La mythologie : Ses dieux, ses héros, ses légendes
prospérité, Cadmos et
Harmonie, dans leur grand âge, connurent le chagrin par leurs enfants et leurs
petits-enfants. Après la mort de Penthée, ils s’enfuirent de Thèbes comme s’ils
tentaient d’échapper à leur infortune. Mais l’infortune les suivit. Quand ils
atteignirent la lointaine Illyrie, les dieux les changèrent en serpents, non
par châtiment, car ils n’avaient commis aucun mal. Leur sort fournit la preuve
que la souffrance n’est pas nécessairement la punition du mal ; l’innocent
connaît l’épreuve tout autant que le coupable.
De toute cette race infortunée, nul n’était plus innocent
qu’Œdipe, F arrière-arrière-petit-fils de Cadmos, et aucun ne souffrit
davantage.
Œdipe
J’ai emprunté à la tragédie du même nom, due à Sophocle,
la totalité de ce récit – à l’exception de l’énigme du Sphinx à laquelle ce
poète fait à peine allusion. Elle est donnée par maint écrivain et presque
toujours dans la même forme.
Laïos, Roi de Thèbes, était le troisième descendant de
Cadmos. Il épousa une parente éloignée, Jocaste. Sous leur règne, l’oracle de
Delphes commença à jouer un rôle prépondérant dans les aventures de cette
famille.
Apollon était le dieu de la Vérité. Tout ce que prédisait la
prêtresse de Delphes se réalisait infailliblement. Tenter de faire avorter une
prophétie était tout aussi futile que s’opposer aux décrets du destin.
Néanmoins, lorsque l’oracle avertit Laïos qu’il mourrait de la main de son
fils, il décida qu’il n’en serait rien. Quand l’enfant naquit, il lui lia les
pieds puis l’exposa sur une montagne isolée où, semblait-il, il ne tarderait
pas à mourir. La crainte le quitta ; il se sentit assuré de pouvoir, sur
ce point tout au moins, prédire l’avenir mieux que le dieu lui-même. Il n’eut
jamais la preuve de sa folie ; il fut tué, certes, mais il prit pour un
étranger l’homme qui l’assaillait. Jamais il ne sut que sa mort prouvait une
fois de plus la véracité d’Apollon.
Quand il mourut, il avait depuis longtemps quitté son pays
et bien des années s’étaient écoulées depuis que l’enfant avait été abandonné
sur la montagne. On racontait que des voleurs l’avaient tué ainsi que tous ceux
qui le gardaient, tous sauf un seul, qui rapporta la nouvelle. L’affaire ne fut
jamais clairement élucidée car Thèbes était alors aux abois. Toute la contrée
se voyait menacée par un monstre terrifiant, le Sphinx, qui avait le corps d’un
lion ailé mais la tête et la poitrine d’une femme. Il attendait les voyageurs
qui empruntaient les routes menant à la ville, il se saisissait d’eux et leur
posait une énigme, promettant de relâcher ceux qui réussiraient à la résoudre.
Personne n’y parvenait et l’horrible créature dévorait un homme après l’autre,
tant et si bien que la ville fut bientôt en état de siège. On ferma les sept
portes qui étaient l’orgueil de Thèbes et la famine menaça bientôt la cité.
Les choses en étaient là lorsqu’un étranger pénétra dans ce
pays affligé, un homme de grand courage et doué d’une intelligence
remarquable : il se nommait Œdipe. Il avait quitté Corinthe, sa patrie, où
il passait pour le fils du Roi Polybe, et la cause de cet exil volontaire était
un autre oracle delphien. En effet, Apollon avait déclaré que cet homme était
destiné à tuer son père. Tout comme Laïos, Œdipe crut pouvoir faire mentir
l’oracle ; il décida de ne jamais revoir Polybe. Ses vagabondages
solitaires l’amenèrent non loin de Thèbes et il entendit parler de ce qui s’y
passait. Sans foyer, sans amis, il tenait la vie pour peu de chose ; il
résolut donc de rencontrer le Sphinx et de tenter de résoudre l’énigme. « Quel
est l’animal qui a quatre pieds le matin, deux à midi, et trois le
soir ? » lui demanda le Sphinx. « L’homme », répondit
Œdipe. « Dans son enfance, il se traîne sur les mains et les pieds, il se
tient debout dans son âge adulte, et dans sa vieillesse, il s’aide d’une
canne. » C’était la bonne réponse. De façon assez inexplicable mais fort
heureuse, le Sphinx, outré de se voir deviné, se tua. Les Thébains étaient
sauvés. Œdipe retrouva tout ce qu’il avait perdu et bien davantage ; les
citoyens reconnaissants le prirent pour Roi et il épousa la veuve du Roi
défunt, Jocaste. Pendant bien des années, ils vécurent heureux, et pour ce
cas-ci tout au moins,
Weitere Kostenlose Bücher