Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
La mémoire des flammes

La mémoire des flammes

Titel: La mémoire des flammes Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Armand Cabasson
Vom Netzwerk:
tout ce mal...
    Il fallait posséder une étonnante maîtrise de soi pour parvenir à raisonner aussi clair alors que votre monde venait de chavirer. Elle contre-attaqua aussitôt.
    — Vous parlez avec beaucoup d’assurance, monsieur. Mais prenez garde ! Je suis moins en prison que vous ! Dans trois jours au plus tard, les Alliés me feront sortir de cette cellule, tandis que vous, ils pourraient bien vous y enfermer pendant trente ans !
    L’idée de l’enfermement était insupportable à Margont, si bien que cette peur balaya ses pensées lancées en plein calcul, de la même manière qu’un coup de vent désorganise les cartes d’une réussite que l’on s’apprêtait à terminer brillamment.
    — Si j’étais vous, monsieur, j’emploierais mon énergie à effacer une partie de ma dette. Vous nous avez nui. Il est encore temps de me convaincre de plaider en votre faveur, lorsque vous passerez devant la justice du roi.
    « Ah, mais qui est en prison, elle ou moi ? » s’énerva intérieurement Margont. Catherines de Saltonges poursuivit ses assauts.
    — Il vous est encore possible de dire que l’on vous a obligé à accepter cette mission !
    — Le fait est que c’est vrai... ne put-il s’empêcher de commenter.
    — Peu importe que ce soit vrai, il faut que ce soit crédible ! Je témoignerai en votre faveur, je dirai que vous m’avez bien traitée. Quand on est victorieux, on est porté à la clémence. Mais n’allez point faire de zèle maintenant ! Ne me tourmentez pas avec vos questions ou vous serez traité comme un impérialiste ! Et là, vous risquez de le payer très cher !
    « Questions » ! Margont rebondit sur ce mot.
    — Mes questions ? Mais puisque je vous dis que j’ai toutes les réponses ! Je sais tout ! C’est l’inverse. C’est moi qui m’étonne de vos propos. Ne voulez-vous vraiment pas savoir ce qu’il est advenu de l’un de vos amis ? Je parle bien entendu de celui qui est si proche de vous. Vous m’avez compris, n’est-ce pas ?
    Elle rougit.
    — Je ne vois pas ce que vous voulez dire...
    — Je parle de votre amant, bien sûr, le père de cet enfant que vous n’avez pas pu garder...
    Les yeux de Catherine de Saltonges se noyèrent de larmes, ce qui l’empêcha de voir que Margont, lui, réprimait un reflux nauséeux. Il s’en voulait d’aller remuer ainsi la douleur de cette femme, de souiller son intimité. Mais il faisait de cette enquête une affaire personnelle. On avait failli l’assassiner, et Lefine aussi, à cause de lui. On essayait de lui voler son nom. Et lui qui avait si souvent lutté contre le crime, voilà qu’un assassin s’apprêtait à tuer en usurpant son identité !
    — Je comprends que vous ayez décidé qu’il valait mieux que cet enfant ne voie pas le jour... Quelle vie aurait-il eue ? Avec un père rongé par le feu...
    Elle le regardait comme s’il s’agissait d’une créature surnaturelle, un ange qui aurait eu accès à ses pensées... Et comme il ne pouvait être un ange de Dieu, c’était un ange du diable, un ange déchu, maléfique...
    Margont poursuivait.
    — Oui, ce feu qui brûle en lui jour et nuit, qui le consume de l’intérieur ; ce brasier qui a été allumé par la campagne de Russie, mais qui ne s’est jamais éteint. Même votre amour n’a pas réussi à venir à bout de ces flammes.
    S’il s’était agi d’un duel, elle aurait lâché son épée. Mais Margont devait poursuivre l’enchaînement qu’il avait initié. Son attaque composée n’était pas achevée, et tout à la fin viendrait le coup de pointe fatal... Elle murmura :
    — Comment savez-vous cela ? Il vous a parlé de Moscou ? Comment est-ce possible ? J’ai mis un an à tout découvrir et vous, vous êtes au courant ?
    Elle avait parlé d’une manière à peine audible.
    — Bien sûr, on peut le comprendre... continua Margont. Il a perdu un si grand nombre des siens...
    Cette phrase était issue des propres paroles de Catherine de Saltonges, que Margont se contentait de lui renvoyer. Celle-ci se trouvait dans un tel état qu’elle ne savait même plus faire la différence entre ses pensées et les propos de Margont...
    Elle s’assit par terre de peur de tomber. Elle tapa du poing les pavés, de toutes ses forces, et la douleur submergea ses pensées. Elle se réfugiait dans la souffrance physique. Margont lui saisit le poignet pour l’obliger à cesser.
    — Ce plan est suicidaire, vous le savez

Weitere Kostenlose Bücher