La mariage du Viking
membrures à la coque. La proue était inexistante, sans doute arrachée par les eaux furieuses.
Les rames qui émergeaient des flancs du vaisseau s’activaient encore ; mais elles cessèrent dès que l’équipage se mit à crier.
Puis, Meradyce aperçut Einar qui, de sa longue foulée, gagnait la proue. Alors, oubliant son ventre lourd, elle se mit à courir vers l’embarcadère, submergée d’une telle joie qu’elle pleurait et riait à la fois.
Sans attendre que le vaisseau fût amarré, Einar sauta sur le quai et se précipita vers sa femme pour l’enlacer.
— Meradyce… Meradyce…, soupira-t-il en lui embrassant les joues, les lèvres, les yeux.
Bouleversée, tremblante de bonheur, la jeune femme étreignit son époux de toutes ses forces et laissa enfin libre cours à des émotions trop longtemps retenues.
Le cauchemar était terminé. Einar lui était revenu.
Au milieu des cris de joie, les guerriers jaillirent du bateau pour se jeter dans les bras de leurs femmes et de leurs enfants. Et celles qui n’avaient plus de mari ne purent s’empêcher de sourire devant le bonheur retrouvé de leurs compagnes.
***
Ce soir-là, blottie contre son mari, sous la couverture de fourrure, Meradyce murmura :
— Je suis heureuse que Hamar soit notre chef. C’est un homme sage et avisé.
— N’aurais-tu pas préféré que ton époux fût le chef du village ? répliqua Einar en feignant la déception.
— Oh ! non, répondit Meradyce avant de l’embrasser. Je ne veux te partager avec personne, encore moins un village entier.
— Dois-je comprendre que je serais mal inspiré en prenant une seconde épouse ?
— Très mal inspiré !
— Mais, ne devrai-je pas moi-même te partager avec nos enfants ?
— C’est vrai, reconnut-elle dans un sourire.
Einar abaissa soudain sur sa femme un regard inquiet.
— Le bébé… Crois-tu que le voyage a pu… ?
— Non, Einar, le rassura-t-elle. Le bébé va très bien. Il m’a donné plusieurs coups de pied, aujourd’hui. Je suis certaine qu’il est en pleine santé. Endera m’a forcée à me reposer, ce matin ; et il était hors de question que je lui désobéisse. Sais-tu combien elle te ressemble ? Si elle n’avait pas été aussi efficace sur le navire, peut-être ne serions-nous jamais rentrés.
— Avant de mourir, Ull m’a révélé qu’il était son père.
— L’as-tu cru ?
— Oui. Mais cela importe peu. Je considère Endera comme ma fille, c’est tout.
Meradyce savait qu’Einar parlait sérieusement, et cela la rendit infiniment heureuse.
— Tu as dit « il », remarqua-t-il soudain. L’enfant est donc un garçon ?
— Je ne pourrais pas le jurer. Cela peut très bien être une fille.
— Mais tu crois que c’est un garçon, n’est-ce pas ?
— L’arrivée d’une fille te décevrait-elle à ce point ? demanda Meradyce en s’appuyant sur un coude.
— Si elle est comme sa mère, elle sera extraordinaire ! répliqua Einar avec fierté.
— En parlant de fille, je crois que certains jeunes gens s’intéressent beaucoup à Endera, observa Meradyce, l’air pensif. Il est peut-être temps de songer à la marier.
— Peut-être. Mais, pour l’heure, c’est à toi que je veux penser, ma bien-aimée. C’est toi que je veux toucher, aimer, vénérer…
Lorsque Einar commença de lui caresser la cambrure des reins, Meradyce poussa un soupir de bien-être et se pencha pour l’embrasser.
— Si nous avons un fils, comment l’appellerons-nous ?
— Svend.
Ce prénom, autant que l’assurance avec laquelle Einar l’avait prononcé, fit sourire la jeune femme.
— Et si c’est une fille ?
— Elle s’appellera Betha.
D’une main douce, Einar vint essuyer la larme qui coula sur la joue de sa femme.
— As-tu des regrets, Meradyce ?
— Aucun, mon amour, chuchota-t-elle avant de se blottir contre le corps puissant du Viking.
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