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La Marquise de Pompadour

Titel: La Marquise de Pompadour Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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qui se trouvait dans le carrosse où Jeanne avait été poussée : c’était Louis XV, le roi de France en personne !…
    Voici, en effet, ce qui s’était passé :
    Berryer, on se le rappelle, après avoir décidé Noé Poisson et Crébillon à amener Jeanne chez la tireuse de cartes, après avoir combiné son plan avec Bernis et chargé ce dernier d’amener un carrosse à la porte de la Lebon, Berryer, le lendemain, s’était mis en quête du roi, et avait fini par le rejoindre le soir seulement.
    Louis XV avait emmené le lieutenant de police dans son cabinet et lui avait demandé :
    – Vous me dites, monsieur que vous avez à me parler de M me  d’Etioles ?…
    – Oui, Sire, répondit Berryer.
    Et jouant brutalement sa partie, décidé à tout risquer, il ajouta :
    – Votre Majesté me permet-elle de lui parler librement ?
    – Je vous l’ordonne.
    – En ce cas, Sire, je suis sûr de vous intéresser. Laissant donc toute circonlocution de côté, je dirai que, à la fête de l’Hôtel de Ville où je m’étais rendu pour protéger Votre Majesté selon le devoir de ma charge, je me suis aperçu de deux choses…
    Tout cynique et décidé qu’il était, Berryer hésita un instant…
    – Voyons les deux choses ! fit Louis XV en se jetant dans un fauteuil et en fouettant sa botte.
    – Je procéderai par ordre, reprit le lieutenant de police en jouant sur le sens de ce mot. La première chose, c’est qu’une femme aimait Votre Majesté…
    Louis XV se mit à rire.
    – Une seule ? fit-il ; c’est peu !
    – Oh ! mais celle-là, Sire, vous aime pour dix, pour vingt, pour cent ! Je l’ai étudiée de près. Je l’ai vue pâlir ou rougir, j’ai lu dans ses yeux. Et bientôt j’ai acquis la conviction intime, absolue, que cette femme vous appartenait de toute son âme !
    – Et c’est ?… interrogea Louis XV qui, pour dissimuler son émotion, bâilla un grand coup.
    – Sire, laissez-moi d’abord vous dire la deuxième chose que j’ai remarquée… seulement, j’oserai rappeler à Votre Majesté qu’elle m’a positivement ordonné de parler en toute franchise…
    – Et je vous réitère l’ordre, monsieur !
    – Eh bien, la deuxième chose, c’est que le roi est amoureux !… Ah ! Sire, voilà que vous vous fâchez déjà ! ajouta Berryer en voyant le roi froncer le sourcil. Je dis que le roi est amoureux au point de ne pas oser avouer son amour, et de le proclamer à la face de tous, comme il convient à un grand roi, maître absolu dans son royaume et dans sa ville… Maintenant, je n’ai plus qu’un mot à ajouter : c’est que le roi est justement amoureux de cette femme qui l’adore, et que cette femme s’appelle M me  d’Etioles…
    Le roi se leva, fit quelques pas dans son cabinet, puis revenant au lieutenant de police :
    – Eh bien, oui, Berryer… je l’aime… comme vous dites, comme un véritable écolier. Je sais qu’elle m’aime… ah ! par Dieu et le Diable, cela me soulage de le dire. Oui, c’est vrai ! J’ai son aveu… et…
    – Et le roi n’ose pas oser ! fit Berryer rayonnant de la confiance qui lui était témoignée. C’est bien ce que j’ai vu. Et alors, Sire, je me suis dit que, du moment que le roi n’osait pas, c’était le devoir de ses fidèles sujets en général et de son lieutenant de police en particulier de supprimer les obstacles…
    – Et ces obstacles, vous les avez supprimés ? demanda ardemment le roi. Il y a un mari…
    – Qui ne compte pas !… Sire, reprit rapidement Berryer, ce soir un carrosse doit emmener madame d’Etioles à Versailles…
    Louis XV jeta un léger cri.
    – J’ai tout préparé, continua Berryer, et tout est prêt. M me  d’Etioles doit se rendre ce soir dans une maison du carrefour Buci… on la fera monter dans le carrosse, qui prendra aussitôt le chemin de Versailles… il y aura un homme dans ce carrosse, et ce sera moi ! Quant au postillon, ce sera un des plus fervents serviteurs de Votre Majesté, M. de Bernis…
    – Ce soir ! fit machinalement Louis XV tout étourdi.
    – Ce soir, à dix heures, insista Berryer sans même se douter de ce qu’il y avait d’infâme dans le rôle qu’il jouait.
    Et en effet, tout bouillant d’une joie d’ambitieux –, la plus terrible joie qui existe, – du ton le plus naturel, il ajouta :
    – Sire, plaise à Votre Majesté de me dire où il faudra arrêter le carrosse qui contiendra M me  d’Etioles et

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