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La Marquis de Loc-Ronan

La Marquis de Loc-Ronan

Titel: La Marquis de Loc-Ronan Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ernest Capendu
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savons cela, répondit Angélique avec ironie. Au reste, elle a le droit d’avoir plus d’intelligence que moi, elle a plus d’années.
    – Que veux-tu dire ? s’écria Hermosa en se redressant comme si elle venait d’être mordue par un serpent.
    – Je veux dire ce que je dis.
    – Insolente !
    – Insolente, oui ; menteuse, non.
    – Assez ! interrompit brusquement Carrier en se levant ; vous m’ennuyez toutes les deux.
    – Tu n’es pas aimable aujourd’hui, répondit Angélique.
    – C’est qu’il me plaît d’être ainsi.
    – Explique-nous encore une fois tes beaux projets ! fit Hermosa en s’appuyant gracieusement sur le bras du proconsul.
    – Ah ! cela te tient au cœur ?
    – Sans doute ! Ne s’agit-il pas de punir des aristocrates ?
    – Et tu les hais, n’est-ce pas ?
    – Oui ! je les hais et je voudrais voir tous les royalistes de la Bretagne et de la Vendée sous le couteau de la guillotine : deux surtout.
    – Lesquels ?
    – Boishardy d’abord.
    – Et puis ?
    – Un marin nommé Marcof.
    – Sois tranquille ; tu jouiras de ce spectacle plus promptement que tu ne le crois.
    – Comment cela ?
    – Tu le sauras plus tard.
    – Mais ce projet ? fit Angélique avec impatience.
    – Je vais te le raconter, ma belle ! répondit Carrier en passant le bras autour de la taille souple de la jeune femme, qui se cambra et se renversa à demi comme si elle eût voulu appeler sur ses lèvres le baiser de la bête venimeuse qui l’enlaçait.
    Pendant ce temps, la citoyenne Carrier tricotait toujours. La porte du cabinet s’ouvrit brusquement.
    – Que me veut-on ? s’écria le proconsul en faisant un pas en arrière et en s’abritant instinctivement derrière les deux jeunes femmes.
    Le misérable était tellement lâche, qu’il s’effrayait au moindre bruit. Un sans-culotte de garde parut sur le seuil.
    – C’est quelqu’un qui demande à te parler, citoyen, dit-il sans saluer.
    – Je ne reçois personne !
    – Il dit que tu le recevras.
    – Son nom, alors ?
    – Je n’en sais rien.
    – Et tu laisses ainsi pénétrer dans ma maison des gens que tu ne connais pas ! s’écria Carrier avec fureur.
    – Il a une carte de civisme du comité de Paris.
    – Qu’est-ce que cela me fait ?
    – Alors je vais lui dire qu’il s’en aille ?
    – Adresse-le au secrétaire.
    – Bien ! répondit le sans-culotte en se retirant.
    Cinq minutes après, il rentra.
    – Encore ? fit le proconsul : si tu me déranges de nouveau, je te fais incarcérer.
    – C’est le citoyen qui veut entrer.
    – Passe-lui ta baïonnette dans le ventre, à ce brigand-là.
    – Comme tu y vas, citoyen Carrier ! répondit une voix forte et bien timbrée. Est-ce ainsi que tu as l’habitude de recevoir les envoyés extraordinaires du Comité de salut public de Paris ?
    Ces paroles n’étaient pas achevées, qu’un nouvel interlocuteur se présentait à la porte du cabinet. C’était un homme de haute taille, un peu obèse et aux cheveux grisonnants. Il portait un costume à peu près semblable à celui du proconsul. En voyant cet homme, Hermosa tressaillit, et un éclair de joie brilla dans ses yeux.
    – Diégo ! murmura-t-elle.
    Le nom du Comité de salut public de Paris était une sorte de Sésame qui, à cette époque, ouvrait toutes les portes, même les mieux fermées. En l’entendant prononcer, Carrier fit un geste de surprise, et changeant de ton :
    – Tu es délégué par Robespierre ? demanda-t-il brusquement.
    – Oui ! répondit le nouveau venu.
    – Où sont tes pouvoirs ?
    – Les voici.
    Et l’envoyé du Comité parisien entra d’un pas assuré dans la pièce et tendit un paquet de papiers à Carrier. Celui-ci s’empressa de les ouvrir et les parcourut rapidement.
    – Il paraît que tu es un chaud patriote ! fit-il en levant les yeux sur l’inconnu.
    – Tout autant que toi, répondit ce dernier.
    – Alors nous nous entendrons.
    – Je le pense.
    – Tu as à me parler ?
    – Sans doute.
    – Immédiatement ?
    – Oui.
    – Scévola, ferme la porte, et cette fois, massacre le premier qui voudrait me déranger !
    Le sans-culotte obéit. L’envoyé du Comité de salut public jeta un regard autour de lui et put voir seulement alors les trois femmes.
    – Tiens ! fit-il en attirant Angélique, celle-ci est jolie.
    Et il l’embrassa familièrement. Carrier devint blême ; il était jaloux à l’excès.

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