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La reine de Saba

La reine de Saba

Titel: La reine de Saba Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Halter,Marek
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bâton et le retint.
    — Sois
vigilant, Tan’Amar. Shobwa veut nous enfermer dans le palais en attendant que
les armées des mukaribs de Kamna et Kharibat parviennent sous les murailles.
Seul, il n’aura pas le courage de t’affronter de face ni ne fera donner sa
garnison : les hommes n’oseraient pas lever une dague contre nous. Ils se
contenteraient de nous tourner le dos. Mais Shobwa sait comment rendre le
peuple furieux avec quelques mensonges.
    — Ça
ne marchera jamais. Le peuple de Maryab aime Akébo. Il n’a pas à se plaindre de
nous. Pourquoi se révolterait-il ?
    — Détrompe-toi,
mon garçon : le peuple n’aime jamais les puissants. Il les craint trop. Il
se tait et se soumet à la peur. Il va où souffle le vent. Shobwa fait courir de
mauvaises rumeurs. Les mukaribs menacent Maryab d’une colère du serpent Arwé.
Je connais leurs pratiques. S’il le faut, ils saboteront les digues et
assécheront les champs en accusant Almaqah et Akébo ! Quand il s’agit de
mentir, Shobwa est un dieu.
    — Shobwa !
soupira Tan’Amar avec colère. Je fais la promesse devant toi, maître
Himyam : un jour viendra où je lui couperai le souffle. Même si je dois
revenir des bords du Nil pour ça !
     

6
Maryab, palais Salhîm
    Incapable
de rester sur sa couche, Akébo le Grand se leva. Un large croissant de lune
surgissait au-dessus des montagnes. Sa lueur blafarde se répandait sur la
terrasse.
    Akébo
jugea qu’il restait à peine trois heures avant l’aube. Les meilleures heures
pour lancer une attaque. Si Shobwa en avait l’intelligence et le courage.
    Mais il
doutait que les choses se passent ainsi.
    Il n’avait
pas dormi de la nuit, guettant les bruissements de l’obscurité d’une oreille distraite.
Non qu’il eût la moindre crainte. Tan’Amar veillait. C’était comme s’il
veillait en personne.
    Le regret
et la colère contre lui-même le maintenaient éveillé. Il avait désormais la
certitude que c’était sa dernière nuit à Maryab et qu’il ne tuerait pas le
taureau dans le temple de Bilqîs.
    Malgré la
beauté de la ville et de la plaine, abandonner Maryab lui était indifférent. Le
monde possédait plus de richesses et de splendeurs que l’imagination des hommes
pouvait en concevoir. Mais après tant d’efforts pour ériger le temple dédié à
son épouse défunte et éternellement bien-aimée, qu’il ne puisse y consacrer le
nom de Bilqîs par l’offrande du taureau l’emplissait de tristesse, de rage et
de honte.
    Il
contemplait les étoiles d’Almaqah, deux diamants scintillants tout près de la
pointe du croissant. Toutes proches mais encore si loin ! Deux jours et
une nuit ! Deux jours avant qu’elles n’atteignent leurs places sacrées de
part et d’autre de l’orbe de la lune. Deux jours de paix que les mukaribs de
Kamna et Kharibat et leur valet Shobwa ne lui accorderaient pas.
    Himyam
avait raison une fois de plus. Il s’était laissé bercer par sa confiance. Il
avait cru qu’il assurait au peuple de Maryab assez de prospérité et de sécurité
pour que la jalousie des clans du Nord ne corrompe pas les esprits ni ne ruine
la paix. Il avait méprisé les sourires répugnants de Shobwa. Il s’était cru
fort et inatteignable ! Une faute impardonnable lorsqu’elle venait d’un
roi si fier de sa sagesse !
    Almaqah
lui infligeait une rude leçon.
    Lui qui
s’enorgueillissait d’élever Makéda par son exemple ! Il osait à peine
imaginer la rage, la déception de sa fille qu’il allait devoir affronter.
    Un instant
encore, Akébo fixa la progression de la lune. Elle blanchissait de plus en plus
la terrasse, comme si elle la recouvrait de la pâleur des morts.
    Il se
détourna brutalement. En simple pagne il marcha jusqu’à la chambre de Makéda.
Les serviteurs somnolant se réveillèrent sur son passage, engourdis et ne
sachant s’ils devaient le suivre. Parvenu sur le seuil, il s’immobilisa. Des
contrevents ajourés maintenaient une dense obscurité dans la pièce, cependant
on pouvait deviner les longs voiles qui protégeaient la couche des insectes.
    Au fond de
la pièce, à peine visible, Akébo discerna les contours du second lit. La tache
claire de la tunique de Kirisha bougea. Elle ne dormait pas. Elle avait perçu
sa présence. En silence, elle fut debout et le rejoignit.
    — Ta
fille dort, seigneur.
    Elle
chuchotait. Il répondit sur le même ton :
    — Tu
vas devoir la réveiller. Nous quitterons Maryab avant le

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