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La Marquise de Pompadour

Titel: La Marquise de Pompadour Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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raconter.
    Le chevalier était parti pour se rendre directement rue des Bons-Enfants. C’était chez lui un besoin, une envie d’enfant. Son plan était de traverser la rue, de se mettre dans les yeux la demeure de la jolie inconnue, puis de rentrer tranquillement dîner aux
Trois Dauphins,
où, retiré dans sa chambre, il aurait tout loisir pour rêver à la gracieuse apparition.
    Mais le chemin des amoureux, c’est souvent le chemin des écoliers.
    Une singulière émotion dont il ne fut pas maître s’empara du chevalier aux abords de la rue bénie : émotion mêlée de timidité, d’angoisse et de désirs contradictoires.
    Si bien qu’il ne s’aperçut pas qu’il faisait un détour assez considérable, et qu’au lieu d’entrer rue des Bons-Enfants, il se retrouva sur le port Saint-Nicolas, non loin du vieux Louvre.
    Alors, par les quais, il continua son chemin jusqu’au Pont-Neuf, tourna à gauche et alla rejoindre la rue Saint-Denis. Longtemps il marcha au hasard ; vers huit heures, il se retrouva rue Montmartre et entra pour dîner dans un cabaret au coin de la rue des Fossés-Montmartre. Ses tours et détours l’avaient donc en somme ramené comme par une attraction magnétique au point central de son exploration. En effet, il était à deux cents pas de la place des Victoires où venaient aboutir d’une part la rue des Fossés-Montmartre, et de l’autre la rue des Bons-Enfants ou presque.
    A neuf heures, ayant achevé son repas, l’esprit réchauffé par une bouteille de vieux bourgogne, le chevalier sortit du cabaret au moment où on le fermait.
    Si de rares passants se montraient encore sur la chaussée assez fréquentée de la rue Montmartre, par contre la solitude et l’obscurité régnaient sur la place des Victoires où se dressait encore le Louis XIV en plomb doré dont la Révolution devait faire des balles en 92.
    Toutes les rues avoisinantes, la rue du Reposoir, la rue de Vide-Gousset étaient également désertes, silencieuses et noires.
    Quelques minutes plus tard, d’Assas venait s’arrêter devant le portail de l’hôtel d’Argenson, au beau milieu de la rue, et, tournant le dos à la solennelle demeure, levait les yeux sur le petit hôtel Régence dont les balcons lui apparaissaient confusément dans l’ombre.
    – C’est là ! murmura-t-il.
    Il regardait avidement cette façade obscure où pas une lumière ne brillait aux fenêtres.
    Une indéfinissable émotion lui étreignait le cœur. Lentement, ses doigts montèrent jusqu’à ses lèvres et, du bout de ses doigts, il envoya un baiser devant lui, dans le vide…
    – Dors, balbutia-t-il, dors ton pur sommeil d’ange, ô chère inconnue qui, avec une si douce violence, t’es emparé de mon cœur entier ; dors, et puissent des rêves de bonheur agiter doucement leurs ailes sur ta couche de vierge… Oh ! si je pouvais seulement apercevoir l’ombre de l’un de tes gestes !… Oh ! si seulement une lumière venait illuminer ces pierres qui t’abritent !…
    Mais les ténèbres semblaient s’épaissir : l’une des lanternes qui éclairaient vaguement le bout de la rue s’éteignit brusquement.
    Alors une pénible impression de tristesse glaça le chevalier. Il lui sembla que la face de cette maison pleurait dans la nuit…
    Songes ! Illusions !… Il se secoua pour échapper à cette impression… mais elle ne fit que se fortifier… vraiment, un malheur planait sur le petit hôtel… et en prêtant l’oreille il eût juré qu’il venait d’entendre quelque chose comme un lointain sanglot… ou peut-être l’insaisissable harmonie d’une musique infiniment douloureuse que des doigts de mourante eussent arraché à un mystérieux clavecin…
    Le chevalier était haletant…
    – Non ! murmura-t-il tout à coup, ce n’est pas une chimère enfantée par mon cerveau !… On pleure ! On souffre dans cette maison !… Qui sait si ce n’est pas
elle
qui se lamente ainsi !… Oh !… Comment savoir ! Frapper à cette porte… à pareille heure !… c’est insensé !… Sous quel prétexte ?… Par le ciel ! dussé-je être ridicule ou inconvenant, il faut que je sache !…
    D’Assas allait s’élancer…
    A ce moment, quatre fenêtres du premier étage s’éclairèrent.
    Il demeura cloué sur place…
    Au même instant, derrière lui, un murmure de voix se fit entendre. Le chevalier se retourna d’une secousse comme s’il eût été mordu par quelque bête… et, dans le renfoncement

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