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La Papesse Jeanne

La Papesse Jeanne

Titel: La Papesse Jeanne Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Donna Cross
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honneur à la lignée de son époux.
    Jeanne, voyant
tressauter les épaules de la mariée, sut qu’elle venait de réprimer un
gloussement.
    — Qu’elle
prenne pour modèle le chien, dont le cœur et les yeux sont toujours tournés
vers son maître ; et quand bien même son maître le fouetterait ou lui
jetterait la pierre, le chien le suivra en remuant la queue.
    Voilà qui sonnait
aux oreilles de Jeanne comme difficilement supportable, mais Fulgence
considérait Gisla avec affection et ne cherchait nullement à l’offenser.
    — Toute
femme, enchaîna-t-il, se doit d’éprouver pour son mari un amour parfait et
indestructible.
    Le prélat se
tourna vers le comte Hugo.
    — Puisse cet
homme être brave comme David, sage comme Salomon, et fort comme Samson. Puisse
son domaine croître de même façon que sa fortune. Puisse-t-il se montrer
toujours juste envers sa dame, sans la punir au-delà de ce qui est raisonnable.
Puisse-t-il vivre longtemps pour voir ses fils honorer son nom.
    L’échange des
vœux commença. Le comte Hugo parla le premier et passa une bague à turquoise
byzantine à l’annulaire de Gisla  – car ce doigt contenait la veine menant
au cœur.
    Puis vint le tour
de l’épousée. Jeanne l’écouta réciter ses vœux. Sa voix était joyeuse. Son
avenir semblait assuré.
    Et le
mien ? Que me réserve-t-il ?
    Elle ne resterait
pas éternellement à l’école cathédrale. Trois ans, tout au plus. Laissant libre
cours à son imagination, elle se vit maître d’études dans quelque établissement
renommé, à Reims, peut-être, voire à l’école Palatine, passant ses journées à
explorer la sagesse antique.
    Il me faudrait
pour cela quitter Villaris. Quitter Gerold.
    Elle l’avait
toujours su. Mais depuis quelques mois, elle rejetait cette pensée, préférant
se satisfaire du présent et de la joie qu’elle éprouvait à côtoyer Gerold
chaque jour.
    Elle le chercha
du regard. Son profil était vigoureux et bien découpé, sa silhouette haute et
droite. Ses cheveux roux tombaient en lourdes boucles sur ses épaules.
    Jamais je n’ai
vu un aussi bel homme, se dit-elle pour la centième
fois.
    Comme s’il lisait
dans ses pensées, il se tourna vers elle. Leurs regards se rencontrèrent. Une
lueur, dans les prunelles du comte  – de la tendresse ? — lui fit
chaud au cœur.
    J’ai tort de
m’inquiéter, se dit-elle. Rien ne m’oblige à
prendre une décision dès maintenant.
    Elle avait trois
ans devant elle.
    Il pouvait se
passer tant de choses en trois ans !
     
     
    À son retour de l’école
la semaine suivante, Jeanne trouva Gerold qui l’attendait sous le portique.
    — Suis-moi,
dit le comte, d’un ton qui indiquait qu’il avait une surprise pour elle.
    Ils franchirent
la porte du château, puis le rempart de bois, longèrent le chemin sur plusieurs
milles, bifurquèrent soudain en pleine forêt et émergèrent peu après dans une
petite clairière, au milieu de laquelle se dressait une chaumière délabrée,
visiblement à l’abandon. Sans doute avait-elle jadis appartenu à quelque
citoyen aisé, car ses murs à clayons enduits de torchis semblaient encore
solides ; quant à sa porte, elle était de chêne massif. Elle rappela à
Jeanne la maison paternelle d’Ingelheim, quoique nettement plus petite ;
son toit de chaume, criblé de trous, pourrissait de partout.
    Ils s’arrêtèrent
face à l’entrée.
    — Attends-moi
ici, ordonna Gerold.
    Jeanne,
intriguée, le regarda faire le tour complet de l’édifice avant de la rejoindre
et de s’immobiliser près d’elle.
    — Regarde.
    Avec une feinte
solennité, il leva les mains au-dessus de sa tête et battit des paumes à trois
reprises.
    Rien ne se
produisit. Jeanne lui décocha un regard surpris. Gerold scrutait toujours la
chaumière, visiblement en attente de quelque chose. Mais de quoi ?
    La porte de chêne
s’ouvrit en geignant, d’abord lentement, puis plus vite, sur les ténèbres de la
pièce. Jeanne jeta un coup d’œil. Personne. La porte s’était ouverte seule.
    Cent questions se
bousculèrent sous son crâne, mais une seule réussit à se frayer un chemin jusqu’à
ses lèvres.
    — Comment...
?
    — Un
miracle, dit Gerold, levant vers le ciel un regard empreint d’une parodie de
piété.
    Jeanne fit une
grimace sceptique.
    Il partit d’un
grand éclat de rire.
    — Alors, ce
doit être de la sorcellerie !
    Jeanne s’approcha
de la porte et

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