Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
La parade des ombres

La parade des ombres

Titel: La parade des ombres Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
Vom Netzwerk:
de contempler encore ses traits.
    La fille avait dû ressentir la même curiosité car elle profita de ce que Rackham la lâchait pour tendre vers elle un visage intéressé.
    — Inutile de la reluquer, grinça Bonny. Cette peste a trouvé son maître !
    — Qui est-ce ? demanda Mary, qui ne s’expliquait pas cette attirance étrange.
    — Ma femme, ricana James Bonny.
    Il détourna la tête et cracha à terre en lui coulant un œil haineux.
    — Désolé, répliqua Baletti.
    — C’est moi, reprit Bonny. J’aurais jamais dû me laisser embobiner par cette garce, c’est tout. Elle voulait un marin, elle l’a trouvé. Mais j’aurai ma revanche, assura-t-il. Rackham a obtenu le pardon du roi, mais elle ne se contentera pas de sa solde de corsaire pour élever son bâtard. Madame a des goûts de luxe sous ses allures de catin. Tôt ou tard, Rackham replongera.
    Il ricana de nouveau et remplit son verre. Mieux valait ne pas rester en sa compagnie. S’il buvait encore, il irait certainement leur chercher querelle.
    — Comment peut-on s’engager ? demanda Baletti, revenant à leurs préoccupations.
    — Sans navire, je ne peux rien pour vous, lâcha Bonny. Woodes Rogers va ramener de l’ordre. Tous les pirates qui s’obstineront seront pendus haut et court. Je vous conseille de ne pas l’oublier, ajouta-t-il en se levant, incapable d’en supporter davantage.
    En face de lui, son épouse riait à gorge déployée au milieu des matelots. Il tourna les talons et gagna la sortie, les poings serrés.
    — Il nous reste Blackbeard, soupira Mary.
    — Certainement pas. Tu as entendu son propos ? Il confirme celui du tavernier. Ce Woodes Rogers est certainement un de ces coqs ambitieux prêts à tout pour marquer leur territoire. Il ne fera pas bon côtoyer les pirates dans les Bahamas.
    Il s’étira et contempla le visage d’Ann Bonny qui regardait fréquemment dans leur direction. Baletti demeura figé un instant devant son sourire. Mary se retourna sur sa chaise et son cœur s’accéléra une nouvelle fois.
    — Elle est belle, très belle, lâcha-t-elle.
    Baletti hocha la tête.
    — Elle te ressemble, remarqua-t-il.
    Mary en fut troublée.
    — Je ne trouve pas.
    — Depuis combien de temps Mary Read n’a-t-elle pas croisé un miroir ?
    — Depuis Venise, je crois, avoua-t-elle en souriant.
    — Allez, viens, lady pirate ! fit Baletti en se levant, rieur. Si nous ne pouvons être corsaires, nous pouvons toujours être matelots. En ratissant les auberges, nous trouverons bien un équipage pour nous prendre.
    Mary hocha la tête et lui emboîta le pas. Non sans avoir lancé un dernier coup d’œil en arrière. La compagne de Rackham possédait des traits qui lui étaient familiers. Elle haussa les épaules en se disant que c’était la couleur de ses boucles qui avait donné ce sentiment à Baletti, et sa beauté qui lui avait touché l’âme.
    Elle soupira en apprivoisant l’éclatante lumière du jour. Il était vraiment temps qu’elle se reprenne !

32
     
     
    E mma trompa son attente dans la contemplation du jeu qui se déroulait dans le jardin. La demeure de Nicolas Lawes à Kingston était somptueuse, mais elle n’en vit rien, tout entière captivée par ces fillettes qui riaient en se succédant à la marelle, à côté de la table sur laquelle le goûter d’anniversaire attendait. La maisonnée avait pris un air de fête pour célébrer les huit ans de Natalia, l’enfant unique et chérie du gouverneur de la Jamaïque.
    — Pardonnez-moi, ma chère amie, de vous avoir fait attendre ! s’exclama celui-ci en pénétrant dans le salon où un domestique avait prié Emma de patienter.
    Elle se retourna pour lui tendre sa main à baiser.
    — Languir serait plus juste, mon cher, le taquina-t-elle en le couvrant d’un œil langoureux.
    Lawes hocha la tête et résista à une furieuse envie de l’étreindre. Emma s’en amusa. Elle savait que cela ne durerait pas, qu’il céderait sur un seul claquement de doigts, comme cette fois, cette unique fois, où elle l’avait provoqué pour obtenir une patente qu’on tardait à lui remettre. Lawes s’était fait un plaisir de la lui obtenir. C’était au début de son exil, alors qu’elle se trouvait à Cuba.
    Visiblement, dix ans et un mariage plus tard, il n’avait pas oublié.
    — Votre Natalia est charmante. Je suis confuse de me présenter chez vous à un moment aussi peu propice. Je suppose que sa mère va m’en

Weitere Kostenlose Bücher