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La parfaite Lumiere

La parfaite Lumiere

Titel: La parfaite Lumiere Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Eiji Yoshikawa
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daimyōs de lui rendre
hommage, mais a même essayé d’apporter un certain bien-être, un certain bonheur
au peuple. Et Ieyasu ? Pratiquement, il ne s’intéresse qu’à la fortune de
son propre clan. Ainsi de nouveau le bonheur du peuple et le bien-être de la
famille impériale sont-ils sacrifiés pour apporter richesse et pouvoir à une
dictature militaire. Il semble que nous soyons au seuil d’un nouvel âge de
tyrannie. Nul ne s’inquiète plus de cet état de choses que le seigneur Date Masamune
ou, parmi la noblesse, le seigneur Karasumaru.
    Geki s’interrompit dans l’attente
d’une réponse, mais il n’en vint aucune à l’exception d’un « je
vois » à peine articulé.
    Musashi était comme tout le monde
au courant des transformations politiques radicales qui avaient eu lieu depuis
la bataille de Sekigahara. Toutefois, il n’avait jamais prêté la moindre
attention aux activités des daimyōs de la faction d’Osaka, ni aux motifs
cachés des Tokugawa ni aux positions prises par de puissants seigneurs extérieurs
comme Date et Shimazu. Sur Date, il ne savait qu’une chose : son fief
rapportait officiellement un revenu de trois millions de boisseaux par an mais
en réalité devait en rapporter cinq millions, ainsi que l’avait dit Geki.
    — Deux fois par an, reprit ce
dernier, le seigneur Date envoie des produits de notre fief au seigneur Konoe,
à Kyoto, pour être présentés à l’empereur. Jamais il n’y a manqué, même en
temps de guerre. Voilà pourquoi je me trouvais à Kyoto... Le château d’Aoba est
le seul du pays à posséder une chambre spéciale réservée à l’empereur. Il est
peu probable, bien sûr, qu’elle serve jamais ; pourtant, le seigneur Date
la lui a réservée, et construite en bois emprunté au vieux palais impérial
lorsqu’on l’a rebâti. Il a fait venir le bois de Kyoto à Sendai par bateau...
Et laissez-moi vous parler de la guerre de Corée. Durant les campagnes, là-bas,
Katō, Konishi et d’autres généraux rivalisaient pour obtenir une gloire et
des triomphes personnels. Pas le seigneur Date. Au lieu des armes de sa propre
famille, il portait celles du soleil levant, et disait à tout le monde qu’il
n’aurait jamais conduit ses hommes en Corée pour la gloire de son propre clan
ou pour celle de Hideyoshi. Il y allait par amour pour le Japon lui-même.
    Tandis que Musashi écoutait avec
attention, Geki s’absorbait dans son monologue, décrivant son maître en termes
chaleureux, et assurant à Musashi qu’il était sans rival dans sa dévotion
absolue à la nation et à l’empereur. Un temps, il en oublia de boire ;
mais soudain, ayant abaissé le regard, il déclara :
    — ... Le saké est froid.
    Frappant dans ses mains pour
appeler la servante, il allait en commander d’autre quand Musashi se hâta de
l’arrêter :
    — J’en ai eu plus qu’assez.
Si vous n’y voyez pas d’inconvénient, je préférerais prendre du riz et du thé
maintenant.
    — Déjà ? marmonna Geki.
    Il était visiblement déçu mais,
par déférence envers son hôte, dit à la fille d’apporter le riz.
    Geki continua à parler pendant
qu’ils mangeaient. Musashi eut l’impression que les samouraïs du fief du
seigneur Date, à la fois en tant qu’individus et en tant que groupe, se
sentaient concernés vitalement par la Voie du samouraï et les moyens de se
discipliner eux-mêmes en accord avec la Voie.
    Cette Voie existait depuis les
temps anciens où la classe des guerriers était née ; mais ses valeurs et
obligations morales n’étaient maintenant guère plus qu’un vague souvenir.
Durant le chaos des querelles intestines des XV e et XVI e siècles, l’éthique du
militaire s’était déformée, si on ne l’ignorait pas totalement, et maintenant,
presque tout homme capable de manier un sabre ou de tirer à l’arc se voyait
considéré comme un samouraï, sans tenir compte de l’attention – ou du
manque d’attention – qu’il accordait à la signification plus profonde
de la Voie.
    Les soi-disant samouraïs de
l’époque étaient souvent des hommes ayant un caractère plus bas et des
instincts plus vils que les paysans ou les bourgeois ordinaires. Ne disposant
que de leurs muscles et de leur technique pour commander le respect à leurs
inférieurs, à long terme ils étaient condamnés à l’anéantissement. Rares
étaient les daimyōs capables de s’en rendre compte, et seule une poignée
des principaux vassaux des

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