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La Régente noire

Titel: La Régente noire Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Franck Ferrand
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qu’il arrivait chez le grand sénéchal, Gautier se sentait pris de vertiges. Il avait prié ardemment pour que Françoise fût, cette fois, auprès de ses maîtres, et qu’il pût la voir. Mais quand bien même, lui réserverait-elle un accueil digne de leur amour ? Neuf mois s’étaient écoulés depuis leurs adieux ; or elle n’avait pris la peine de répondre à aucune des missives qu’il avait jointes, pour elle, au courrier des Brézé. Se pouvait-il qu’elle eût oublié celui qu’elle regardait comme le bonheur de sa vie, ou qu’elle l’eût abandonné pour un autre ? Cette idée remuait en Gautier des émotions violentes, bien pires que celle suscitées en lui par des semaines de campagne en Italie.
    Cette fois, l’écuyer se fit annoncer d’entrée chez Louis de Brézé. Il serrait contre lui le précieux rouleau confié à ses soins par Montmorency. C’est à Gênes que le maréchal, en route pour l’Espagne à la suite du roi captif, lui avait remis ce pli d’importance. Or, il avait fallu deux semaines pour l’acheminer à bon port.

    Penchée à l’une des fenêtres de la tour, la grande sénéchale avait tenté d’apercevoir les dégâts causés par le vent aux toitures du voisinage. Elle s’apprêtait à rentrer le buste lorsque, incidemment, son regard accrocha, près des écuries, la silhouette de Coisay. Son sang ne fit qu’un tour. Car à plusieurs reprises depuis la semonce de la régente, Diane avait détourné des lettres de l’écuyer, destinées à sa jeune amie. À aucun prix celle-ci ne devait l’apprendre ; une brouille entre les amants devait intervenir avant.
    — Mademoiselle, lança Diane en entrant chez Françoise, je dois vous parler de choses sérieuses.
    La jeune fille, émergeant d’un travail de filage, reposa tranquillement sa quenouille. Diane de Brézé paraissait nerveuse ; elle avait adopté cet air de hauteur qui, chez elle, visait le plus souvent à camoufler une gêne.
    — Françoise, m’êtes-vous bien dévouée ?
    — Comment pouvez-vous en douter ?
    — Chère Françoise ! Soyez tranquille : je sais que vous ne ferez rien qui puisse me contrarier.
    — Mais à quel sujet ?
    — Au sujet d’une promesse que j’ai faite à la régente. Je compte sur vous pour m’aider à la tenir.
    La jeune fille fronça les sourcils dans l’attitude de celle qui ne comprend que trop où l’on veut l’amener.
    — Et de quel engagement parlez-vous ?
    — Eh bien... Comment vous dire cela ? Vous vous rappelez, n’est-ce pas, les ordres qu’a donnés Madame, à Blois, concernant cette liaison légère que vous aviez nouée avec...
    — Je ne vois aucune légèreté à...
    — Laissez-moi juge de ce qui est, ou non, léger. Il se trouve que la mère du roi n’oublie pas vos liens de parenté avec la famille royale ; et qu’elle est dès lors soucieuse de votre rang.
    — Madame, j’ai promis à Gautier de Coisay de devenir son épouse. Il est chevalier d’authentique noblesse et...
    — Crotté, luthérien, imprésentable !
    — Madame !
    — Mademoiselle, que vous le vouliez ou non, je vous somme de renoncer à cette coquetterie...
    — Coquetterie ?
    — ... coquetterie ridicule et qui n’a que trop duré !
    — J’aime Gautier de Coisay.
    — Qu’en savez-vous ? Et même si cela était, ne le conduisez pas à sa perte !
    — À sa perte ?
    — À sa perte ! Qu’est-ce que vous croyez ? Insensée que vous êtes ! Dites-vous que, si vous vous obstinez bêtement, c’est à Coisay que la régente s’en prendra. Vous serez bien avancée !
    — Mais quel mal pourrait-elle...
    — Les moyens lui sont aisés ; les occasions, innombrables.
    — Mais que lui a-t-il fait ?
    — Faut-il que je le redise ? Il n’est ni bien né, ni bon chrétien.
    Françoise de Longwy demeura bouche bée, les pupilles dilatées par l’effroi.
    Un valet passa la tête pour annoncer que le grand sénéchal attendait son épouse dans la salle des cartes.
    — J’y vais de ce pas, répondit Diane.
    Avant de sortir, elle s’approcha toutefois de sa demoiselle de compagnie.
    — Françoise, écoutez-moi : si jamais Madame venait à savoir que vous avez conservé le plus petit lien avec cet écuyer, je puis vous affirmer que de grands dangers planeraient sur sa tête. Et vous seriez responsable de la mort, peut-être, de ce qui vous est si cher.
    — Oh, madame, que dois-je faire ?
    — Voyez M. de Coisay. Soyez froide et cassante. Ne lui laissez

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