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La Marquis de Loc-Ronan

La Marquis de Loc-Ronan

Titel: La Marquis de Loc-Ronan Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ernest Capendu
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cellier.
    – Laissez-moi voir la figure de ce tigre, dit-il en écartant Keinec et en plaçant en pleine lumière le visage de Pinard.
    Les paupières du sans-culotte firent un mouvement qui n’échappa pas à Marcof.
    – Le drôle revient à lui, dit-il.
    – Oh ! continuait le vieillard, c’est donc cet homme qui a fait mourir ma fille ; c’est lui qui a donné l’ordre de frapper mon frère !
    Et ses regards dévoraient pour ainsi dire toute la personne de l’ancien berger de Penmarckh. Marcof vit l’émotion profonde qui se peignait sur la physionomie de Kérouac. Il craignit une scène qui eût retardé l’exécution de son plan.
    – Kérouac, dit-il doucement, laisse-nous, mon vieil ami ; personne ne veille en haut, et il est urgent, par le temps qui court, que nous soyons avertis des moindres événements du dehors.
    Le vieillard hésita.
    – Vous ne le tuerez pas sans moi ? demanda-t-il avec anxiété.
    – Non.
    – Tu me le promets ?
    – Je te le jure.
    – Alors je vais veiller.
    Et Kérouac remonta lentement les degrés de l’escalier qui conduisait à la pièce supérieure. Le vieillard avait déjà disparu que l’on entendait encore ses sanglots.
    – Pauvre homme ! dit Boishardy, on lui a massacré son enfant ?
    – Oui, répondit le marin, les bleus sont venus ici ; ils ont emmené sa fille et son frère à Nantes. L’une a servi de jouet aux orgies de Carrier et est morte de faim et de douleur dans les prisons. L’autre a été guillotiné. Kérouac était à Nantes ce jour même, et il a vu rouler la tête de son frère en même temps qu’un geôlier compatissant lui apprenait qu’il avait perdu sa fille.
    – Les monstres ! murmura le gentilhomme.
    Puis désignant Pinard :
    – Celui-là payera pour tous ! ajouta-t-il.
    – Celui-là, répondit Marcof, celui-là nous procurera les moyens de satisfaire notre vengeance et d’arriver à notre but. Il nous aidera à frapper Carrier et à délivrer Philippe, ou, sur mon salut éternel, je le jure, il souffrira toutes les tortures de l’enfer. Allons, Keinec, il est temps d’agir. Tire ton poignard et pique ce misérable jusqu’à ce qu’il soit revenu complètement à lui.
    Keinec appuya la lame aiguë de son arme contre le bras de Pinard, et enfonça graduellement. Le sans-culotte poussa un cri de douleur.
    – Le voilà réveillé ! dit froidement le marin.
    – Oui, répondit Carfor en se redressant, oui, je t’entends et je te vois, Marcof ; mais sache bien que si je suis en ta puissance, ma volonté est plus forte que la tienne. Tu me tueras, cette fois, je ne dirai rien. J’ai subi déjà les tortures que tu m’as infligées ; mais aujourd’hui mon âme saura braver la douleur et sera plus puissante que mon corps !
    – Je crois que le bandit parle de son âme ! fit Marcof en riant. Il nous défie ; eh bien ! nous allons voir.
    Et s’adressant à Keinec :
    – Va nous chercher, dit-il, un réchaud de charbon et un morceau de fer.
    Keinec sortit vivement.
    – Qu’allez-vous faire ? demanda Boishardy.
    – Employer un procédé fort simple que j’emprunte aux Indiens de Ceylan pour faire obéir les éléphants.
    – Et quel est ce procédé ?
    – Il consiste, à l’aide d’une forte brûlure, à entretenir une plaie vive sur le cou de l’animal ; c’est dans le milieu de cette plaie que l’on enfonce la lame qui sert d’éperon. Le moyen est d’autant meilleur qu’il n’altère nullement la santé ni les forces, et que la douleur est insurmontable.
    Boishardy fit un geste de dégoût. Marcof haussa les épaules.
    – Nous n’avons pas le choix des moyens, dit-il ; il faut que cet homme vive et qu’il parle, qu’il parle promptement surtout.
    – Et vous croyez qu’il parlera ?
    – Vous allez voir par vous-même.
    Keinec rentrait, portant un réchaud de charbons enflammés et une plaque de tôle d’une petite dimension, surmontée d’une tige de fer qui lui servait de manche.
    – Boishardy, veuillez faire chauffer à blanc la plaque, dit tranquillement Marcof ; nous, pendant ce temps, nous préparerons le prisonnier.
    Le gentilhomme s’approcha du réchaud, activa, en soufflant dessus de toute la force de ses poumons, l’incandescence des combustibles, et présenta, en la tenant par le manche, la petite plaque de tôle aux charbons étincelants. Marcof et Keinec avaient délié les bras du prisonnier, et lui enlevèrent sa carmagnole d’abord, puis

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