La mariage du Viking
noble, et n’est ni la fille ni l’épouse d’un thane. Elle ne vaut pas plus qu’une servante.
— Tais-toi, dit soudain Ilsa en voyant approcher Asa.
La jeune femme, dont la grossesse était bien avancée, descendait lentement le sentier vers la rivière, un petit panier de linge calé sur la hanche.
— Il est bon d’avoir une sage-femme avec nous au village, déclara Reinhild.
— Tu as eu ton fils sans elle, lui fit remarquer Usa.
Reinhild se garda bien de répondre. Ingemar songea alors que la jeune femme ne comprenait pas la menace que représentait la Saxonne pour elles toutes.
— Ne vois-tu pas qu’Einar et Ull se battent pour elle comme des enfants ? reprocha-t-elle à Reinhild. Certes, je sais qu’Einar ne la désire pas vraiment, mais tu sais comme il aime provoquer Ull — qui semble, quant à lui, fort épris de la Saxonne.
A la grande satisfaction d’Ingemar, Reinhild se montra contrariée par cette nouvelle. Dernière épouse de Ull, elle se savait disgracieuse et en souffrait, bien que chaque femme dans le village la trouvât nettement plus agréable que les autres compagnes du guerrier, dont Ilsa faisait d’ailleurs partie. Quoique plus jolie, celle-ci se plaignait de tout et passait son temps à geindre. Certains se demandaient encore pourquoi elle n’avait pas divorcé de Ull quand il s’était marié avec Reinhild, tandis que d’autres prétendaient qu’elle se savait incapable de trouver un autre époux.
Après avoir salué Asa de loin, Ingemar se pencha pour murmurer :
— Meradyce n’attire les hommes que par sa beauté. Sans cet atout, personne ne daignerait poser les yeux sur elle.
— C’est grand dommage que nous ne puissions lui jeter un sort qui la transformerait en laideron, marmonna Ilsa.
— Si seulement elle laissait nos maris tranquilles, soupira à son tour Reinhild.
— Oh ! s’exclama tout d’un coup Ingemar. Une idée me vient à l’esprit.
Dans un même mouvement, les deux femmes qui l’entouraient se rapprochèrent pour l’écouter.
***
Meradyce, qui était occupée à tisser dans la maison d’Olva, vit soudain surgir Ingemar qui, en larmes, agitée au plus haut point, s’adressa à Endera d’une voix hachée.
La fille d’Einar se tourna alors vers Meradyce et lui annonça :
— Un des enfants est tombé et s’est blessé à la jambe. Il saigne beaucoup.
— J’y vais, dit aussitôt Meradyce en se levant. Endera, attends ici le retour d’Olva, puis demande-lui de me rejoindre.
Endera acquiesça tandis que la Saxonne s’emparait du premier panier qu’elle trouva. Ignorant l’importance de la blessure, elle jugea préférable d’emporter plusieurs sortes de poudre. Certaines calmaient la douleur, d’autres empêchaient le sang de couler, d’autres encore avaient le pouvoir de désinfecter et de cicatriser une plaie.
Meradyce suivit la Viking dehors, qui la conduisit d’un pas rapide vers une maison située à l’autre bout du village. Sur le seuil, Ingemar s’écarta, laissa passer Meradyce, et la suivit à l’intérieur.
— Où est l’enfant ? demanda celle-ci aux deux femmes qui attendaient là.
***
Einar se dirigeait vers le champ où Bjorn construisait ses navires lorsqu’il entendit un cri. Un cri de femme. Faisant volte-face, il se précipita vers le village. Là, il aperçut une foule de curieux agglutinés devant la maison de Ull, d’où, étrangement, plus aucun bruit ne sortait.
Saisi d’un horrible pressentiment, Einar se rua à l’intérieur, en déchirant dans sa hâte la couverture qui fermait l’entrée.
Ull n’était pas là, mais il aperçut, au centre de la pièce, Ilsa et Ingemar penchées sur quelque chose qu’il ne pouvait voir. A l’arrivée du Viking, elles se levèrent et s’écartèrent. Dans un coin, se tenait Reinhild, qui pleurait, le visage entre les mains.
Alors seulement, Einar remarqua un corps allongé par terre. Celui d’une femme.
Meradyce !
Redoutant le pire, il s’approcha et étouffa un cri d’horreur. Aux pieds de Meradyce qui, lentement se relevait, gisait sa magnifique chevelure, éparse sur le sol, cisaillée par des mains cruelles et jalouses. A son visage souillé de poussière, à sa robe déchirée, Einar devina qu’elle s’était débattue. Cependant, elles avaient réussi à s’acharner sur elle, pour ne laisser sur sa tête qu’une toison pas plus longue qu’un doigt.
Einar se tourna vers Ingemar, qui tenait encore le couteau
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