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La pierre et le sabre

La pierre et le sabre

Titel: La pierre et le sabre Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Eiji Yoshikawa
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pas aussitôt.
Il venait de s’apercevoir que l’autre avait de mauvaises intentions. Les yeux
fixés sur le sourire de mauvais augure de Tōji, il dit :
    — Je le pourrais, mais je
crois que ce serait stupide.
    — Eh bien, dit Tōji avec
emphase, si vous êtes si bon que vous puissiez dénigrer la Maison de Yoshioka
sans y être allé...
    — Oh ! vous aurais-je
froissé ?
    — Non ; pas du tout, dit
Tōji. Mais aucun habitant de Kyoto n’aime à entendre déprécier l’école
Yoshioka.
    — Je ne vous disais pas ce
que je pensais ; je répétais ce que j’avais entendu.
    — Jeune homme ! dit
sévèrement Tōji.
    — Eh bien ?
    — Savez-vous ce que l’on
entend par « samouraï inexpérimenté » ? Dans l’intérêt de votre
avenir, je vous mets en garde ! Vous n’arriverez jamais à rien en
sous-estimant les autres. Vous vous vantez d’abattre des hirondelles, et de
votre certificat de style Chūjō, mais vous feriez mieux de vous
rappeler que tout le monde n’est pas idiot. Et de commencer par bien regarder à
qui vous parlez avant de vous lancer dans vos vantardises.
    — Vous croyez donc qu’il ne s’agit
que de vantardises ?
    — Oui, je le crois.
    Bombant le torse, Tōji se
rapprocha.
    — ... Personne n’en veut
vraiment à un jeune homme qui se vante de ses exploits, mais il y a des limites
à ne pas dépasser.
    Le jeune homme se taisant, Tōji
reprit :
    — ... Depuis le début, je
vous entends sans me plaindre vous extasier sur vous-même. Mais la vérité, c’est
que je suis Gion Tōji, le disciple principal de Yoshioka Seijūrō
; et si vous dénigrez encore une fois la Maison de Yoshioka, je vous étripe !
    Entre-temps, ils avaient attiré l’attention
des autres passagers. Tōji, ayant révélé son nom et son rang considérable,
s’éloigna d’un air important vers l’arrière du navire en grondant des propos
menaçants sur l’insolence de la jeunesse actuelle. L’adolescent le suivit en
silence, tandis que les passagers les regardaient bouche bée, à une distance
respectueuse.
    Cette situation n’enchantait
nullement Tōji. Okō l’attendrait à l’arrivée du bateau, et s’il s’engageait
dans une querelle maintenant il aurait sûrement plus tard des ennuis avec les
autorités. L’air aussi insouciant que possible, il s’accouda au bastingage et s’absorba
dans la contemplation des tourbillons bleu-noir qui se formaient sous le
gouvernail.
    L’adolescent lui donna dans le dos
une tape légère.
    — Monsieur, dit-il d’une voix
douce qui ne trahissait ni colère, ni ressentiment.
    Tōji ne répondit pas.
    — ... Monsieur, répéta le
jeune homme.
    Incapable de feindre plus
longtemps l’indifférence, Tōji demanda :
    — Que voulez-vous ?
    — Vous m’avez traité de
vantard devant un grand nombre d’inconnus, et j’ai mon honneur à défendre. Je
me sens obligé de faire ce que vous m’avez défié de faire il y a quelques minutes.
Je veux que vous soyez témoin.
    — Qu’est-ce que je vous ai
défié de faire ?
    — Vous ne pouvez l’avoir déjà
oublié. Vous avez ri quand je vous ai dit que j’avais abattu des hirondelles à
la volée, et m’avez défié d’abattre une mouette.
    — Hum, vraiment ?
    — Si j’en abats une, vous
convaincrai-je que je ne parle pas pour ne rien dire ?
    — Mon Dieu... oui.
    — Très bien, je vais le
faire.
    — Magnifique, splendide !
fit Tōji avec un rire sarcastique. Mais n’oubliez pas que si vous ne
faites ça que par amour-propre et échouez, vous aurez vraiment les
rieurs contre vous.
    — J’en accepte le risque.
    — Je n’ai aucune intention de
vous en empêcher.
    — Et vous y assisterez comme
témoin ?
    — Comment donc ! Avec
plaisir !
    Le jeune homme se mit sur une
plaque de plomb au centre du pont arrière, et tendit la main vers son épée. Ce
faisant, il appela Tōji. Ce dernier, qui regardait avec curiosité, lui
demanda ce qu’il voulait, et l’adolescent lui répondit avec beaucoup de sérieux :
    — S’il vous plaît, faites
descendre des mouettes devant moi. Je suis prêt à en abattre autant que vous
voudrez.
    Tōji reconnut soudain la
similitude entre ce qui se passait et certaine histoire drôle attribuée au
prêtre Ikkyū ; le jeune homme avait réussi à le ridiculiser. Il cria
avec colère :
    — Quelle absurdité !
Quiconque pourrait faire voler devant lui des mouettes serait en mesure de les
abattre.
    — La mer s’étend sur

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