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La Papesse Jeanne

La Papesse Jeanne

Titel: La Papesse Jeanne Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Donna Cross
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toises.
    — Gerold !
hurla-t-elle. Où es-tu ?
    Sauvage et
indomptable comme le vent qui le guidait, le feu changea de direction, faisant
tomber une pluie de braises sur le toit de bardeaux, déjà sec comme l’amadou.
Un instant plus tard, le bâtiment entier s’embrasa.
    Jeanne sentit ses
cheveux se hérisser sur sa nuque. Les flammes dardaient vers elle leurs langues
brûlantes.
    — Gerold !
s’écria-t-elle encore, reculant d’un pas.
     
     
    Gerold s’était
couché fort tard, après avoir minutieusement étudié ses plans. Quand il avait
enfin soufflé sa chandelle, il était tellement fourbu qu’il avait sombré
sur-le-champ dans un sommeil sans rêves.
    Il fut réveillé
par l’odeur âcre de la fumée. Intrigué, il se leva. Sa première inspiration lui
brûla les poumons avec une telle force qu’il tomba à genoux en hoquetant. Un
incendie, se dit-il. Mais d’où vient-il ? L’épaisse fumée l’empêchait
de voir à dix pas, quelle que fût la direction.
    Des cris d’enfants
s’élevèrent tout près. Gerold rampa dans leur direction. Deux visages
épouvantés vinrent à sa rencontre dans les ténèbres  – un garçon et une
fillette, âgés de quatre ou cinq ans. Ils s’accrochèrent à lui en pleurant à
chaudes larmes.
    — Tout ira
bien, leur dit-il avec une assurance qu’il était loin d’éprouver. Nous serons
bientôt tirés d’affaire. Pensez-vous être capables de tenir à cheval sur mon
dos ?
    Les yeux
écarquillés, les gamins hochèrent la tête.
    — Bien.
Montez, et accrochez-vous. Nous partons à cheval.
    Il aida d’abord
la fillette à se mettre à califourchon sur son dos, puis le garçon, et s’ébranla
à quatre pattes, soufflant sous le poids de son vivant fardeau. La fumée était
de plus en plus épaisse. À force d’entendre les enfants tousser et hoqueter, Gerold
fut saisi d’une peur sourde. La plupart des victimes d’incendie mouraient
asphyxiées, sans même avoir été effleurées par les flammes.
    Il constata tout
à coup qu’il avait perdu ses repères. Ses yeux fouillèrent en vain l’obscurité :
il était impossible de distinguer la porte dans la fumée opaque.
    — Gerold !
hurla une voix quelque part dans les ténèbres.
    La tête au ras du
sol pour trouver un filet d’air, il rampa vers elle à l’aveuglette.
     
     
    Devant les murs
de Saint-Pierre, les rescapés livraient aux flammes une féroce bataille. Une
foule hétéroclite s’était peu à peu rassemblée pour défendre la basilique. On
trouvait là des moines en robe noire du monastère de Saint-Jean voisin ;
leurs frères encapuchonnés de l’abbaye grecque de Saint-Cyrille ; des
diacres, des prêtres, des enfants de chœur ; des filles de joie et des
mendiants ; des hommes, des femmes, des enfants de toutes les colonies du
Borgo
             — Saxons,
Lombards, Anglais, Frisons et Francs. Hélas, les efforts de ces groupes
disparates, déployés dans un manque total de coordination, étaient pour une
bonne part inefficaces. Dans un chaos indescriptible, on se disputait les
récipients permettant d’aller puiser de l’eau aux citernes et puits voisins.
Une fontaine était cernée par une multitude grondante, tandis qu’une autre
semblait entièrement oubliée. Vociférant dans une stupéfiante variété de
langues, les gens se bousculaient pour remplir leurs seaux. Les jarres se
heurtaient, se brisaient, répandaient au sol leur précieux liquide. Dans la
confusion ambiante, la poulie d’un puits fut brisée. Ceux qui voulaient
continuer à en tirer de l’eau étaient obligés de descendre dans ses profondeurs
 – procédé si pénible et si lent qu’il fut bientôt abandonné.
    — Au fleuve !
Au fleuve ! crièrent des voix.
    Et une foule
hurlante descendit vers le Tibre. Dans leur précipitation, beaucoup partirent
les mains vides, pour s’apercevoir à leur arrivée sur la berge qu’ils n’avaient
rien pour rapporter de l’eau. D’autres s’embarrassaient de jarres énormes qui,
une fois pleines, étaient trop lourdes pour leurs forces. A mi-pente, ils les
vidaient à demi, pleurant de rage et de frustration.
    Au milieu de ce
chaos, Léon restait planté devant les portes de Saint-Pierre, aussi solide que
les moellons de la glorieuse basilique. Sa présence animait les cœurs. Aussi
longtemps que le pape resterait au milieu du peuple, l’espoir demeurerait.
Aussi continua-t-on de combattre les flammes qui s’avançaient comme une

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