La mythologie : Ses dieux, ses héros, ses légendes
pour moi. Mais donne-moi tes larmes afin que
je ne descende pas sans être pleuré dans le royaume de l’ombre » Dans son
sommeil, Alcyone gémit et tendit les bras pour l’étreindre. Elle cria :
« Attends-moi. J’irai avec toi », et son cri la réveilla. Elle avait
maintenant la conviction que son mari était mort ; c’était bien lui qu’elle
avait vu, ce n’était pas un rêve. « Il paraissait si pitoyable », se
dit-elle. « Il est mort et bientôt je mourrai moi aussi. Comment
pourrais-je vivre ici alors que son pauvre corps est ballotté par les flots ?
Jamais je ne t’abandonnerai, mon cher époux ; je vais essayer de ne plus
vivre. »
Aux premières lueurs de l’aube, elle se rendit sur la grève,
sur le promontoire où elle s’était tenue quand il était parti. Et tandis qu’elle
scrutait la mer, elle vit quelque chose qui flottait au loin. La marée montait
et la chose approchait de plus en plus, et elle savait maintenant que c’était
un cadavre. Le cœur rempli de pitié et d’horreur, elle le regardait dériver
lentement vers elle. Il était maintenant près du promontoire, presque tout près
d’elle. C’était lui, Céyx, son époux. Elle courut, se jeta dans l’eau, criant : « Mon époux, mon amour ! »
Et alors, ô merveille, au lieu de s’abîmer dans les flots voici qu’elle les
survolait. Elle avait des ailes, son corps était recouvert de plumes. Elle
était transformée en oiseau. Les dieux étaient bons et bienveillants. Ils
firent de même pour Céyx. Comme elle volait vers le corps, il disparut et, changé
en oiseau comme elle, la rejoignit. Mais leur amour n’avait pas varié. On les
voit toujours ensemble, volant ou voguant sur les vagues.
Il y a sept jours, chaque année, pendant lesquels la mer se
fait tranquille et calme ; aucun souffle de vent n’agite les eaux. Alcyone
alors couve son nid qui flotte sur la mer. Le charme est rompu quand les
oisillons éclosent ; mais chaque hiver, ces jours de paix parfaite
reviennent et on les appellent les jours d’Alcyone.
Quand les oiseaux du calme couvent sur la vague
ensorcelée.
Pygmalion et Galatée
Seul Ovide raconte cette légende et c’est pourquoi la
déesse de l’Amour y est appelée Vénus. C’est un excellent exemple de la manière
dont Ovide présente un mythe.
À Chypre un jeune sculpteur de talent, nommé Pygmalion, était
résolument misogyne :
Haïssant les défauts dont la nature avait comblé les
femmes,
il avait décidé de ne jamais se marier. Son art lui
suffisait, se disait-il. Soit qu’il ne pût aussi facilement chasser de son
esprit que de sa vie l’objet de sa désapprobation, soit qu’il ait décidé, en
modelant une femme parfaite, de démontrer aux hommes les déficiences d’une
espèce qu’il leur fallait bien supporter, toujours est-il que la statue à
laquelle il consacrait tout son génie représentait une femme.
Avec un soin infini, il passa et repassa longtemps son
ciseau sur la statue d’ivoire qui devint enfin une œuvre d’art exquise.
Mais il n’était pas satisfait. Jour après jour, il y
travaillait et sous ses doigts habiles elle devenait de plus en plus belle. La
femme n’était pas née, la statue n’avait jamais été créée qui auraient pu
rivaliser avec celle-là. Quand le jour vint où il n’y eut plus rien à ajouter à
ses perfections, son créateur connut un sort étrange : il s’éprit
profondément, passionnément de la forme née de ses doigts. En manière d’explication,
il convient de préciser que la statue ne ressemblait pas à une statue ; personne
ne l’aurait crue d’ivoire ou de marbre mais bien de chair humaine figée pour un
instant seulement dans l’immobilité. Car tel était le merveilleux pouvoir de ce
jeune homme dédaigneux ; il avait atteint l’accomplissement suprême de l’art,
l’art de dissimuler l’art.
Mais dès ce moment, le sexe qu’il avait tant méprisé prit sa
revanche. Nul amoureux transi d’une vierge vivante ne connut jamais une peine
aussi désespérée que Pygmalion. Il posait ses lèvres sur ces lèvres attirantes
– elles ne pouvaient lui rendre son baiser ; il caressait les mains, le visage
– ils restaient insensibles ; il la prenait dans ses bras – et elle n’était
toujours qu’une forme passive et froide. Pendant quelque temps, il tenta de
feindre, comme font les enfants avec leurs jouets. Il l’habillait de vêtements
somptueux, faisant chatoyer une
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