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La Marquis de Loc-Ronan

La Marquis de Loc-Ronan

Titel: La Marquis de Loc-Ronan Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ernest Capendu
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voir un prisonnier.
    Chaux sortit sans répondre. Carrier paraissait être de mauvaise humeur, et dans ces moments-là ses meilleurs amis eux-mêmes, ses plus dévoués lieutenants n’osaient lui adresser la parole.
    – Très bien, dit Fougueray après la sortie du sans-culotte.
    Carrier donna un violent coup de poing sur la table.
    – Tu te moques de moi ! s’écria-t-il dans un style plus énergique que celui qu’il nous est permis d’employer ; tu te moques de moi, citoyen !
    – C’est possible, répondit imperturbablement Fougueray ; mais, dans ce cas, c’est sans le vouloir. Explique-toi.
    – Tu me dis d’empêcher d’entrer dans les prisons et tu en sors ! c’est au Bouffay que mon aide de camp t’a trouvé.
    – Eh bien, après ?
    – Eh bien ! tu as vu le marquis !
    – Oui.
    – Et tu as la lettre, et tu n’as plus besoin de le voir.
    Fougueray haussa les épaules.
    – Me crois-tu donc un niais ? dit-il dédaigneusement. Si j’avais la lettre du marquis, si j’avais pu me passer de toi, est-ce que je serais ici ? Au lieu de suivre ton aide de camp, je galoperais en ce moment sur la route en tournant le dos à la ville.
    Carrier sourit ; cette franchise de voleur le rassura complètement.
    – C’est vrai ! dit-il. Tu es plus fort que je ne le pensais. Mais si tu n’as pu avoir cette lettre…
    – Je l’aurai, interrompit Fougueray. Je tiens le marquis à tel point qu’il n’oserait pas même se tuer pour m’échapper. Les millions seront à nous, vois-tu, comme nous voici deux bandits dans la même chambre. Ce soir, à onze heures, je serai à la prison, et je ne reviendrai ici qu’avec la lettre, j’en réponds.
    – Je donnerai l’ordre à Chaux de ne pas te quitter depuis ton entrée au Bouffay jusqu’à ton retour ici.
    – À ton aise !
    – Maintenant, dit Carrier, va à tes affaires, et à ce soir ! Oh ! nous avons joyeuse réunion à souper, tu sais ?
    – Avant d’aller au Bouffay, je viendrai ici prendre tes ordres pour pouvoir entrer dans les prisons, et en même temps je t’amènerai quelqu’un.
    – Homme ou femme ?
    – Femme.
    – Jeune ?
    – Vingt ans.
    – Jolie ?
    – Blonde comme un épi et blanche comme un ci-devant lis.
    – Aimable ?
    – Elle est un peu folle.
    – Bah ! ce sera plus amusant. Nous la ferons boire, et peut-être sa raison se retrouvera-t-elle au fond d’une bouteille. Amène ta protégée ; je lui réserve bon accueil, d’autant plus qu’Angélique et Hermosa commencent à me fatiguer.
    – Sultan ! répondit Diégo en riant. Cet aristocrate de Salomon n’était qu’un caniche pour la fidélité auprès de toi ! Allons, à ce soir. Tu seras content !
    Et Diégo, échangeant une poignée de main avec le proconsul, quitta le cabinet de travail.
    – Si j’ai l’argent dans quarante-huit heures, pensait Carrier en le regardant s’éloigner, dans cinquante, toi, tu seras déporté verticalement !
    – Ah ! tu ne veux pas que je revoie Philippe de Loc-Ronan sans tes ordres ! se disait de son côté Diégo, en traversant la cour. Ah ! j’ai eu un accès de loyauté et de franchise, et tu ne m’en sais pas gré ! Eh bien ! tant pis pour toi ! Décidément, tu n’auras rien, et j’aurai tout ! Imbécile, qui oublie qu’il m’a remis hier soir trois blancs-seings ! Est-ce que j’aurais été assez bête pour les employer tous ! Il m’en reste un, et avec celui-là j’entrerai dans les prisons quand je voudrai !

XXVI – LA MARCHANDE À LA TOILETTE
    Diégo était sorti et avait gagné la place. Tout à coup il s’arrêta en réfléchissant profondément.
    – Le renard, dit-il, est capable de me faire épier, et cinq minutes après mon entrée au Bouffay il serait averti. Mon blanc-seing ne me servirait donc à rien qu’à me faire prendre. Il faut trouver autre chose !
    Et l’Italien se remit en marche, la tête penchée, le front soucieux, dans l’attitude de quelqu’un qui médite, absorbé dans sa pensée. L’imagination du bandit était de celles qu’on ne prend jamais sans vert : son cerveau, éclos sous le soleil des Calabres, était doué d’une activité dévorante. Bientôt son œil étincela et sa lèvre ébaucha un sourire.
    – Tout me sert ! dit-il joyeusement, même l’idée que j’ai eue de lui conduire Yvonne. La Bretonne est encore jolie, je la parerai en conséquence : ce sera du fruit nouveau. Elle l’occupera bien deux heures

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