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La parade des ombres

La parade des ombres

Titel: La parade des ombres Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
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crever.
    Elle se redressa d’un bond, comme une hyène, riant de désespoir, et vociféra :
    — Gabriel ! Mes bagages, tout de suite ! Nous partons pour Venise !

14
     
     
    D epuis deux jours, Mary se sentait nauséeuse et fiévreuse. Elle savait qu’elle n’était pas enceinte et pencha pour quelque humeur maladive, supposant que cela passerait. Elle se mit au lit avec la désagréable sensation d’avoir la nuque plombée et le corps douloureux. Elle aurait dû en parler à Baletti, mais il lui avait semblé si soucieux et distant la journée durant qu’elle ne l’avait pas osé. Elle s’endormit d’une traite, en ayant le sentiment que le lit l’aspirait dans ses draps blancs.
     
    — Venez vite, Monsieur, c’est Madame Mary ! s’exclama la chambrière en forçant la porte de l’atelier où, souvent, Baletti peignait.
    Il glissa ses pinceaux dans un pot et se précipita.
    — Elle ne s’est pas levée ce matin, et je m’en suis surprise. Ce n’est pas dans ses habitudes de ne pas déjeuner, expliqua la chambrière, inquiète, tandis que Baletti fonçait dans l’escalier à grandes enjambées, le cœur battant la chamade.
    Il écarta les rideaux du baldaquin. Le visage émacié et blafard de Mary lui apparut en pleine lumière. Il plaqua une main sur son front ruisselant de sueur. Il était brûlant. Mary étouffa un gémissement. Baletti se retourna vers la jeune femme qui se tordait les mains d’inquiétude.
    — Faites bouillir de l’eau, Anna. Je vous rejoins avec mes plantes médicinales.
    — C’est grave, Monsieur ?
    — Assez. Elle est inconsciente. La fièvre est trop forte. Je dois savoir ce qu’elle a fait ces jours derniers. Activez-vous.
    — Je vais demander à Pietro. Madame Mary aime bien discuter avec lui.
    Baletti hocha la tête et découvrit le corps fébrile de Mary. Il l’ausculta sans obtenir d’autre réaction que des gémissements entrecoupés de claquements de dents. Il s’en voulut de n’avoir rien remarqué, obsédé par le courrier que lui avait envoyé Cork avant de rejoindre la flotte impériale, près des côtes de Potrée.
     
    J’ai appris de Corneille toute la vérité sur Mary Read. Elle vous bouleversera comme je l’ai été. Je ne peux en quelques phrases vous raconter ce qu’il en est, mais prenez grand soin d’elle, marquis. Sans le savoir ni le vouloir, vous avez déchaîné contre elle le pire des châtiments. Bientôt, vous saurez tout. Ne la brusquez pas, de grâce. En ce qui concerne Forbin, tout est réglé ainsi que vous le souhaitiez.
     
    Baletti l’avait lu et relu cent fois, au point de connaître ce billet par cœur. Cette vérité, ces confidences, qu’il avait refusées tant de fois, le torturaient à présent.
    Il se pencha vers elle et l’embrassa.
    — Mary, mon amour, chuchota-t-il, qui que tu sois, bats-toi.
    Les lèvres de Mary tremblèrent et de fins sillons salés roulèrent sur ses joues. Baletti se pencha sur son souffle.
    — Niklaus, gémit-elle. Je t’aime, Niklaus. T’en va pas. S’il te plaît, t’en va pas.
    Le cœur du marquis se serra. Plus tard, se reprit-il, plus tard pour les réponses. Il abandonna Mary à son tourment et sortit en courant pour préparer de quoi faire tomber la fièvre.
     
    *
     
    Forbin avait fait transférer Junior et Corneille sur La Gentille, laissée à quelques encablures de Potrée, dans un port vénitien. Seule une poignée d’hommes s’y trouvait encore. Les autres l’avaient rejoint sur La Galatée, pour pouvoir répondre aux prétentions des Impériaux.
    Après le rapport de Corneille, sa première réaction avait été d’ignorer la rumeur concernant Potrée. Elle était cependant si répandue que son ministre n’aurait pas compris qu’il ne la vérifie pas. Il avait donc accepté de faire confiance à Cork, mais décidé de s’y rendre tout de même. Il était là avec Clairon qui avait pris le commandement d’un brûlot, déléguant celui de La Gentille à son second.
    Forbin rangea sa longue-vue.
    « Quelque chose ne va pas », se dit-il, inquiet.
    Son idée était de laisser les navires impériaux l’approcher tandis qu’il canonnerait la place forte dressée sur la falaise. Clairon enverrait alors son brûlot sur l’un, et lui se chargerait de l’autre.
    L’ennemi se retrouverait pris à son propre piège. La batterie du rivage, aussi maigre soit-elle, serait détruite et plus rien ne pourrait empêcher Forbin d’asséner une bonne leçon

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