La malédiction des templiers
ronronnement sourd attira l’attention de Reilly, qui se retourna vivement pour constater que le volet roulant à l’entrée de la rampe menant vers l’extérieur était en train de se baisser. L’un des mécaniciens, remis de ses émotions et appuyé contre le mur, venait d’actionner le boîtier, content de lui à en juger par son sourire réjoui.
— Accrochez-vous ! rugit Reilly en passant en marche arrière et en appuyant à fond sur la pédale d’accélérateur.
Le lourd véhicule fit une brutale embardée, ses pneus crissant sur le plancher en acrylique. Tant bien que mal, l’Américain fit franchir aux quatre tonnes du 4 × 4 l’espace qui les séparait de la rampe, essayant autant que possible de ne pas heurter les parois latérales, tout en surveillant d’un œil le volet roulant qui continuait de descendre. Il parvint de justesse à passer dessous, le toit de la cabine de verre raclant bruyamment le bas du volet, dans le fracas aigu du métal mordant sur le verre de sécurité renforcé. Emergeant à l’air libre, ils se retrouvèrent sur l’avenue qu’ils avaient parcourue en courant à peine quelques minutes plus tôt.
D’un brusque coup de volant, il fit faire demi-tour au gros 4 × 4, poussa le levier sur « drive » et accéléra à fond. Etroite et bordée de chaque côté par des voitures à l’arrêt, la voie longeait la Bibliothèque apostolique.
— Bien joué avec ce mécanicien, tout à l’heure, remarqua Reilly en coulant un regard de biais à son passager.
— Depuis que je suis né, mon pays a presque toujours été en guerre, expliqua l’Iranien avec un haussement d’épaules. J’ai fait mon temps dans l’armée, comme tout le monde. Vous savez où on est ?
— Plus ou moins… La porte se trouve de l’autre côté de ce bâtiment, ajouta Reilly en désignant la bibliothèque qui défilait sur leur gauche. Si ma mémoire est bonne, il devrait y avoir un passage dans la cour, là où sont garées les voitures.
Sa mémoire ne l’avait pas trompé. L’Américain engagea le 4 × 4 Mercedes dans l’étroit tunnel qui menait à la cour du Belvédère et vira autour des véhicules qui y étaient stationnés. Affolés, les touristes s’empressaient de se mettre en lieu sûr pour ne pas se faire écraser par l’énorme « papaquarium » portant la plaque d’immatriculation SCV1 – Stato della Citta del Vaticano , Etat de la Cité du Vatican, même si, pour la plupart des Romains, réputés pour leur humour, la véritable signification était plutôt Se Cristo Vedesse , « Si le Christ voyait ça ». La pique voulant dire que, au cours des siècles, les papes avaient détourné le message originel de Jésus, qui prêchait la non-possession des biens de ce monde.
Un autre passage voûté au fond de la cour les conduisit de l’autre côté du complexe de la bibliothèque ; ils débouchèrent ensuite sur la Via del Belvedere, qu’ils dévalèrent sans encombre en direction de la porte Sainte-Anne, qui leur permettrait de quitter la Ville sainte.
— On ne peut pas rester là-dedans, fit remarquer Sharafi. On attire un peu trop l’attention…
— Mais nous ne sommes pas encore tirés d’affaire, répliqua Reilly, les dents serrées, regardant droit devant lui.
Deux voitures de carabiniers – des Alfa Romeo bleu foncé aux lignes pures, aux calandres menaçantes, gyrophares bleus en action et sirènes hurlantes – venaient d’émerger devant eux d’une rue latérale et fonçaient droit sur la papamobile.
Décidément, rien ne se passe selon le plan prévu, songea Reilly en fronçant les sourcils à l’idée de jouer aux gendarmes et aux voleurs avec la police italienne, au volant d’une papamobile volée. Et c’est pourtant ce qu’il était en train de faire. Les voitures des forces de l’ordre se rapprochaient à toute allure. A cet instant précis, le visage de Tess apparut dans son subconscient. Il se la représenta dans un horrible trou à rats, enchaînée à un radiateur, réduite à l’impuissance, tandis que le psychopathe qui l’avait enlevée rôdait non loin. Il ne pouvait pas reculer, il devait les sortir de là, avec le livre. Il devait réussir son coup. Pour elle.
Il roulait toujours, pied au plancher, droit sur les Alfa.
— Agent Reilly…
Sharafi était crispé, sa main droite serrant convulsivement l’accoudoir.
L’Américain ne cilla pas.
Une nanoseconde avant le choc frontal, la voie sur laquelle ils
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