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La nièce de Hitler

La nièce de Hitler

Titel: La nièce de Hitler Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ron Hansen
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morse, ses cheveux rares et grisonnants, son regard oblique et dubitatif
derrière des lunettes sans monture, il ressemblait bien plus à son père, du
moins aux photographies que Geli en avait vues, qu’à son demi-frère Adolf. Des
qualités inquiétantes qu’Adolf avait réussi à tourner en sa faveur, Aloïs n’en
possédait aucune ; il ne paraissait que vulgaire, égoïste, pompeux et
sournois, comme un garçon de café compassé qui vole dans la caisse, ou un
fonctionnaire qui s’arrange avec les règlements en échange d’un pot-de-vin. Ils
prirent tous trois un café et des sandwiches au coin du feu, et Aloïs semblait
avide d’avoir des nouvelles d’Adolf, car il était persuadé que leurs destins
étaient liés, et il estimait que c’était son tour « à l’abreuvoir », comme
il disait. « Et qui sait ? On pourrait même devenir amis, lorsqu’il
sera revenu de cette affaire de bigamie et de sa peur de voir sa bonne
réputation salie. »
    Angela en eut vite assez d’Aloïs et de son
manque d’intérêt trop flagrant pour Paula ou les Raubal, et elle lui dit qu’elles
allaient visiter le musée d’Histoire de l’Allemagne. Aloïs les laissa payer l’addition,
en leur promettant de leur offrir un bon dîner la prochaine fois.
    — Eh bien, voilà une bonne chose de faite,
dit Geli en sortant sur la Wittenbergplatz.
    — Ça t’ennuierait de rentrer à l’hôtel
maintenant ? demanda Angela, qui approchait des quarante-quatre ans et
avait pris quinze kilos depuis la naissance de Geli. Je ne sens plus mes pieds.
    Lorsqu’elles arrivèrent dans leur chambre, il
y avait un message d’Emil Maurice disant « Vous me manquez beaucoup »,
et un autre du Doktor Goebbels qui prévenait d’un changement de programme, car
le Führer, qu’elles n’avaient pas encore vu, dînerait avec Edwin et Helene
Bechstein, l’actrice de cinéma Dorothea Wieck, Herr Reinhold Muchow, le
responsable de l’organisation du Gau de Berlin, et sa femme. Serait-il
impertinent de leur offrir son unique compagnie pour la soirée ?
    Angela avait eu suffisamment de distractions
pour la journée, aussi permit-elle à Geli de sortir avec lui, à condition que
Julius Schaub les accompagne.
    — Oh, maman !
    Angela leva la main pour couper court à toute
discussion.
    — C’est la volonté d’Adolf, dit-elle. Et
d’ailleurs, moi aussi, à Vienne, j’ai été jeune.
    Devant le Gasthof Ascanischer, un Julius
Schaub toujours aussi lugubre actionnait le klaxon d’une voiture inconnue, à l’avant
de laquelle le Doktor Goebbels était assis, vêtu d’un costume croisé destiné à
l’étoffer. Le Doktor, comme il s’appelait lui-même, s’installa gaiement à l’arrière
avec elle et garda une distance prophylactique pendant tout le trajet jusqu’au
quartier chic de Charlottenburg, l’abreuvant de paroles vaniteuses à propos de
son doctorat de l’université de Heidelberg sur le drame romantique, comme si
elle n’était sortie que pour pouvoir discuter de l’auteur dramatique Wilhelm
von Schültz.
    Ils se rendirent d’abord dans un restaurant
bondé où le chef tyrolien, nazi lui aussi, insista pour leur faire goûter ses
huîtres de Colchester et son Adlon, un magret de canard laqué au miel. Puis
le Doktor voulut que Schaub les emmène dans un night-club où ils burent la spécialité
berlinoise, Weiße mit Schuss, de la bière blanche avec un trait de jus
de framboise, et regardèrent une Negerin américaine chanter Madiana et La Petite Tonkinoise dans le plus simple appareil.
    — Toutes les femmes m’excitent jusqu’à la
moelle, lui confia le Doktor Goebbels. C’est horrible. Comme un loup affamé, je
rôde autour d’elle en quête de satisfaction. Même en pleine conversation dans
un dîner élégant, je me surprends à évaluer en imagination les attributs des
femmes présentes, ou à me demander comment serait la femme ou la fille de mon
hôte, nue dans mon lit.
    — Et dire que vous devez me supporter à
nouveau !
    Il sourit.
    — Et pourtant, je suis timide, comme un
enfant. J’ai peur d’être rejeté. Je ne me comprends pas.
    — Pourquoi ne vous mariez-vous pas ?
    — Pour m’embourgeoiser ? Pour me
pendre au bout de huit jours ?
    Le Doktor Goebbels fit signe à une vendeuse de
cigarettes, acheta un paquet d’Aristokrats, en alluma deux avec la flamme d’une
allumette tenue dans le creux de sa main, et en planta une dans la bouche de
Geli dans un geste vaguement

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