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La Marquis de Loc-Ronan

La Marquis de Loc-Ronan

Titel: La Marquis de Loc-Ronan Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ernest Capendu
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Angélique s’échappa des bras qui l’enlaçaient et se recula vivement.
    – L’oiseau est farouche, dit le nouveau venu avec insouciance.
    – Elle est ma maîtresse ! répondit brusquement Carrier.
    – Eh bien ! si je reste quelques jours à Nantes, tu me la céderas, n’est-ce pas ?
    – Est-ce pour cela que Robespierre t’envoie ?
    – Robespierre m’envoie pour t’aider à pacifier la Vendée.
    – Toi ?
    – Moi-même.
    – Est-ce que la Convention trouve que je ne fais pas mon devoir ?
    – Elle trouve que tu vas lentement.
    – Elle n’a donc pas eu connaissance de mes projets ?
    – Si fait.
    – Eh bien !
    – Elle les approuve.
    – Ah ! s’écria Carrier avec un rire forcé, alors elle ne pourra plus me reprocher ma lenteur.
    Puis se retournant vers les femmes :
    – Allez-vous-en ! ordonna-t-il brutalement, j’ai à causer avec le citoyen.
    Madame Carrier se leva et obéit en grommelant. Hermosa et Angélique la suivirent. Arrivée à la porte, l’Italienne laissa passer les deux femmes, sortit la dernière, et, se retournant un peu, elle échangea un regard rapide avec l’envoyé parisien ; puis elle sortit, et la porte fut refermée avec soin.

IX – LES PROJETS DE CARRIER
    Quand les deux hommes furent seuls, ils s’examinèrent réciproquement. La défiance se lisait dans les yeux du proconsul.
    – Ton nom ? demanda-t-il brusquement pour couper court à l’examen que son interlocuteur passait de sa personne.
    Carrier ne pouvait supporter les regards fixés sur lui.
    – Ton nom ? répéta-t-il.
    – Le citoyen Fougueray.
    – Tu es un pur ?
    – Ma mission te le dit assez.
    – Oui ; mais sais-tu ce que j’entends par un bon patriote, moi ?
    – Non.
    – Je vais te le dire.
    – J’écoute, dit le nouveau personnage en prenant une pose insouciante.
    – J’entends un républicain capable de boire on verre de sang d’aristocrate ( sic ).
    – Verse, je boirai.
    – Bien ! Assieds-toi, alors, et causons.
    Les deux hommes s’installèrent sur le divan.
    – Tu dis donc, reprit Carrier, que la Convention a lu mon projet ?
    – Oui.
    – Et qu’elle l’approuve ?
    – Entièrement. Je ne suis venu à Nantes que pour en surveiller l’exécution.
    – Veux-tu que je te l’explique en détail ?
    – Cela me fera un véritable plaisir.
    – Eh bien ! écoute-moi.
    – Je suis tout oreilles.
    Tout en parlant, Carrier regardait en dessous, selon sa coutume, son interlocuteur. L’espèce de petite mise en scène qu’il venait d’exécuter en jouant les grands sentiments républicains, si fort de mode alors, n’avait eu d’autre but que d’impressionner l’envoyé de Robespierre.
    Mais Carrier avait vu avec dépit que cet homme n’avait paru éprouver non seulement aucune gêne en la présence du proconsul, mais même n’avait manifesté aucun étonnement, ni aucune curiosité. La proposition de boire un verre de sang d’aristocrate l’avait fait légèrement sourire, et il avait accompagné sa réponse laconique d’un regard quelque peu railleur qui avait démontré à Carrier que le nouveau venu était un homme peu facile à jouer. Aussi le commissaire républicain se tint-il sur ses gardes, et le proconsul s’effaça momentanément pour faire place au procureur.
    – Tu sais, citoyen Fougueray, reprit Carrier en caressant pour ainsi dire chacune de ses paroles, tu sais, citoyen Fougueray, que de toute la France, y compris Paris, Nantes est la ville où les aristocrates abondent le plus ?
    – Sans doute, répondit Diégo, et cela s’explique d’autant mieux que Nantes est au centre du foyer de l’insurrection de l’Ouest.
    – Depuis deux mois passés que je suis ici, j’ai fait activement rechercher les brigands pour les incarcérer.
    – C’était ton devoir.
    – Et je l’ai accompli.
    – Nous n’en doutons pas à Paris.
    – Oui ; mais ce que vous ne savez pas, c’est que les prisons sont petites ; elles regorgent d’aristocrates.
    – Bah ! c’est un bétail qu’il ne faut pas craindre d’entasser.
    – Sans doute ; mais l’entassement amène le typhus, et la nuit dernière un poste entier de grenadiers a succombé en quelques heures. Au Bouffay, les gardiens eux-mêmes tombent quelquefois en ouvrant les portes des cachots.
    – Et tu crains que le typhus ne gagne la ville ?
    – Certainement ; les bons patriotes pâtiraient pour les mauvais.
    – Et comme tu es bon patriote

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