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La Papesse Jeanne

La Papesse Jeanne

Titel: La Papesse Jeanne Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Donna Cross
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mortel.
    Un long moment s’écoula.
Derrière eux, le premier char venait d’atteindre la berge opposée, sur laquelle
il s’éleva sans trop de peine. Jeanne ne le remarqua pas. Ses yeux étaient
rivés sur l’endroit où Gerold avait disparu.
    La peur lui fit
venir la sueur au front. Les rênes glissèrent de sa main. Sentant son trouble,
la jument baie fit un écart. Luc renversa la tête en arrière et hurla.
    Jeanne pria en
silence.
    Le temps passait.
    C’était trop
long. Il allait se noyer.
    Elle sauta à bas
de sa selle et s’immergea dans l’eau glacée. Elle ne savait pas nager, mais
cette pensée ne l’arrêta pas un instant. Elle pataugea vers le trou d’eau. Luc
chercha à lui entraver le passage en bondissant devant elle, mais elle le
contourna. Une seule chose comptait : retrouver Gerold, le hisser à la
surface, et le ramener à la vie.
    Elle n’était plus
qu’à un pas quand Gerold émergea dans une gerbe d’éclaboussures. Il inspira
bruyamment.
    — Gerold !
s’écria Jeanne, folle de joie.
    Il lui adressa un
signe de tête. Puis il inspira une longue goulée d’air, prêt à replonger.
    — Regardez !
s’écria le muletier, montrant du doigt un point situé en aval.
    Une sorte de
corolle bleue venait d’apparaître à la surface des flots et dérivait doucement
vers la berge opposée.
    La robe de Berthe
était bleue.
    Les cavaliers se
remirent en selle et partirent au galop. Entre deux eaux, prise dans les
branches et les débris accumulés au bord de la rivière, Berthe flottait sur le
dos, bras et jambes écartés. Ses traits immobiles étaient figés en une affreuse
expression d’effroi.
    — Repêchez-la,
ordonna Gerold d’un ton sec. Nous allons l’emmener à l’église de Prüm pour lui
donner des funérailles décentes.
    Incapable de
détourner son regard de la morte, Jeanne se mit à trembler de tous ses membres.
Berthe venait soudain de lui rappeler Matthieu, son frère mort  – même
peau grisâtre, mêmes yeux mi-clos, même bouche affaissée.
    Les bras de
Gerold l’enserrèrent tout à coup. D’une main, il la força à tourner la tête,
puis à poser le front contre son épaule. Elle ferma les yeux et s’abandonna.
Deux hommes mirent pied à terre et entrèrent dans l’eau. Jeanne entendit un
doux bruissement de roseaux quand ils soulevèrent le corps de Berthe.
    — Tu étais
prête à aller me chercher, n’est-ce pas ? murmura Gerold au creux de son
oreille.
    — Oui,
répondit-elle en un souffle, sans lever la tête.
    — Sais-tu
nager ?
    — Non.
    L’étreinte de
Gerold s’accentua. Derrière eux, les hommes emportaient déjà la dépouille de la
servante vers les chars. Le chapelain marchait à leurs côtés, tête basse, en
psalmodiant une oraison. Richild ne l’avait pas suivi. Menton haut, elle fixait
Jeanne et Gerold.
    Jeanne se défit
de l’étreinte du comte.
    — Qu’y
a-t-il ? demanda-t-il d’une voix tendre.
    Richild les
observait toujours.
    — Rien,
je...
    Il suivit la
direction de son regard.
    — Je vois,
murmura-t-il en écartant une mèche blonde de son front. Rejoignons les autres.
    Côte à côte, ils
revinrent vers les chars. Gerold s’en fut peu après pour consulter le chapelain
au sujet de la cérémonie funèbre.
    — Jeanne,
déclara Richild, tu resteras avec nous sur le chariot jusqu’à la fin du voyage.
Tu y seras plus en sécurité.
    Il était vain de
protester. Jeanne rejoignit sagement sa banquette.
    Après avoir
déplacé des sacs de grain pour lui faire de la place, les hommes déposèrent
Berthe sur le plancher du char de queue. Une servante d’un certain âge se jeta
sur le corps de la défunte et se mit à pleurer bruyamment. Chacun attendit dans
un silence mi-respectueux, mi-embarrassé. Finalement, le chapelain s’approcha
et parla à la femme à voix basse. Celle-ci leva sur Richild un regard rougi de
larmes.
    — Vous !
hurla-t-elle. C’est vous, ma dame, qui l’avez tuée ! Ma petite Berthe
était une bonne et brave fille, qui vous aurait fidèlement servie ! Sa
mort pèsera sur votre conscience, ma dame ! Oui, sur votre conscience !
    Deux servantes de
Richild s’emparèrent de la vieille folle et l’éloignèrent dans un chapelet d’imprécations.
    Le chapelain s’approcha
de la comtesse, les mains jointes en signe de contrition.
    — La mère de
Berthe, gente dame. Son chagrin aura conduit cette pauvre femme dans les affres
de l’égarement. La mort de son enfant est

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