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La reine de Saba

La reine de Saba

Titel: La reine de Saba Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Halter,Marek
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main
avec ta fille et non avec Kirisha, ta future épouse.
    — Kirisha !
    — Kirisha,
petite-fille du seigneur de Kamna, qui fréquente ta couche depuis deux ans et
s’entend à merveille avec ta fille. Ce qui n’est pas rien. Makéda vient de la
déclarer la plus belle femme de Saba. Si elle devient ton épouse et enfante le
fils d’Akébo le Grand, les clans du Nord auront l’assurance que leur sang
d’hommes à peau claire se mêlera à ton sang d’homme noir… Comme ta richesse à
la leur.
    — Je
n’ai jamais rien promis aux clans du Nord. Himyam opina avec un rire sec.
    — C’est
vrai. Tu as seulement laissé filer les rumeurs. Mais une fois devant l’auge,
même les ânes savent reconnaître le son coupé de poussière. Les seigneurs de
Kamna et les mukaribs ne doutent plus de tes intentions véritables. Tu vas tuer
le taureau de Bilqîs pour faire de ta fille la future reine de Saba. Kirisha ne
sera jamais ta seconde épouse.
    — Nous
parlerons, grogna Akébo avec un haussement d’épaules. Ils ne veulent pas mon
sang, seulement la richesse de Maryab. Et ce sont des pleutres.
    — Ne
sois donc pas si sûr de toi !
    La
sécheresse du ton d’Himyam sembla vider Akébo de sa colère. Ses paupières se
fermèrent à demi tandis qu’il affrontait les pupilles sombres du vieux sage.
    — Que
sais-tu ?
    — Ils
ont réussi leur grande alliance. Le seigneur d’Al-Lisan se joint à eux. C’est
tout le nord de Saba qui se lie contre toi. Les vieilles haines les
unissent : contre la couleur de notre peau et nos ancêtres du Nil ;
contre Almaqah, notre Puissant. Ils veulent dresser leur dieu serpent, Arwé à
la langue fourbe, sur la plaine de Saba. Ils jugent que c’est l’heure.
    — Ils
se trompent : il est trop tard. Je n’ai pas attendu tes conseils. Les
routes de Maryab sont gardées. En trois jours, ils ne peuvent ni forcer la
ville ni atteindre le temple. Leur armée est faible, sans entraînement. Le
taureau mort et les offrandes dans le sanctuaire…
    Himyam frappa
durement son bâton sur le sol, coupant la parole d’Akébo sans plus de
politesse. Le regard intense, il s’approcha de son roi à le toucher, chuchotant
avec force :
    — Écoute-moi
donc ! Les clans du Nord ont envoyé des hommes dans la ville. Depuis des
jours. Peut-être depuis plus d’une lune. Certains ont travaillé au chantier du
temple. En racontant discrètement la même histoire à qui voulait
l’entendre : la mort de ton épouse Bilqîs était une punition d’Almaqah.
Une punition dont tu ne tiens aucun compte. Et ce sanctuaire est une
provocation. Almaqah va déchaîner sa colère sur Maryab. Ils rappellent aussi
que ta lignée vient de l’autre côté de la grande mer, du pays de Kouch. Tu n’es
qu’un usurpateur qui va attirer le malheur sur Maryab !
    — Ce
sont les pires mensonges qu’on puisse entendre !
    — Et
alors ? Un mensonge bien tourné n’est-il pas plus convaincant qu’une
vérité ? Tes ennemis agitent la peur. Connais-tu un meilleur moyen pour
dresser un peuple contre son seigneur ?
    — Comment
l’as-tu appris ?
    Le sourire
d’Himyam découvrit ses mauvaises dents.
    — J’ai
des oreilles où il le faut, murmura-t-il. Akébo le toisa un instant. On ne
savait ce qui le contrariait le plus, de découvrir que son fidèle conseiller en
connaissait plus que lui sur les pensées de son peuple ou de la nouvelle qu’il
apprenait.
    Himyam ne
le laissa pas songer trop longtemps.
    — Tu
peux encore retourner les choses à ton avantage. Autrement que par les armes et
le sang.
    Akébo
haussa un sourcil interrogateur.
    — Seigneur,
avec tout le respect que je te dois, je te demande de peser mes mots. Que cela
te plaise ou non, contre les clans alliés, tu es faible. S’ils parviennent à
soulever le peuple contre toi, tu le seras cent fois plus. Tu pourras te
battre, longtemps sans doute, mais sans vaincre. Tu seras seul contre eux tous.
Tu répandras le sang sans pouvoir en tirer la puissance qui assure un règne. Et
si tu y perds la vie, c’en sera fini de ta fille : elle ne sera que la
princesse du malheur de Saba.
    — Je
vois où tu veux me conduire.
    — Et
pourquoi non ? Montre-toi plus serpent qu’Arwé. Déclare aujourd’hui que
Kirisha, fille du seigneur de Kamna, devient ton épouse, seconde après Bilqîs
la bien-aimée. Elle t’a été offerte par son clan : ils ne peuvent plus
rien y redire. Fais savoir que tu entreras dans le sanctuaire de

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