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La reine de Saba

La reine de Saba

Titel: La reine de Saba Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Halter,Marek
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maître que Tan’Amar lui-même. Chacun conscient que leur mort, si
elle était offerte pour la vie d’Akébo leur seigneur, ne serait que l’assurance
d’entrer dans l’éternité d’Almaqah.
    Guettant
chaque bruit tel un chasseur à l’affût, Tan’Amar allait d’une terrasse à
l’autre. Des torches et des cuves de bitume en feu éclairaient les murs et les
passages les plus importants. La grande porte du palais était illuminée d’un
rougeoiement intense. Tan’Amar s’y trouvait sur le chemin de ronde. Il quittait
le halo de lumière dansante lorsque la voix d’Himyam le surprit.
    — Rien
avant l’aube, Tan’Amar. C’est toujours leur tactique. Sois patient.
    Le vieux
sage se tenait dans l’obscurité, sa silhouette plus chétive qu’en plein jour et
son visage tout à fait invisible.
    — Maître
Himyam !
    — Les
clans du Nord ne s’en prendront jamais à nous la nuit. Je ne vois pas plus ton
visage que tu ne vois le mien. Dans l’obscurité, leurs yeux de serpent auraient
trop peur de nous perdre.
    Le vieux
sage eut un petit rire, presque silencieux. La moquerie aurait pu tirer un
sourire à Tan’Amar. Il savait qu’Himyam avait raison. Mais l’inquiétude le
portait au sérieux.
    Ils se
turent et écoutèrent le silence. De temps à autre on percevait le frottement
des sandales des gardes. Ou le choc d’une lance, d’un fourreau d’épée,
résonnait contre la pierre.
    Himyam
reprit soudainement la parole :
    — Tu
te demandes comment notre seigneur a pu se laisser trahir par Shobwa et les
clans du Nord.
    C’était à
peine une question. Tan’Amar se douta que le vieil homme était venu sur le
chemin de ronde pour parler de cela. Il fut heureux de pouvoir libérer les mots
qui lui pesaient sur la poitrine depuis trop d’heures.
    — Shobwa
pue la trahison depuis qu’il est né. Le seigneur Akébo le sait mieux que nous.
Comme nous savons que les mukaribs de Kamna et Kharibat nous jalousent un peu
plus à chaque saison. Mais on a tout de même laissé à Shobwa la main sur la
garnison de Maryab.
    Dans le
noir, Himyam esquissa un de ses sourires grimaçants. Tan’Amar prenait soin de
dire « on ». S’incluant dans la faute.
    — La
réponse est : Akébo a rusé avec les puissants du Nord, puis il s’est
endormi sur sa ruse. Voici trop longtemps qu’il ne pense qu’à Bilqîs et à sa
fille. Nous le savons aussi. Il a laissé le temps au serpent de s’éveiller.
    — Cela
n’a pas l’air de t’étonner, ni de te peiner beaucoup.
    — La
vie d’un homme, même d’un homme sous la paume d’Almaqah comme notre maître,
contient un temps pour tout. Un temps pour vaincre, un temps pour vivre de sa
victoire. Akébo a usé des deux. Il est parti des bords du Nil et nous a
conduits ici, dans la myrrhe et l’encens. Maintenant est venu le temps d’un
autre festin.
    Tan’Amar
secoua la tête en grommelant.
    — Si
tu crois que ce qui nous attend va être un festin ! Il s’approcha du mur
tandis que, dessous, les gardes échangeaient leurs places, comme ils en avaient
la consigne, afin de ne pas se laisser engourdir par la fatigue. Comme le vieux
sage demeurait silencieux, Tan’Amar gronda encore :
    — Tu
parles par énigmes pour moi, maître Himyam. Tu m’expliques et je comprends
encore moins.
    La voix
d’Himyam ne fut qu’un murmure :
    — Tu
es un bon guerrier, ami Tan’Amar. Lui, il est un roi. Ce que tu ne comprends
pas, c’est la sagesse de notre seigneur Akébo.
    — Que
veux-tu dire ?
    — Qu’il
se moque aujourd’hui de la richesse de Maryab. Son royaume de Saba ne se réduit
pas à cette ville et à cette plaine. Il s’étend de l’autre côté de la mer
Pourpre. Les clans du Nord ne menacent que Maryab. Verser le sang pour ces murs
n’engendrera aucun futur. Le seigneur Akébo veut transmettre sa puissance à sa
fille Makéda. Elle n’a pas sept années. Il ne veut pas la mettre en danger et
doit montrer plus de patience que le serpent.
    Tan’Amar
soupira, prit son temps pour lâcher :
    — Ce
que je comprends, c’est que nous ne combattrons pas mais que nous fuirons
Maryab comme des pleutres.
    — Ne
t’aveugle pas sur la gloire que tu tirerais à combattre la vanité des puissants
du Nord.
    Tan’Amar
préféra se taire. Il n’avait plus envie d’entendre Himyam. Mieux valait
reprendre ses rondes et passer sa mauvaise humeur sur les ombres de la nuit.
    Il fit un
mouvement pour s’éloigner, mais Himyam dressa son

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