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La passagère du France

La passagère du France

Titel: La passagère du France Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Bernadette Pecassou-Camebrac
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tombe dehors, et la tempête ?
    — Laissez faire, je vous dis, et suivez-moi, on va aller la chercher. Cette fois, qu’elle le veuille ou non, elle viendra et ça va marcher.
    Bien que réticents pour de multiples raisons qui parvenaient confusément à leurs cerveaux embrumés, ses complices le suivirent. Sophie et Béatrice les virent s’avancer vers elles près de la baie vitrée de la terrasse où elles bavardaient avec d’autres connaissances. Le photographe brandissait une bouteille de loin tout en se frayant un passage dans la foule et Sophie comprit qu’il revenait à la charge.
    — Oh non ! fit-elle, exaspérée, en s’emparant du verre de Béatrice. Cette fois, s’il insiste, je lui jette ton verre à la figure.
    — Chères amies ! lança le photographe d’une voix incertaine tout en affichant un grand sourire, nous venons vous convier à une fête à la russe sous la pluie.
    Sophie eut du mal à se retenir. Mais ce n’était ni le lieu ni le moment de faire un scandale. Il avait beaucoup bu et les deux autres qui l’accompagnaient visiblement aussi. Il fallait éviter qu’il ne se braque et couper court. Comment ? Que dire pour s’en débarrasser ?
    — Vous ne pouvez pas refuser insista-t-il alors en prenant d’autorité le bras de Sophie.
    Hélas pour la suite des événements et pour le calme que Sophie souhaitait garder afin de ne pas provoquer le pire, Béatrice, très énervée après ce photographe qui courait après les trophées, et sans doute aussi un peu vexée de cet intérêt soudain porté à une autre alors que la veille elle était le point de mire, s’interposa.
    — On ne veut pas de votre compagnie, dit-elle d’un ton sec et méprisant. Nous n’avons aucune envie de trinquer avec vous, ni à la russe, ni à la française, ni d’aucune façon.
    Piqué au vif comme on pouvait s’y attendre, le photographe monta immédiatement sur ses grands chevaux.
    — Mais ce n’est pas à toi que je parle, ma chère Béatrice. J’ai déjà trinqué avec toi et je n’ai pas envie de remettre le couvert. C’est à ton amie que je m’adresse.
    Béatrice blêmit.
    — Ça suffit ! coupa Sophie qui sentait que la conversation allait dégénérer. Personne ici ne lancera plus de bouteilles ! Vous avez fait assez de dégâts comme ça hier soir !
    Le photographe faillit s’en étrangler.
    — Des dégâts ! Quelques malheureuses bouteilles vides et quelques verres à la mer et tu parles de dégâts ! Ma pauvre, si comme moi tu étais allée sur des terrains de guerre, tu saurais ce que c’est que des dégâts et tu ne parlerais pas à tort et à travers.
    Il avait pris son ton de grand professionnel, mais il n’eut pas le temps d’en dire davantage. Béatrice, au comble de la rage de le voir insister avec ses insinuations et ses airs de baroudeur, avait pris son verre des mains de Sophie et lui en avait jeté le contenu à la figure. Cela se passa si vite que Sophie n’eut pas le temps d’intervenir et que le photographe, suffoqué, dégoulinant de Champagne et l’esprit obscurci par l’alcool, crut que c’était Sophie qui lui avait jeté le verre. Ridiculisé et comprenant qu’il allait perdre son pari et ses cinq mille francs, il vit rouge et décida que cette fille allait voir ce qu’elle allait voir ! Il en appela à ses amis qui n’attendaient que ça.
    — Cette fille est folle, dit-il en riant exagérément pour faire croire qu’il maîtrisait encore la situation, il faut la jeter à l’eau. Venez m’aider !
    Sophie n’eut pas le temps de comprendre ce qui allait se passer qu’ils l’entouraient déjà. Ils s’y mirent à trois pour la pousser vers la terrasse avec la ferme intention de lui donner une leçon en lui faisant peur. Après une légère bousculade où seule Béatrice tenta de s’interposer, ils se saisirent de Sophie sous les yeux mi-figue, mi-raisin des autres clients qui n’osaient intervenir, pensant à une farce qui allait cesser au seuil de la terrasse. Sophie elle-même affichait un sourire crispé et, bien qu’inquiète, elle ne se démenait pas plus que ça pour les faire lâcher, pensant qu’ils n’iraient pas loin vu le temps qu’il faisait à l’extérieur. Mais ils ne s’arrêtaient pas et l’emportèrent jusqu’au-dehors. Là, le froid glacial les saisit et sembla un instant réveiller leur lucidité.
    — Mince, fit l’un, il gèle.
    Mais le photographe était lancé et il tenait à donner une leçon

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