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La reine de Saba

La reine de Saba

Titel: La reine de Saba Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Halter,Marek
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Makéda.
    — Je
me doutais bien que tu viendrais me chercher, répliqua la fillette sans se
laisser impressionner.
    — C’est
donc que tu savais que tu étais en faute.
    — Ou
qu’il n’est pas bien difficile de deviner ce que tu vas faire.
    Akébo ne
put retenir un rire où perçait toute sa fierté pour sa fille. Himyam se
contenta de hocher la tête, le visage tranché par cette grimace qui pouvait
tout aussi bien être un sourire qu’une menace.
    Makéda se
détournait déjà. Elle glissa sa main dans celle de Kirisha. Elle lui sourit
gentiment, l’entraîna vers la terrasse, disant :
    — Aujourd’hui,
tu es la plus belle des femmes de Saba, Kirisha. Et moi, j’ai réfléchi :
je sais quelle tunique je veux mettre pour te ressembler.
     

2
Maryab, palais Salhîm
    Akébo et
Himyam regardèrent en silence disparaître Makéda et la jeune concubine. D’un
signe, Akébo ordonna aux serviteurs de vaquer à leurs tâches. Alors qu’ils se
dispersaient après un profond salut, Himyam remarqua :
    — Ta
fille est intelligente. Elle ouvre les yeux plus que toi, seigneur.
    — Que
veux-tu dire ?
    — Tu
ne vois qu’elle, par le regard comme par le cœur.
    — Où
est le mal ? Elle le mérite.
    — Le
monde est plus vaste que tes sentiments, et si tu n’y prends garde il se
refermera sur toi.
    Akébo
secoua la tête avec un brin d’agacement. Deux serviteurs s’approchaient avec
des vêtements. Sans façon, Akébo ôta son manteau de laine. Il apparut nu, un
simple pagne serré d’une corde lui couvrant les reins.
    — De
quoi veux-tu me convaincre que je ne sais déjà, Himyam ? demanda-t-il
après avoir enfilé une tunique souple, rayée de bleu et d’or.
    — Que
le temps va plus vite que ta volonté.
    — Ah ?
    Himyam eut
un regard pour la maquette.
    — Deux
nuits et trois jours avant que tu puisses déposer tes offrandes dans le nouveau
temple. C’est assez pour que rien n’advienne comme prévu, si tu t’obstines.
    Le visage
d’Akébo se referma. Sans répondre, il attrapa la cotte de cuir aussi souple
qu’une peau d’enfant qu’on lui tendait. Il l’endossa, ceignit une large
ceinture à passementerie d’argent, agrafée à un baudrier. Le manche d’or, large
et plat, d’une dague à double tranchant dépassait.
    Toujours
silencieux, il congédia les serviteurs, refusant le plateau de boissons et de
nourritures que des femmes apportaient. Effleurant l’enceinte de terre cuite de
sa main mutilée, il fit le tour de la maquette comme s’il voulait en tirer les
mots dont il avait besoin. Son corps de guerrier était si tendu que cela était
palpable dans l’air.
    Himyam
évita de porter les yeux sur lui et referma les mains sur le large pommeau
d’argent de son bâton.
    — Avec
cette cérémonie, ton deuil de Bilqîs s’achèvera…
    — Tu
sais qu’il ne s’achèvera jamais.
    — Celui
de l’homme, peut-être pas. Mais après six années, le deuil du roi de Saba est
clos. Il est temps pour toi d’accueillir une nouvelle épouse dans ta couche,
seigneur Akébo.
    Akébo
soupira.
    — Makéda
a raison. Parfois tu es très prévisible, grand muka d’Almaqah.
    — Est-ce
pour autant que j’ai tort ?
    — Himyam,
je n’ai pas besoin d’enfanter un fils, pas plus demain qu’hier. Makéda me
suffit pour descendance. Pour moi et pour le peuple de Saba, elle sera fille et
fils, princesse et prince. Et reine et roi à l’heure venue. Ainsi en ai-je
décidé.
    — Et
moi, je maintiens que tu t’aveugles. Ton cœur est trop plein de Bilqîs et de ta
fille. Tu es roi, grand Akébo, mais tu es aussi, comme nous tous, progéniture
d’Almaqah. Tu lui dois ce que tu lui dois.
    — Oserais-tu
dire que je suis en dette envers mon dieu ?
    Akébo
avait grondé, fronçant les sourcils. La colère pinçait ses lèvres. Himyam
demeura imperturbable. Akébo prit sur lui pour poursuivre calmement :
    — Laisse-moi
tuer le taureau dans l’enceinte sacrée et faire mon offrande. Ensuite, nous en
reparlerons. D’ici là, je n’ai qu’une épouse dans mes pensées.
    Himyam
secoua la tête. Le sourire grimaçant plissait ses joues aux poils épars.
    — Il
y a aussi une ruse qui s’épuise.
    — Que
veux-tu dire ?
    — Almaqah
ne t’offre pas ce temps. Les mukaribs de Kamna et Kharibat ne doutent plus que
tu les as trompés. Leur sottise a beau être grande, elle ne les aveugle plus.
Ils ont compris que tu entrerais dans le temple de Bilqîs la main dans la

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