voisin et ami, Pichon, seigneur de La Charbonnière, était aussi grand que lui avec un visage long et osseux surmonté d'une tignasse paille mal frisée. Ses joues fardées, sa moustache relevée au fer, ses lèvres passées au rouge, lui donnaient une vague allure bienveillante, renforcée par un sourire inspirant confiance. Comme Canto, il portait une brette sur un pourpoint de taffetas vert reprisé à plusieurs places.
    Quant à Sociendo, avec son poil noir, son corps replet, sa crinière frisée en couronne sur son crâne chauve et son nez camus, il donnait l'impression d'une imitation ratée du coadjuteur Paul de Gondi. Attifé d'un simple habit de drap noir avec petit bonnet, il aurait pu passer pour un avocat ou un procureur s'il n'avait eu les doigts vulgairement couverts de bagues dorées aux pierres

Weitere Kostenlose Bücher