La mariage du Viking
de Svend. Et peut-être commençait-il à douter que la femme à qui il avait tout sacrifié se donnât un jour à lui…
Ingemar se prit à sourire intérieurement. Ce soir, elle s’abandonnerait dans les bras de Lars, et elle le comblerait tant que tout regret le quitterait.
Lars ne devait pas non plus oublier qu’elle aussi avait renoncé à un certain confort. Son père, Bjorn, n’était-il pas le meilleur constructeur de navires du pays ? Ingemar se rappela, non sans amertume, ses adieux avec celui-ci. Abîmé dans ses recherches pour la conception d’un nouveau mât, il s’était montré distrait, presque indifférent au départ de sa fille. Il ne l’avait pas beaucoup écoutée, elle ne l’avait pas beaucoup écouté non plus — ainsi allait leur relation, depuis des années.
Ingemar était heureuse d’être partie, soulagée de ne plus avoir à souffrir les regards de ses amies vikings, qui, inévitablement, la comparaient à la Saxonne.
— Lars ! s’écria une jeune femme tandis qu’ils pénétraient dans l’auberge. Es-tu seul ? Où est Einar ?
Non sans un pincement de jalousie, Ingemar avisa la jolie créature qui s’approchait.
— Bonjour, Sigrid, répondit Lars dans un sourire. Je suis venu seul…
Un coup de coude de sa compagne lui rappela son nouvel état d’homme marié.
— Je suis venu avec Ingemar, s’empressa-t-il de corriger. Ma femme.
Ingemar réprima un hoquet de surprise. Certes, elle partageait la vie de Lars comme s’ils étaient mariés, mais ils ne s’étaient jusque-là offert aucun présent.
— Nous avons une très jolie chambre, déclara Sigrid en jetant à Ingemar un regard entendu.
— Parfait, répondit celle-ci.
— Suivez-moi.
Sigrid les conduisit à travers une salle emplie d’hommes dont certains dévisagèrent Ingemar avec convoitise, ce qui ne fut pas pour lui déplaire.
— Quel dommage qu’Einar ne soit pas avec toi ! dit Sigrid alors qu’ils arrivaient près d’une maison annexe à l’auberge.
— Einar est marié, expliqua Lars.
— Vraiment ? s’étonna la jeune servante.
Après leur avoir ouvert la porte d’une chambre au plafond bas, elle demanda :
— Quand viendra le printemps, amènera-t-il ici son épouse ?
— Sans doute, répondit Ingemar, ravie de la déception qu’elle découvrait sur le visage de cette ancienne rivale.
Car elle devinait que cette Sigrid avait dû partager le lit d’Einar. Mais le dépit de cette servante ne lui fournissait qu’une maigre consolation. Jamais, en fait, elle ne pardonnerait à Einar ! Chaque jour, sa haine pourlui grandissait, et elle n’abandonnait pas l’idée d’obtenir un jour sa revanche.
Ingemar saurait bien persuader Lars de lui révéler où était la taverne des Saxons. Alors, elle se rendrait là-bas et leur indiquerait le moyen de récupérer les enfants de Kendric — ainsi que cette maudite Saxonne.
Lorsque Sigrid fut sortie, Ingemar gratifia Lars d’un sourire enjôleur et, très lentement, se dévêtit…
***
Ull tira violemment Siurt du lit.
Celui-ci laissa échapper un juron, sa femme remua près de lui, mais Ull ignora leur mécontentement.
— Habille-toi, ordonna-t-il.
Siurt voulut protester mais se ravisa lorsqu’il constata que son frère était ivre. Dans ces cas-là, toute discussion avec lui restait vaine et risquait plutôt de mener à la bagarre.
— D’accord, marmonna-t-il.
Après s’être vêtu à la hâte, Siurt suivit Ull dehors, jusqu’aux quais. La nuit était noire, sans un rayon de lune pour éclairer leurs pas. Amarrés le long des embarcadères, les drakkars oscillaient doucement sur l’eau paisible.
— Svend n’aurait jamais dû donner cette femme à Einar, déclara Ull, les sens échauffés par l’alcool.
Siurt lâcha un soupir d’exaspération. Son frère allait de nouveau se lancer dans des jérémiades interminables, et la nuit était froide !
— Il ne pouvait pas te la donner, objecta Siurt. Ilsa aurait tout de suite demandé le divorce.
— Je voulais justement me débarrasser de cette garce.
— Son père aurait été furieux, tu le sais.
— Celui-là, j’en aurais fait mon affaire.
— Quelle importance, maintenant ? reprit Siurt, conscient de l’inutilité de cette discussion. Ce qui est fait est fait.
— Il est temps que Svend cède sa place de chef à un autre, affirma soudain Ull.
— Einar ne veut pas être chef.
— Je n’ai jamais parlé d’Einar, protesta
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