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La Papesse Jeanne

La Papesse Jeanne

Titel: La Papesse Jeanne Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Donna Cross
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choisit une monture à son tour et partit au trot.
Bien qu’il fût piètre cavalier, sa place était au côté du pape. Léon avait sans
nul doute pris une décision imprudente, mais il était de son devoir de l’accompagner.
    Le cortège se mit
au galop. La lueur des torches caressait follement les murs, et les ombres des
cavaliers se poursuivaient mutuellement dans les ruelles obscures, tels des
spectres saisis de démence. À l’approche du Borgo, l’âcre puanteur de la fumée
leur envahit les narines, et un monstrueux grondement s’éleva, semblable au
rugissement de mille bêtes fauves. Au détour d’une rue, le brasier leur
apparut.
    Ils se crurent
précipités dans les profondeurs de l’enfer. Le quartier entier brûlait,
enveloppé d’un ondulant suaire de feu. Dans un halo rougeâtre, les bâtiments de
bois se tordaient sous la morsure des flammes. De-ci de-là, des ombres humaines
couraient en tous sens comme des âmes damnées.
    Les chevaux
hennirent, renâclèrent. Un prêtre surgi de la fumée courut vers le groupe de
cavaliers, le visage maculé de sueur et de suie.
    — Votre
Sainteté ! Loué soit le Seigneur, vous voici !
    Jeanne sut
aussitôt, à son accent et à sa mise, qu’il était franc.
    — Est-ce
grave ? demanda brusquement Léon.
    — C’est
effroyable, rétorqua le prêtre, l’Hadrianum est détruit, de même que l’hospice
de Saint-Pérégrin. Les colonies étrangères sont parties en fumée  – la
Schola Saxonum n’existe plus, comme du reste son église. Presque tous les
bâtiments de la Schola Francorum sont en flammes. C’est un miracle si j’en suis
sorti vivant.
    — As-tu vu
Gerold ? interrogea Jeanne.
    Le prêtre secoua
la tête.
    — Il dormait
à l’étage, avec les maçons. Je doute qu’un seul d’entre eux ait réussi à s’échapper.
La fumée et le feu se sont répandus trop vite.
    — Et les
survivants ? interrogea Léon. Où sont-ils ?
    — La plupart
se sont rassemblés à Saint-Pierre. Mais l’incendie progresse partout. Si on ne
l’arrête pas, la basilique elle-même sera bientôt la proie des flammes !
    Léon lui tendit
une main.
    — Monte en
croupe. Nous nous y rendons de ce pas.
    Un instant plus
tard, le cortège de cavaliers repartit en direction de Saint-Pierre.
    Jeanne ne suivit
pas le mouvement. Une idée l’obsédait : retrouver Gerold.
    La ligne de feu
se dressait, infranchissable, devant elle. Elle la longea jusqu’à déboucher sur
un carrefour de rues calcinées, où tout était en ruine. Les flammes avaient
déjà fait leur office. Elle s’engagea dans celle qui menait à la Schola
Francorum.
    Des foyers épars
crépitaient toujours de part et d’autre, et la fumée allait s’épaississant.
Malgré la peur qui lui serrait le ventre, Jeanne s’exhorta à aller de l’avant.
Plusieurs fois, son cheval se cabra. Elle lui talonna les flancs, cria, frappa,
et il finit par repartir. Ils traversèrent un paysage d’apocalypse  – arbres
ratatinés, squelettes de maisons, corps noircis de malheureux rattrapés dans
leur fuite. Aucun être vivant ne pouvait avoir survécu à un tel holocauste.
    Tout à coup, les
contours incertains d’un édifice surgirent devant elle. La Schola Francorum !
Si l’église et les bâtiments annexes n’étaient plus qu’un monceau de cendres,
la résidence principale, par miracle, tenait encore debout.
    Un regain d’espoir
accéléra les battements de son cœur. Gerold avait peut-être survécu. Peut-être
était-il encore à l’intérieur, blessé et attendant d’être secouru.
    Son cheval s’arrêta
net et refusa de faire un pas de plus. Elle l’aiguillonna. Il se cabra
sauvagement et l’éjecta de sa selle. Dès qu’il fut débarrassé de sa cavalière,
il s’enfuit au galop.
    Elle resta un
moment au sol, à demi assommée. Un cadavre humain gisait près d’elle, noir et
luisant comme l’obsidienne, le dos tordu en un horrible spasme d’agonie. Avec
un haut-le- cœur, elle se leva, courut vers la schola. Elle devait coûte que
coûte retrouver Gerold. Rien d’autre ne comptait.
    La résidence
était encerclée de brandons fumants. Ils se déposaient sur le sol, sur sa robe,
dans ses cheveux, flottaient dans l’air en un suffocant nuage. Les charbons
brûlants mordaient ses pieds nus. Mais il était bien trop tard pour regretter
de ne pas avoir chaussé ses sandales.

Les portes de la
schola se découpèrent juste devant elle, à quelques

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