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La nièce de Hitler

La nièce de Hitler

Titel: La nièce de Hitler Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ron Hansen
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naturellement.
    — Pourquoi ?
    Emil sembla sincèrement décontenancé, puis il
la regarda en souriant, dans l’attente d’un indice confirmant qu’elle
plaisantait.
    — Parce que vous, vous ne faites pas tout
ce qu’il dit ?
    Elle sentit un petit pincement de culpabilité,
comme si c’était un mensonge, mais elle affirma néanmoins :
    — Non. Je fais ce qui me plaît.
    Emil considéra Geli, qui semblait incarner la
rébellion et la volonté personnifiée, ainsi que tout ce qu’il avait soustrait
de sa vie.
    — Après tout, c’est peut-être ce qu’il
veut, justement, finit-il par dire.
    Ils étaient dans le
salon de la pension Klein. La maisonnée ronflait légèrement dans le silence, et
les flocons de la première neige de l’hiver frappaient doucement contre les
carreaux. Le chewing-gum était la dernière marotte venue d’Amérique, et Emil
lui offrit une tablette de Spearmint Wrigley. Citant la réclame des affiches, elle
dit :
    — Agréable et rafraîchissant.
    Emil fit un gros effort pour se souvenir de la
suite.
    — Son arôme dure longtemps.
    Elle lui tapota le genou pour le féliciter.
    Emil se rapprocha d’elle sur le sofa.
    — Je peux vous embrasser ?
    — Je vous en prie, répondit Geli.
    Au début, ils ne
dirent pas à Hitler qu’ils se fréquentaient, mais pour un homme égoïste, froid
et insensible ce dernier n’était pas dépourvu d’intuition ; au bout de
quelques jours il parut avoir remarqué que leurs regards avaient une nouvelle
signification, que Geli s’attardait un peu plus longtemps que nécessaire dans
la voiture comme si Emil était son air, qu’elle semblait trouver son port d’attache
non loin de lui quand ils étaient dans la même pièce. Alors il se mit à parler
de la hiérarchie nazie et de tous les célibataires qu’elle comptait.
    — Nous avons besoin d’épouses, disait-il
à Emil. De familles.
    Et tandis qu’Emil conduisait, Hitler, sur le
siège du passager, arborant sa casquette d’aviateur, mettait sa nièce au
supplice en citant toutes les jeunes filles auxquelles Emil devrait songer. Fräulein
Christa Schröder ? Une beauté. Comment s’appelait cette contralto du
théâtre Cuvilliés ? Fräulein Marika Kleist ? Et cette fille du salon
de thé du Carlton ? Fräulein Meiser ? Leni Meissner ?
    — Leni Meiser, je crois.
    — Et ?
    Emil leur trouvait à toutes des défauts.
    Hitler soupirait, agacé. Il se tournait vers
sa nièce, assise à l’arrière.
    — Tu as une idée, Geli ?
    — Ça va être difficile, il est si laid !
    — Nous continuerons à chercher. Il existe
sûrement quelqu’un susceptible de vous plaire, Herr Maurice. Avec qui vous
pourriez faire des petits aryens. Nous irons à la mairie pour la cérémonie. Nous
demanderons à Franz Gürntner de vous marier. Et nous serons tous très bons amis.
Nous irons manger des spaghettis chez vous tous les soirs.
    — Elle ne sait pas cuisiner, mon Führer, sourit
Emil. Les femmes qui me plaisent ne savent pas cuisiner.
    — Mais mon Angelika, par exemple ? Elle
cuisine, elle fait le ménage, elle coud ses vêtements ! Et belle, avec ça !
Pourquoi vous ne trouveriez pas une femme comme elle ?
    Emil chercha Geli dans le rétroviseur. Elle
regarda par la fenêtre.
    Hitler replia ses notes et posa ses mains sur
ses genoux.
    — En ce qui me concerne, j’ai surmonté
tout besoin des femmes. Mais je trouve qu’il n’y a rien de plus sacré que la
flamme de la vie quand elle est ranimée par un amour pur. Nous devons nous
souvenir, cependant, que la flamme ne brûle que lorsqu’elle est allumée par un
homme et une femme qui se sont gardés purs dans leur corps et dans leur âme. Et
quand leur amour est magnifié par la présence d’enfants, les péchés de
dépravation qui ont détruit notre nation hurlent leur échec, et ce n’est que
justice.
    — Et les péchés de dépravation, c’est… ?
s’enquit Geli.
    — Oh, ça, tu n’as pas à le savoir, répondit
Hitler.
    Sans que rien ne
soit dit, Emil et Geli commencèrent à se tenir la main en présence des amis d’Hitler,
et un soir, après le cinéma, ils se risquèrent à marcher enlacés jusqu’à sa Stammtisch du café Heck. Rudolf et Ilse Hess étaient là, ainsi que Putzi et Helena
Hanfstaengl, Heinrich Hoffmann et Kristina, une de ses modèles. Elle portait un
insigne nazi. Les messieurs étaient tous en cravate blanche et queue-de-pie, les
dames en fourreau et diadème. Le groupe

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