La parfaite Lumiere
maison
se trouve sur la pente de Saikachi, déclara Kojirō.
Lui et l’un des hommes de
Hangawara étaient au sommet de la colline. Dans la vallée profonde, au-dessous
d’eux, ils pouvaient voir Ochanomizu, une section de la rivière d’où provenait,
disait-on, l’eau destinée au thé du shōgun.
— Attendez ici, dit le guide
de Kojirō. Je vais voir où elle est.
Peu de temps après, il revint avec
le renseignement qu’ils l’avaient déjà dépassée.
— Je ne me rappelle aucun
endroit qui eût l’air d’appartenir à l’instructeur du shōgun.
— Moi non plus. Je croyais
qu’il aurait une grande résidence, comme Yagyū Munenori. Mais il s’agit de
la vieille maison que nous avons vue à droite. J’ai ouï dire qu’elle
appartenait autrefois au palefrenier du shōgun.
— Je suppose qu’il n’y a pas
là de quoi s’étonner. Ono ne vaut que quinze cents boisseaux. La majeure partie
des revenus de Munenori a été acquise par ses ancêtres.
— C’est là, dit le guide,
l’index tendu.
Kojirō s’arrêta pour
inspecter la disposition d’ensemble des bâtiments. Le vieux mur de terre
remontait de la partie médiane de la pente jusqu’à un hallier situé sur une
colline, par-delà. L’enceinte avait l’air fort vaste. Du portail sans porte,
Kojirō pouvait distinguer, au-delà de la maison principale, un bâtiment
qu’il prit pour le dōjō, et une annexe, apparemment de construction
plus récente.
— Tu peux rentrer,
maintenant, dit Kojirō. Et préviens Yajibei que si je ne suis pas revenu
ce soir avec la vieille dame, il peut me considérer comme tué.
— Bien, monsieur.
L’homme redescendit en courant la
pente de Saikachi ; il s’arrêta plusieurs fois pour se retourner.
Kojirō n’avait pas perdu de
temps à tenter d’approcher Yagyū Munenori. Il n’y avait aucun moyen de le
vaincre et par là de confisquer à son profit la gloire de l’autre : le
style Yagyū servait en fait aux Tokugawa. En soi, c’était une excuse
suffisante pour que Munenori refusât d’affronter les rōnins ambitieux. Tadaaki
avait tendance à affronter tout ce qui se présentait. En comparaison du style Yagyū,
celui d’Ono était plus pratique, le but étant non de faire un grand étalage
d’adresse, mais de tuer vraiment. Kojirō n’avait entendu parler de
personne qui eût réussi à s’attaquer à la Maison d’Ono et à lui infliger la
honte. Alors que Munenori était en général le plus respecté, Tadaaki passait
pour être le plus fort.
Dès son arrivée à Edo, et dès
qu’il avait pris connaissance de cette situation, Kojirō s’était dit qu’un
de ces jours, il frapperait au portail d’Ono.
Numata Kajurō jeta un coup
d’œil par la fenêtre du vestiaire du dōjō, et ses yeux balayèrent la
pièce à la recherche de Toranosuke. Il le repéra au milieu de la salle, en
train de donner une leçon à un élève plus jeune, courut à lui, et, à voix
basse, bredouilla :
— Il est là ! Là-bas,
dans la cour du devant !
Toranosuke, son sabre de bois
brandi, cria à l’élève :
— En garde !
Puis il se précipita ; ses
pas retentissaient. A l’instant où les deux hommes atteignaient l’angle nord,
l’élève exécuta une culbute et son sabre de bois vola dans les airs. Toranosuke
se retourna et dit :
— ... De qui parles-tu ?
De Kojirō ?
— Oui, il est juste à
l’intérieur du portail. Il sera ici d’une minute à l’autre.
— Beaucoup plus tôt que je ne
l’espérais. Prendre la vieille dame en otage était une bonne idée.
— Qu’as-tu l’intention de
faire, maintenant ? Qui va le recevoir ? Il faudrait que ce fût
quelqu’un de prêt à tout. S’il a le culot de venir seul ici, il risque
d’essayer de nous prendre par surprise.
— Fais-le venir au dōjō.
Je le recevrai moi-même. Vous autres, restez à l’arrière-plan et tenez-vous
tranquilles.
— Du moins sommes-nous très
nombreux ici, dit Kajurō.
En regardant autour de lui, il fut
encouragé de voir les visages de champions comme Kamei Hyōsuke, Negoro
Hachikurō et Itō Magobei. Il y en avait également une vingtaine
d’autres ; ils n’avaient aucune idée des intentions de Kojirō, mais
savaient tous pourquoi Toranosuke voulait qu’il fût là. L’un des deux hommes
tués par Kojirō près du Donjiki était le frère aîné de Toranosuke. Il
avait beau être un bon à rien, mal noté en classe, sa mort devait être vengée à
cause des
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