La malédiction des templiers
l’homme et l’entendit répéter le mot « bomba ». Pas besoin de traduction. Puis un autre mot lui parvint, « donna » , lui aussi prononcé à plusieurs reprises. Un mot qui lui arrachait le cœur. Donna – une femme. Oui mais… vivante ou… ?
Puisant dans des réserves d’énergie qu’il ne soupçonnait même pas, il s’arc-bouta contre la voiture pour se soustraire à la pression des policiers, réussit à les repousser, à leur échapper un instant, le temps de se faufiler jusqu’à l’arrière de la BMW et de regarder dans le coffre.
Elle était là.
Enveloppée dans un sac de couchage, attachée par des sangles au tapis de sol, les yeux et la bouche fermés par du ruban adhésif couleur argent. Son nez et deux petits morceaux de joues étaient les seules traces de peau visibles.
Totalement immobile.
Et juste à côté d’elle, dans le coin droit du coffre, un méli-mélo de paquets de Semtex gris, de fils, et un détonateur digital avec une petite LED rouge indiquant qu’il était armé.
Sans y prêter autrement attention, Reilly tendit les bras et caressa doucement des deux mains les joues de Tess, son pouce effleurant sa narine gauche.
La tête de la jeune femme eut un mouvement de côté.
Le visage de Reilly s’éclaira. Il jeta un coup d’œil aux policiers qui l’entouraient en silence, bouche bée, puis entreprit de retirer délicatement le ruban adhésif du visage de Tess, d’abord le morceau qui lui fermait la bouche, puis celui qui lui bouchait les oreilles et les yeux.
Elle le regarda, les yeux débordant de larmes d’angoisse et de joie, sa lèvre supérieure tremblotant.
C’était la plus belle chose qu’il eût jamais vue.
9
Mansour Zahed jeta un ultime coup d’œil à son rétroviseur avant de s’engager dans l’allée, sans remarquer quoi que ce soit de suspect, de près ou de loin. La maison que l’agence lui avait louée était située dans une rue résidentielle parfaitement tranquille. Les regards curieux n’étaient pas un sujet de préoccupation, d’autant que la petite allée était protégée de la rue par un haut portail métallique.
De toute façon, il n’avait aucunement l’intention de s’attarder outre mesure. Maintenant que ce qu’il était venu chercher se trouvait à l’abri sous le siège passager, il en avait probablement terminé avec Rome. Simmons, l’historien américain, lui confirmerait rapidement si c’était ou non le cas. Dans le même temps, du moins Zahed l’espérait-il, l’homme leur indiquerait leur prochaine destination. L’instinct de Zahed lui soufflait en effet qu’il allait bien vite devoir reprendre son bâton de pèlerin en laissant derrière lui la Cité éternelle, qui ne serait plus dès lors qu’une mention supplémentaire – rouge de sang – dans son effroyable, bien qu’anonyme, CV.
En passant sa journée en revue, il se sentit raisonnablement content de lui. Les choses ne s’étaient pas passées aussi simplement qu’il l’avait espéré, mais il était là, sain et sauf, et il avait le codex avec lui. Mission accomplie, se dit-il avec un sourire narquois ; il adorait cette expression et la connotation ironique qu’elle évoquait dans l’histoire récente. Et cependant, en se remémorant les événements qui s’étaient déroulés un peu plus tôt, il ressassait avec un malaise diffus les actions de l’agent du FBI. Une sensation dont Mansour Zahed n’était pas coutumier. Et qu’il n’était pas prêt à tolérer plus longtemps.
L’agent n’avait pas été compliqué à manipuler. Zahed avait réussi à l’attirer à Rome. Il lui avait aisément fait croire qu’il était cet ectoplasme de Sharafi, professeur de soufisme. Il avait actionné assez de boutons pour amener l’Américain à le faire pénétrer dans les recoins les plus profonds du saint des saints de sa religion. Sean Reilly n’avait pas flanché, pas plus au début qu’au cours des épisodes qui avaient suivi. Il avait accompli sans hésitation tout ce qu’on attendait de lui. Il s’était glissé dans la peau d’un criminel sans se soucier le moins du monde des conséquences.
C’est ce qui perturbait Zahed.
Il n’avait pas l’habitude de voir les gens s’engager ainsi à fond, en tout cas pas ces mollassons d’Occidentaux. Non qu’il eût sous-estimé Reilly. Même s’il n’avait pas eu grand-chose à se mettre sous la dent le concernant avant leur première rencontre, les renseignements qu’il
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