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La mort du Roi Arthur

La mort du Roi Arthur

Titel: La mort du Roi Arthur Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean Markale
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des dispositions en conséquence. Qu’en dis-tu, Gauvain ? Veuille me conseiller. »
    Gauvain promit au roi d’y réfléchir et, toute la journée, il demeura pensif et tourmenté. Il savait bien que le roi Arthur avait raison et qu’à prolonger cette guerre, ni lui-même ni les gens du roi n’en tireraient honneur ou profit. Après avoir longuement médité, il appela l’un de ses écuyers et lui dit : « Va-t’en en la cité de Bénoïc et dis à Lancelot que s’il est assez hardi pour soutenir qu’il n’a pas tué mon frère Gahériet par traîtrise, je suis prêt à prouver contre lui le contraire. S’il relève mon défi et l’emporte sur moi, je m’engage à convaincre mon oncle de s’en retourner avec toute son armée et de ne demander plus jamais raison aux hommes de Gaunes et de Bénoïc du différend qui nous a opposés. Mais si c’est moi qui l’emporte sur lui en champ clos, je n’insisterai pas davantage : la guerre prendra fin, à condition que les rois Bohort et Lionel déclarent tenir leur terre du roi Arthur. S’ils refusent, nous ne partirons d’ici qu’ils n’aient été honnis ou tués. » L’écuyer promit de se rendre en la cité de Bénoïc le lendemain matin, à la première heure.
    Ce qu’il fit, en effet. Et là, il attendit que Lancelot et les deux rois se fussent levés et eussent entendu la messe puis, revenus dans la grande salle, se fussent assis aux places d’honneur. Alors, il aborda Lancelot et lui dit : « Seigneur, le chevalier Gauvain, qui m’envoie vers toi, me charge de te mander qu’au cas où tes gens et les nôtres s’affronteraient encore comme ils l’ont déjà fait, on déplorerait immanquablement de grosses pertes de part et d’autre. Or, cela, il veut absolument l’éviter. » Et, sur ce, il transmit mot pour mot la proposition de Gauvain.
    En entendant ces paroles, Lancelot s’était rembruni. « Ami, répondit-il, je n’ai jamais désiré me battre contre Gauvain qui m’a été un compagnon très cher depuis que je suis chevalier. Mais puisqu’il m’accuse de traîtrise, je me déshonorerais en me dérobant. Dis-lui donc de ma part que, s’il obtient du roi l’engagement ferme de mettre fin à la guerre après notre combat, il me trouvera sous les armes au jour qu’il voudra. Dis-lui aussi que je ne le crains pas, et que seule ma grande affection pour lui m’a toujours fait répugner à l’affronter corps à corps. » L’écuyer promit de transmettre fidèlement ce message et s’en fut.
    Alors, Bohort dit à Lancelot : « Assurément, aucun homme sage, ainsi que devrait l’être Gauvain, ne se serait permis si folle accusation, car tout le monde sait pertinemment que tu as tué Gahériet en combat loyal et devant témoins. – Sais-tu pourquoi il agit ainsi ? intervint Lionel. Parce que la perte de ses frères lui fait préférer la mort à la vie. – Je crains, soupira Lancelot, qu’il ne soit plus possible d’éviter ce combat. Ce qu’il en résultera, je l’ignore, mais je puis affirmer une chose : si je l’emporte, je ne consentirai jamais à tuer Gauvain. Il est l’un des hommes que j’ai le mieux aimés de tous les compagnons du roi. Dieu m’est témoin que je ne me résous qu’avec la plus grande peine à pareille épreuve. »
    Cependant, l’écuyer avait regagné le camp d’Arthur et répété les paroles de Lancelot à Gauvain. Aussitôt, celui-ci s’en alla trouver Arthur et, s’agenouillant devant lui : « Mon oncle, dit-il, je te supplie de m’accorder une faveur. » Le roi le prit par la main, le releva et lui accorda ce qu’il demandait sans même en connaître l’objet. Gauvain le remercia et lui dit : « Sais-tu ce que tu m’as accordé ? C’est de promettre à Lancelot que, s’il peut me vaincre en champ clos, tu lèveras le siège et retourneras en l’île de Bretagne sans jamais plus lui faire la guerre. »
    Une grande angoisse saisit le roi. « Gauvain, dit-il, es-tu vraiment décidé à te battre contre Lancelot ? – Plus que jamais, répondit Gauvain, et l’un de nous y trouvera la mort et le déshonneur. – Mon neveu, reprit Arthur, je suis affligé de ta décision. J’aurais préféré te voir affronter n’importe quel chevalier plutôt que lui, car il est, nous le savons bien, le plus estimé et le plus accompli qui soit. Ton sort m’alarme au plus haut point, et j’aimerais mieux perdre la meilleure de mes cités que d’avoir abordé ce sujet.

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