La mariage du Viking
coffre qu’il lui avait donné. Meradyce avait dû, pour la trouver, fouiller dans toutes les malles qu’il détenait. Mais, peu importait si elle l’avait prise sans permission : le long vêtement lui allait divinement bien. Il ne reconnaissait pas non plus le bijou d’argent, mais pensa qu’il venait aussi d’un des coffres où s’amassaient les butins rapportés de leurs pillages.
Comme Meradyce s’avançait vers eux, les formes voluptueuses de son corps moulé dans le drap de lin n’échappèrent à aucun des guerriers.
Dans les mains, elle tenait un carafon d’argent, et sa démarche était si légère qu’elle semblait glisser sur le sol. Elle s’arrêta devant Ull et Einar, totalement fascinés.
Un sourire ensorceleur aux lèvres, Meradyce se pencha en avant, offrant ainsi à Einar le doux plaisir de devinerla rondeur de sa poitrine. Puis, s’emparant de la corne vide, elle se chargea de l’emplir de vin.
Médusé, le Viking avait l’impression d’avoir devant lui une déesse descendue du Valhalla pour le satisfaire.
Cependant, et à sa plus grande déception, il vit Meradyce se diriger vers Ull et le servir. Lorsqu’elle se redressa, la jeune femme leur sourit de nouveau et, d’une main fine, repoussa de son front une mèche brune et bouclée.
— Svend a décrété que je pouvais être courtisée, dit-elle tranquillement, et j’y consens.
Posant ses longs doigts sur la broche qu’elle portait près du cœur, elle ajouta :
— Merci de votre présent, Ull.
Saisi de fureur, Einar se retint férocement pour ne pas étrangler son rival.
— Et, merci pour la robe, Einar, laissa-t-elle tomber de l’air le plus naturel du monde.
Ce disant, Meradyce passa une paume sensuelle sur le drap qui lui moulait le corps. Puis, après un dernier sourire éloquent, la Saxonne fit volte-face et, d’une démarche tranquille, quitta la grande salle.
***
Einar demeura muet le restant de la soirée, alors qu’à côté de lui, Ull continua de se gaver d’hydromel. Et il se garda bien de faire le moindre commentaire lorsque le barde leur conta la légende de Sif.
Sif, la femme de Thor, dormait lorsque Loki, dieu démoniaque, s’introduisit chez elle pour lui couper sa longue crinière dorée. Thor menaça alors Loki de lui briser les os s’il ne rendait pas aussitôt sa chevelure à Sif. Le démon, craignant la fureur de Thor, alla chercher de l’aide chez les nains. Sans attendre, ceux-ci s’attelèrentà leurs rouets et, de la laine la plus fine, fabriquèrent de longs fils d’or qui, une fois posés sur la tête de Sif, poussèrent tels de véritables cheveux.
Cependant, Loki s’était en même temps joué des nains, et ses plans machiavéliques se multiplièrent jusqu’à ce que les lutins se vengent en lui cousant les lèvres. Loki parvint sans peine à se débarrasser des fils qui l’empêchaient de parler, mais il avait été humilié. Méprisant le fait qu’il restait le seul instigateur des conflits qui les opposaient, aujourd’hui encore il continuait de conspirer contre les dieux.
Alors que le poète poursuivait son récit, Svend et les autres guerriers ne cessèrent de jeter vers Einar et Ull des regards inquiets. Les cheveux coupés de Meradyce allaient-ils semer la discorde chez les villageois comme chez les dieux ?
Tandis que Ull continuait d’étancher avec l’hydromel une soif qu’il n’avait plus, Einar se demandait comment relever le défi que lui lançait Meradyce. Car il s’agissait bien là d’un défi. N’avait-il pas depuis longtemps décidé qu’aucune femme ne valait la peine que l’on se batte pour elle ? Et cette Saxonne qui le forçait à revenir sur sa décision ! Le premier effet de surprise dissipé, il sentait à présent monter en lui une sourde colère contre elle.
C’était pure folie que de le harceler de la sorte, et plus grand danger encore que d’aiguillonner ainsi la bête sans âme qu’était Ull. A quoi pensait donc Meradyce pour agir ainsi ?
Ull finit par s’endormir, sa tête s’affaissant lourdement sur son poitrail. Alors, Einar se leva et, après un signe pour saluer Svend, sortit de la salle, parfaitement conscient que tous le suivaient des yeux.
Dehors, dans la nuit glacée, il ignora le vent du nordqui lui mordait cruellement le visage. Les yeux clos, le Viking huma les embruns salés, sentit la mer qui l’appelait pour un nouveau voyage. Un très long voyage, qui l’emmènerait loin, n’importe où,
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