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La pierre et le sabre

La pierre et le sabre

Titel: La pierre et le sabre Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Eiji Yoshikawa
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prit
la forme de gâteaux de riz généreusement fourrés de beurre de haricots sucré.
Tandis que leur douceur lui fondait dans la gorge, Takezō fut la proie d’un
étourdissement. Les doigts qui tenaient le gâteau se mirent à trembler. « Je
suis vivant », se répétait-il en faisant vœu qu’à partir de cet instant il
mènerait un genre de vie tout différent.
    Les nuages rougeâtres du matin
avaient maintenant les joues roses. Takezō commença de voir plus nettement
le visage d’Otsū ; la faim céda la place à une paisible satiété ;
cela faisait l’effet d’un rêve, d’être assis là sain et sauf avec elle.
    — ... Quand il fera jour, il
nous faudra être très prudents. Nous sommes presque à la frontière de la
province, dit-elle.
    Takezō ouvrit de grands yeux.
    — La frontière... Mais oui, j’oubliais.
Je dois aller à Hinagura.
    — A Hinagura ? Pourquoi ?
    — C’est là qu’ils ont
emprisonné ma sœur. Il me faut la tirer de là. Je suppose que nous allons
devoir nous quitter.
    Otsū le considéra en silence,
abasourdie.
    — Si tu en as envie, va-t’en !
Mais si j’avais su que tu m’abandonnerais je n’aurais pas quitté Miyamoto.
    — Que puis-je faire d’autre ?
La laisser là-bas, à la palanque ?
    Avec un émouvant regard, elle lui
prit la main. Son visage, son corps entier brûlaient de passion.
    — Takezō,
supplia-t-elle, je te dirai plus tard, le moment venu, quels sont mes
sentiments là-dessus, mais je t’en prie, ne me laisse pas seule ici !
Emmène-moi avec toi, où que tu ailles !
    — Mais je ne peux pas !
    — Souviens-toi – elle
lui serra fortement la main –, que cela te plaise ou non, je reste avec
toi. Si tu crois que je te gênerai quand tu essaieras de délivrer Ogin, alors j’irai
t’attendre à Himeji.
    — Très bien, fais-le, dit-il aussitôt.
    — Tu viendras sûrement, n’est-ce
pas ?
    — Bien entendu.
    — Je t’attendrai au pont de
Hanada, tout près de Himeji. Je t’y attendrai, que cela prenne cent jours ou
mille.
    Takezō approuva d’un léger
signe de tête et s’éloigna rapidement, sans autre commentaire, le long des
crêtes qui joignent le col aux monts lointains. Otsū le regarda jusqu’à ce
que sa silhouette se fondît dans le paysage.
     
    Au village, le petit-fils d’Osugi
courut vers le manoir Hon’iden en criant :
    — Grand-mère !
Grand-mère !
    En s’essuyant le nez d’un revers
de main, il regarda dans la cuisine et dit avec excitation :
    — ... Grand-mère, tu connais
la nouvelle ? Il est arrivé quelque chose d’affreux !
    Osugi, debout devant le fourneau à
activer le feu avec un éventail de bambou, le regarda à peine.
    — Pourquoi tout ce vacarme ?
    — Tu ne sais donc pas,
grand-mère ? Takezō s’est échappé !
    — Echappé !
    Elle laissa tomber l’éventail dans
les flammes.
    — ... Qu’est-ce que tu
racontes ?
    — Ce matin, il n’était plus
dans l’arbre. On avait coupé la corde.
    — Heita, tu sais que je t’ai
dit de ne pas raconter d’histoires !
    — C’est la vérité,
grand-mère, la vérité vraie. Tout le monde en parle.
    — Tu es absolument sûr ?
    — Oui, grand-mère. Et
là-haut, au temple, on cherche Otsū. Elle est partie, elle aussi. Tout le
monde court de tous les côtés en criant.
    L’effet visible de la nouvelle fut
haut en couleur. La face d’Osugi pâlit peu à peu tandis que les flammes de son
éventail en train de brûler passaient du rouge au bleu puis au violet. Bientôt,
son visage parut s’être vidé de tout son sang, au point que Heita recula de
frayeur.
    — Heita !
    — Oui ?
    — Cours aussi vite que tu
peux. Va immédiatement chercher ton papa. Puis descends chercher oncle Gon au
bord de la rivière ! Et vite !
    La voix d’Osugi chevrotait.
    Avant même que Heita n’atteignît
le portail, une foule marmonnante de villageois arrivait. Parmi eux se
trouvaient le gendre d’Osugi, l’oncle Gon, d’autres parents et un certain
nombre d’ouvriers agricoles.
    — Cette fille, Otsū, s’est
enfuie elle aussi, non ?
    — Et Takuan a disparu
également !
    — Drôlement louche, si tu
veux mon avis !
    — Ils étaient tous de mèche,
pour sûr.
    — Je me demande ce que va
faire la vieille. L’honneur de sa famille est en jeu !
    Le gendre et l’oncle Gon, portant
des lances héritées de leurs ancêtres, écarquillaient des yeux hébétés. Avant
de pouvoir faire quoi que ce fût il

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