La mariage du Viking
ailleurs…
Einar rentra chez lui, puis se figea quand il aperçut Meradyce qui l’attendait. Sur un bras, elle portait la robe de lin bleu, tandis qu’une autre tenue plus simple ne laissait plus rien entrevoir de ses formes voluptueuses.
— Je suis venue vous rendre ceci, dit-elle.
— Pourquoi toute cette mascarade ? demanda Einar avant de s’approcher lentement.
A la façon dont Meradyce releva le menton, il comprit qu’elle n’avait aucune intention de se repentir.
— Pensez-vous que c’est la première fois que je me vois punie de ma beauté ?
Jamais Einar n’avait songé à cela.
— Je suis lasse de l’injustice. Lasse des murmures, des regards jaloux, des bavardages. Je suis lasse des hommes qui me considèrent comme une pierre précieuse ou une étoffe rare.
— Est-ce donc une façon de vous venger ? demanda Einar qui connaissait déjà la réponse.
Souvent, lui aussi avait deviné de la jalousie dans les yeux de certains guerriers, qui pensaient que leur chef le favorisait uniquement par instinct paternel. Des hommes tels que Ull.
— En quelque sorte, répondit Meradyce avant de poser la robe sur un des coffres qui ornaient la chambre du Viking.
— Y a-t-il autre chose qui vous aurait poussée à ce geste ? insista Einar.
— Comment un Viking désire-t-il mourir ? interrogea-t-elle soudain en le regardant droit dans les yeux.
— Au combat. Pour pouvoir pénétrer dans le Valhalla et festoyer avec les dieux.
— J’ai cessé de me battre, déclara-t-elle alors, avec une moue désabusée. Je ne pourrai jamais gagner. J’avais pourtant espéré…
Pour la première fois, Einar vit une expression de défaite dans le beau regard de la Saxonne. Après un profond soupir, celle-ci poursuivit :
— Il y a une part de moi-même qu’aucun homme ne saura jamais atteindre. Néanmoins, si je ne peux éviter le mariage, je saurai m’y résoudre. Dans ma défaite, j’aurai peut-être une idée de ce qu’aurait pu être la victoire. C’est tout ce que je puis espérer.
Einar s’approcha encore de la jeune femme et lui dit doucement :
— Je ne vois aucune défaite en vous, Meradyce. Ce que vous avez fait ce soir n’était pas le geste d’une perdante, mais celui d’une guerrière.
Meradyce éprouva un immense plaisir en décelant dans les yeux d’Einar autant de sincérité que d’admiration. A cet instant seulement, elle comprit le véritable sens de son attitude, dans la maison de Svend. Elle désirait Einar. Comme elle n’avait jamais désiré aucun homme. Elle avait faim de lui, de son esprit, de son corps. Même si une partie d’elle-même, une part de son âme, appartenait encore et pour toujours à Paul.
Lorsque Einar la prit entre ses bras, Meradyce ne résista pas. Et, quand ses lèvres rencontrèrent les siennes, la passion s’éveilla en elle. Une passion qui dormait depuis si longtemps qu’elle avait l’impression de n’avoir pas réellement vécu jusqu’à cet instant.
— Devons-nous dire à Ull qu’il a perdu ? souffla Einar contre son oreille.
— Pourquoi ? demanda-t-elle dans un brusque mouvement de recul.
La question, comme sous l’effet d’une gifle, venait de lui rendre la raison. Jamais elle ne permettrait à quiconque — même pas à lui — de lui arracher sa victoire, aussi petite fût-elle !
— Vous me désirez, Meradyce. Je le sais.
— Vous m’avez embrassée, rétorqua-t-elle sur un ton sec. Je vous y ai autorisé. Mais je n’ai pas donné à Ull pareille occasion. Pas encore.
— Vous jouez un jeu extrêmement dangereux, Saxonne, lâcha Einar d’une voix vibrante de colère.
— Un jeu dont je n’ai pas encore établi les règles, lui rappela-t-elle avant de se diriger vers la porte.
— Parfait, reprit Einar dont l’expression avait recouvré un peu de douceur. Mais peut-être n’aurai-je point envie de jouer. Allez voir Ull, si tel est votre désir. Je serai encore là, si vous changez d’avis.
Comme Meradyce s’apprêtait à sortir, Einar lui lança :
— Mais, ne vous avisez plus d’entrer ici sans prévenir. Je pourrais bien ne pas être seul.
La jeune femme disparue, le Viking se laissa tomber sur un siège. Faire preuve d’autant d’indifférence hautaine lui avait demandé un effort surhumain.
Saisissant une gourde de peau emplie de vin, Einar avala une longue gorgée du liquide bienfaisant, puis contempla la robe bleue laissée sur le coffre.
Par Thor, cette Saxonne
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