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La polka des bâtards

La polka des bâtards

Titel: La polka des bâtards Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Stephen Wright
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Il s’interrompit pour pousser un soupir bégayant, et son corps
parut se dégonfler. « C’est une chose. Je ne peux pas mieux dire. C’est
une chose. Ceci est une chose, dit-il en désignant son sac de voyage ;
cela est une chose » – son alliance ternie ; « toi et moi,
nous sommes des choses. Et nous devrions tous nous contenter de la certitude
absolue de cette perception. » Il releva la tête, rencontra le regard
compatissant de Liberty. « Est-ce que cela a un sens, ce que je dis ?
    — Tempie n’est plus.
    — Je sais, je sais. Mais malgré sa défection et ce
malencontreux revers pour ma dialectique, mon œuvre peut se poursuivre. Mon
œuvre doit se poursuivre. Je ne me laisserai pas entraver. L’univers doit
m’offrir de meilleures conditions. Nous recommencerons, tout simplement, en
espérant » – l’ébauche d’un timide sourire lui chatouilla les lèvres –
« que ce sera sous un climat plus favorable. Bien ! » Il fit
claquer ses mains sur ses genoux et se leva. « L’heure est venue, je
crois, de rendre visite au capitaine. » D’une malle de voyage en acajou,
il extirpa une paire de pistolets d’argent et en tendit un à Liberty. « Je
m’occupe de Wallace. Toi, ouvre l’œil sur l’équipage. L’affaire risque d’être
un peu alambiqueuse et dangerositesque. »
    Liberty soupesa l’arme, en examina les nervures. « Vous
ne pensez tout de même pas que je vais vous aider à détourner illégalement ce
navire ?
    — Bien sûr que si. Pourquoi donc sommes-nous à
bord ? N’oublie pas que, malgré la confusion génétique qui fait rage en
ton sein, une moitié de toi est du pur Maury.
    — La moitié supérieure et non souillée ?
    — Tu as envers cette branche négligée de la famille des
devoirs et des obligations dont tu ne t’es pas encore acquitté.
    — Et vous, vous avez accumulé toute une vie de dettes
en compassion et en sens moral.
    — Tu es un gaillard bien pugnace, tout feu tout
flamme – qualité, note-le bien, que j’admire hautement. Ça me rappelle
moi. Quel soldat estimable tu as dû être ! Dis-moi, as-tu jamais tué un
seul… – je récuse, naturellement, le terme d’“ennemi”, alors disons
“adversaire” –… as-tu jamais tué un seul “adversaire” ?
    — C’est une question qui ne regarde que moi, ma
conscience et mon Dieu.
    — Si c’était le cas, tu sais, le macchabée rebelle
était peut-être bien ton oncle.
    — Et cet oncle hypothétique aurait tout aussi bien pu
tuer un hypothétique neveu.
    — Alors, je vais te poser une autre question. Tu as
déserté ta propre armée quand les circonstances t’arrangeaient, alors que tu
n’as jamais tenté une seule fois de fuir ma compagnie, laquelle pourtant, je
l’admets à regret, manque souvent d’une certaine qualité tactile et calorifique.
Pourquoi ?
    — Même le plus borné des rustauds conclurait aussitôt
qu’un prodige tel que vous a sacrément besoin qu’on garde un œil dessus.
    — Dans ce cas », répondit Maury, gloussant comme
un perroquet – la première marque d’amusement authentique que Liberty eût
jamais entendue dans sa bouche –, « nous avons trouvé un terrain
d’entente. Liberty, je t’aime bien. Oh, je sais qu’un tel sentiment, exprimé si
tard par la langue fourchue d’un vieux dépravé cornu tel que moi, alors même
qu’une fois de plus il brandit une arme sous ton nez, pourrait être taxé
d’hypocrisie, voire d’imposture, mais rappelle-toi qu’à notre première
rencontre nous étions l’un pour l’autre des étrangers, séparés par une
barrière. Il nous fallait du temps et de l’espace pour nous jauger, nous
flairer mutuellement.
    — J’ai donc réussi le test ?
    — Aussi brillamment qu’un avocat de Philadelphie. Ce
qui te donne le droit absolu de pratiquer toutes sortes de magie noire et de
folies héroïques. Voici l’occasion pour toi d’agir en vrai Confédéré, de
satisfaire ton côté rebelle. Je sais qu’il existe. J’ai vu notre cher drapeau
sudiste claquer au vent derrière ton regard bleu furieux. Tu es prêt, je suis
prêt, l’instant est prêt. Wallace sera sur la passerelle. Si tu empêches les
matelots d’entrer…
    — Non, Grand-père, je suis désolé, mais je ne peux pas,
dit Liberty en lui rendant le pistolet. À vrai dire, je compte avertir le
capitaine de votre complot insensé.
    — Tu me déçois, Liberty, tu me déçois
grandement. »
    Il sentit

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