La malédiction des templiers
Les Templiers ont très bien pu lui mentir.
— C’est possible, mais je ne le pense pas. Ça se tient. En fin de compte, ils n’avaient guère le choix. En 1310, l’Ordre avait été aboli depuis un certain temps. Les Templiers qui n’avaient pas été arrêtés étaient recherchés en Europe occidentale, ils étaient donc dans l’incapacité d’y retourner. Impossible d’aller vers l’est, non plus : les musulmans s’étaient emparés de la côte dans sa totalité et avaient démantelé leurs forteresses.
— Mais alors, quelle pouvait bien être leur destination ?
— La seule qui était logique pour eux : le retour à Chypre. Conrad avait probablement conservé des amitiés dans l’île, où les hommes du pape ne disposaient que d’un pouvoir limité. Il aurait pu y trouver une sécurité relative et préparer l’étape suivante. Ce qui veut dire que, quel que soit l’endroit où ils se trouvaient dans ces montagnes, ils devaient absolument se diriger vers le sud, vers l’un de ces cols permettant de traverser les monts du Taurus, pour arriver jusqu’à la côte. Mais lequel ? That is the question.
Reilly hocha la tête, pas vraiment concentré sur ce que racontait Tess.
Celle-ci le dévisagea un instant avant de lâcher :
— Tu sais que tu m’as fichu la frousse, hier.
— Comment ça ? demanda-t-il en plissant le front.
— Devant le Patriarcat. La façon dont tu t’es rué sur ce type, dont tu l’as poursuivi comme si tu étais une armée à toi tout seul. Et puis, sauter comme ça du haut d’un pont… Ce n’est pas ta faute, tu sais, Sean.
— Qu’est-ce qui n’est pas ma faute ?
— Ce qui s’est passé au Vatican. Les bombes et tout ça. Bon sang, Sean, je suis beaucoup plus responsable que toi dans cette histoire, fit-elle en lui prenant la main. Je sais que tu veux retrouver ce salopard. Et je souhaite qu’il soit mis hors d’état de nuire plus que toi encore. Mais tu ne peux pas continuer à te mettre dans des états pareils. Il faut que tu parviennes à contrôler ta rage sous peine de te faire du mal. Beaucoup de mal. Et ça me fiche les jetons. Je ne veux pas que ça t’arrive.
Reilly fit signe qu’il avait compris le message. Quelque part, il savait qu’elle était dans le vrai. Il laissait sa colère brouiller son jugement. Mais avec des individus comme ce terroriste, il savait que des demi-mesures se révéleraient à coup sûr insuffisantes. S’il voulait avoir une chance de lui mettre la main dessus, il devait dépasser les limites de la prudence. Cela faisait partie intégrante du job. Mais ça n’était pas forcément quelque chose qu’il avait envie de répéter à Tess à tout bout de champ.
— Il n’y a franchement pas de quoi s’inquiéter, dit-il avec un petit sourire. Je t’assure. On m’a entraîné à pratiquer ce genre de sport, tu sais.
L’expression de la jeune femme ne se radoucit pas pour autant. Elle n’était pas dupe.
— Je parle sérieusement, Sean, dit-elle en retirant sa main. Je ne veux pas te voir mourir pour moi. Pas ici. Pas maintenant. Pas du tout. On a encore pas mal de choses à faire ensemble, toi et moi, tu ne crois pas ?
Cette remarque le prit de court et il se remémora ce qu’ils avaient vécu quelques mois plus tôt.
— Ne t’en fais donc pas, dit-il après un temps. Je ne vais pas m’en aller.
Les traits de Tess s’assombrirent brusquement.
— C’est ce que j’ai fait, moi. Je t’ai fait faux bond, et j’en suis désolée. Pour de vrai. Mais tu me comprends, non ? Tu comprends pourquoi j’ai eu besoin de prendre mes distances, hein ?
Le souvenir de leur ultime conversation avant le départ de Tess résonnait encore à ses oreilles.
— Est-ce que quelque chose a vraiment changé ?
Tess inspira longuement et tourna la tête vers le hublot. Ce n’était pas une question à laquelle elle avait envie de réfléchir pour le moment.
— Et si ça s’arrête là, entre nous ? lança-t-elle enfin. Est-ce qu’on sera capables de dépasser ça, toi et moi, ou est-ce que ça creusera dans ta vie un trou que je ne serai jamais en mesure de combler ?
Après avoir réfléchi un moment, il haussa les épaules.
— Etant donné ce qu’on est en train de faire, et ce qui nous a conduits là où nous en sommes une fois de plus, j’en viens à me demander si nous avons eu raison ne serait-ce que de tenter le coup.
Le visage de Tess refléta un mélange de surprise et de
Weitere Kostenlose Bücher