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La Perle de l'empereur

La Perle de l'empereur

Titel: La Perle de l'empereur Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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serviteurs habituels semblaient avoir disparu.
    « Ce doit être amusant pour les autres clients de l’hôtel, pensa Morosini. Si toutefois il y en encore. »
    Il n’en avait vu, en effet, aucun et, dans le hall les réceptionnistes avaient un curieux air figé.
    Une table somptueuse, pour deux personnes était dressée dans le salon où l’on introduisit l’invité, un salon qui lui-même avait subi des transformations grâce à une infinité de coussins, de poufs et de tentures brodées d’or ou d’argent. Une odeur de vanille mêlée à celle du bois de santal y régnait, cependant qu’un invisible musicien faisait entendre un air de sitar à la fois aigre et envoûtant…
    Enfin Alwar parut, les deux mains cordialement tendues et le visage éclairé d’un sourire éclatant, tel que l’on ne l’eût pas cru capable d’en produire.
    — Mon cher ami ! Comme c’est aimable à vous d’avoir accepté ma modeste invitation !
    — Comme c’est aimable à Votre Altesse de me l’avoir adressée !
    — Oh, c’est naturel. Tout de suite vous m’avez été sympathique et je n’aime pas résister aux élans de mon cœur ! Prenez place, je vous prie, et causons ! Mais… par grâce, traitez-moi en ami et oubliez la troisième personne ! N’êtes-vous pas prince, vous aussi ?
    — Certes, monseigneur, mais vous régnez sur des milliers de sujets et je ne règne que sur ma propre maison…
    — Une maison que j’aimerais connaître ! Venise et ses palais sur l’eau sont fascinants. C’est la seule ville d’Europe où un homme d’Orient doit se sentir facilement chez lui. Mais déjeunons ! J’ai tant de choses à vous dire et les plaisirs de la table les accompagneront heureusement…
    En fait et tout le temps que dura le repas – servi à l’occidentale et excellent –, ce fut surtout Aldo qui parla. Son hôte l’accabla de questions posées d’une voix douce et précise touchant sa famille, ses ancêtres, sa demeure, sa vie professionnelle, sa jeunesse, ses études, ses voyages, ses habitudes enfin. Parfois à la limite de l’indiscrétion. Ainsi, le fait que son invité soit marié n’eut pas l’air de l’enchanter :
    — Un homme tel que vous devrait demeurer libre de ses mouvements. Avoir des enfants, c’est bien… mais pourquoi s’encombrer de la mère… ou des mères ?
    — Je n’ai jamais considéré ma femme comme encombrante. Bien au contraire ! Je ne puis concevoir l’idée de vivre sans elle.
    — Pourtant vous en êtes loin en ce moment. Dès lors que vous pouvez vous en passer huit jours ou huit semaines, vous pouvez l’ignorer indéfiniment. Le temps ne signifie rien pour les dieux, ni pour les hommes capables de les approcher. Est-elle belle au moins ? ajouta-t-il avec une nuance de dédain qui n’échappa pas à Morosini et lui déplut.
    Mais il fallait répondre.
    — Elle est mieux que belle ! Différente de toutes les autres femmes ! laissa-t-il tomber sèchement.
    — Auriez-vous son portrait photographique ?
    — Non.
    — Pourquoi ? Les Européens ont toujours leurs poches bourrées des images des leurs et ils adorent les montrer !
    — Pas moi ! Outre qu’il n’y a pas de poches dans le vêtement que je porte (11) , une photographie ne saurait rendre l’éclat d’un visage. Seule la peinture le pourrait ! À condition que le peintre sache voir au-delà des traits et chercher l’âme.
    — Et il en existe ? Vos peintres actuels barbouillent leurs toiles de couleurs violentes qui à mes yeux ne signifient rien, ne suggèrent rien…
    Un œil sur les délicates peintures mogholes qui décoraient un pan du mur, Aldo excusa le jugement sans nuances de son hôte. Comment cet homme d’un autre âge pourrait-il comprendre quelque chose à un Derain, un Matisse, un Vlaminck ? Mais la conversation en étant venue à bout, il décida de s’y tenir. Aussi bien le déjeuner tirait à sa fin et le café était servi :
    — Mais puisque nous en sommes aux beautés de la Création, je me permets de vous rappeler, Altesse, que vous m’avez promis de me montrer des merveilles…
    Alwar sourit, frappa dans ses mains sur un certain rythme et deux des beaux jeunes gens aux regards craintifs surgirent, portant chacun un coffre d’assez belles dimensions qu’ils déposèrent sur une table basse. Puis, encore plus rapidement peut-être qu’ils étaient venus, ils s’inclinèrent, mains jointes, et disparurent. Le maharadjah se leva et

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