La parfaite Lumiere
d’aspect vigoureux de plus de
cinquante ans. Les derniers rayons du soleil se reflétaient fortement sur son
bonnet qui descendait sur les deux oreilles et faisait saillie devant, cachant
les traits.
Son compagnon était un adolescent
mince et nerveux ; il portait sur le devant une mèche qui seyait à son
visage enfantin. Il avait la tête couverte d’une serviette nouée sous le
menton.
— Que dis-tu des coffres de
laque ? demanda le plus jeune. Bonne idée, hein ?
— Oui, c’était astucieux de
nous présenter, comme mêlés aux travaux du château. Je n’aurais pas trouvé ça
tout seul.
— Il va falloir que je
t’enseigne ces choses-là, petit à petit.
— Attention. Ne commence pas
à te moquer de tes aînés. Mais qui sait ? peut-être que dans quatre ou
cinq ans, le vieux Daizō sera à tes ordres.
— Mon Dieu, la jeunesse
grandit, en effet. Les vieux ne font que vieillir, quels que soient leurs
efforts pour rester jeunes.
— Tu crois que c’est mon
cas ?
— Ça saute aux yeux,
non ? Tu ne penses qu’à ton âge ; voilà pourquoi tu tiens tellement à
voir ta mission accomplie.
— Tu me connais fort bien, il
me semble.
— Nous partons ?
— Oui ; la nuit nous
rattrape.
— Je n’ai pas envie d’être
rattrapé.
— Ha ! ha ! Si tu
t’effraies facilement, tu ne peux avoir grande confiance en ce que tu fais.
— Il n’y a pas bien longtemps
que je suis dans le métier. Même le bruit du vent me rend nerveux, quelquefois.
— Parce que tu continues à te
prendre pour un voleur ordinaire. Si tu gardes présent à l’esprit que tu fais
cela dans l’intérêt du pays, tout ira bien.
— Tu dis toujours ça. Je te
crois, mais quelque chose me dit sans arrêt que je fais mal.
— Il faut avoir le courage de
tes convictions.
Pourtant, l’admonestation manquait
un peu de conviction, comme si Daizō se fût rassuré lui-même. L’adolescent
sauta souplement en selle et partit en avant.
— Garde l’œil sur moi,
cria-t-il en se retournant. Si je vois quoi que ce soit, je te ferai signe.
La route descendait longuement
vers le sud. Une minute, Iori les observa de derrière le Bouddha de pierre,
puis résolut de les suivre. D’une façon quelconque, l’idée s’était imposée à
lui qu’il s’agissait là des voleurs du trésor.
Une ou deux fois, ils regardèrent
en arrière avec circonspection. Ils ne parurent pas trouver qu’il y avait lieu
de s’inquiéter, et semblèrent oublier Iori au bout d’un moment. Bientôt, il fit
trop sombre pour voir à plus de quelques mètres devant soi. Les deux cavaliers
se trouvaient presque à la lisière de la plaine de Musashino quand l’adolescent
désigna quelque chose de la main et dit :
— ... Là, chef, voilà les
lumières d’Ogimachiya.
La route devenait plane. Non loin
devant eux, la rivière Iruma, serpentant comme une obi rejetée, brillait d’une
lueur argentée au clair de lune. Maintenant, Iori veillait à passer inaperçu.
L’idée que ces hommes étaient les voleurs était devenue certitude ; or,
depuis l’époque de Hōtengahara, il n’ignorait rien des bandits. Les
bandits étaient de méchants hommes qui se livreraient à des voies de fait pour
un seul œuf ou une poignée de haricots rouges. Le meurtre gratuit n’était rien
à leurs yeux. Ils entrèrent bientôt dans la ville d’Ogimachiya. Daizō leva
le bras et dit :
— Jōta, nous nous
arrêterons ici pour manger un morceau. Il faut nourrir les chevaux, et j’ai
envie de fumer.
Ils attachèrent les chevaux devant
une boutique faiblement éclairée où ils entrèrent. Jōta se posta près de
la porte, ne quittant pas les coffres du regard durant tout le temps qu’il
mangea. Quand il eut terminé, il sortit nourrir les chevaux.
Iori entra dans un magasin
d’alimentation situé en face, et, quand les deux cavaliers repartirent, attrapa
sa dernière poignée de riz qu’il mangea en marchant.
Maintenant, ils chevauchaient côte
à côte ; la route était sombre, mais plate.
— ... Jōta, as-tu envoyé
un courrier à Kiso ?
— Oui, je m’en suis chargé.
— Quelle heure leur as-tu
dit ?
— Minuit. Nous devrions
arriver à l’heure.
Dans la nuit silencieuse, Iori
surprit assez de leurs propos pour apprendre que Daizō appelait son
compagnon d’un nom d’enfant, alors que Jōta nommait son aîné
« chef ». Cela signifiait peut-être uniquement qu’il était chef de
bande ; pourtant, Dieu
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