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La Papesse Jeanne

La Papesse Jeanne

Titel: La Papesse Jeanne Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Donna Cross
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éclata de rire. Au bout du compte, le voyage vers Saint-Denis ne serait
pas aussi long qu’elle l’avait cru.
     
     
    Le convoi
traversa un affluent du Rhin sans encombre. À cet endroit, le pont était large
et robuste. Il avait été bâti du temps de l’empereur Charlemagne, et le
seigneur de ce comté l’entretenait avec soin. En revanche, la Meuse, au bord de
laquelle on arriva au huitième jour, leur opposa un sérieux obstacle, car le
pont qui l’enjambait était depuis longtemps abandonné. Ses poutres étaient
pourries, et plusieurs brèches béantes dans le tablier rendaient tout passage
impossible. À peu de distance, quelqu’un avait improvisé un pont de fortune en
alignant flanc contre flanc une rangée de barques de bois. Une personne pouvait
ainsi traverser la rivière en sautant d’un bateau à l’autre. Mais ce pont
flottant ne pouvait en aucun cas supporter le poids de tous les gens, ni de
tous les biens entassés dans les chars. Gerold et deux de ses hommes longèrent
la rive vers le sud en quête d’un gué. Une heure plus tard, ils revinrent pour
signaler un passage possible, à deux milles en aval.
    Le convoi se
remit en branle. Les chars penchaient dangereusement parmi les broussailles de
la berge. Les femmes devaient souvent s’agripper des deux mains à la rambarde
pour éviter de basculer par-dessus bord. Berthe marchait toujours à côté,
articulant à mi-voix une prière sans fin. Ses semelles de corde étaient si
usées qu’elle boitait déjà. Ses orteils étaient enflés, ses talons crevassés et
sanguinolents. Jeanne remarqua qu’il lui arrivait parfois de décocher un regard
en coin vers Richild et ses filles, comme si elle tirait une sorte de consolation
de leur précaire équilibre.
    Enfin, le gué fut
atteint. Gerold et deux autres cavaliers s’avancèrent à cheval dans la rivière
pour mesurer sa profondeur et la force du courant. L’eau les encercla
rapidement, sans toutefois les engloutir, après quoi son niveau redescendit peu
à peu, au fur et à mesure que le lit s’élevait vers la berge opposée.
    Gerold revint sur
ses pas et fit signe au reste du convoi d’avancer. Jeanne piqua des deux sans
hésitation et pénétra dans la rivière sur sa jument, suivie de son loup, qui se
mit à nager sans crainte. Après une seconde d’hésitation, Jean et les autres
lui emboîtèrent le pas.
    Les eaux de la
Meuse cernèrent Jeanne, qui dut retenir un cri en sentant leur froide morsure
sur ses jambes. Derrière elle, les chars suivirent en cahotant, tirés par des mules
réticentes. Mâchoires serrées, Berthe s’enfonça à pas lents dans l’eau, qui ne
tarda pas à lui arriver aux épaules.
    Un coup d’œil
jeté en arrière permit à Jeanne de constater que la servante était en mauvaise
posture. Elle revint sur ses pas. La jument pouvait les porter toutes deux sans
difficulté. Elle n’était plus qu’à cinq pas quand Berthe disparut sous la
surface, aussi soudainement que si quelqu’un l’avait tirée par les chevilles.
Jeanne s’arrêta, hésitante. Puis elle pressa sa monture vers les cercles
concentriques de plus en plus larges qui marquaient l’endroit où la servante
avait disparu.
    — N’avance
plus !
    La main de Gerold
tira sur la bride et retint la jument. Tenant dans son autre poing une branche
de saule, il descendit de cheval et se mit à marcher vers la berge en sondant
le fond de la rivière avant chaque pas. À une brassée de l’endroit où Berthe
avait sombré, il s’arrêta net : sa branche venait de s’enfoncer
profondément.
    — Un trou d’eau !
s’écria-t-il.
    Il se débarrassa
de sa cape et plongea.
    Une
extraordinaire confusion s’instaura immédiatement. Les cavaliers se mirent à
arpenter en tous sens le lit du fleuve, hurlant des instructions et battant la
surface de leurs bâtons.
    Gerold nageait
quelque part. Comment ne voyaient-ils pas qu’ils risquaient par leurs allées et
venues de le piétiner ?
    — Arrêtez !
hurla Jeanne.
    Nul ne lui prêta
attention. Elle se dirigea donc vers Egbert, le chef des gens de Gerold, et l’empoigna
par le bras.
    — Arrêtez !
    Médusé, Egbert
esquissa un geste pour se libérer, mais elle l’en dissuada du regard.
    — Dites-leur
d’arrêter ! De cette façon, ils ne réussiront qu’à aggraver les choses.
    L’homme leva le
bras et fit signe à ses hommes. Ceux-ci cessèrent leurs recherches,
encerclèrent le trou d’eau, et attendirent dans un silence

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