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La Religion

La Religion

Titel: La Religion Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Collectif
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d’elle ? Ou Amparo n’avait-elle plus besoin qu’ils la guident parce qu’elle était amoureuse ?
    Tannhauser était parti chez les impies, quelque part au-delà des murs monstrueux qui les enfermaient tous à l’intérieur et la faisaient se sentir piégée. Sans lui, ni Buraq, pour emplir les heures, la journée avait passé lentement. L’intendant l’avait réprimandée parce qu’elle gaspillait de l’eau pour ses fleurs et elle n’avait plus grand-chose à faire que de les regarder mourir. Au coucher du soleil, Tannhauser n’était pas revenu. Fatiguée d’attente et d’inquiétude, elle avait erré sur le front de mer pour boire le silence. Le silence avait complètement disparu de cette ville. Le canon secouait la terre de l’aube au crépuscule. Venus de l’infirmerie, des cris incessants lui perçaient l’échine. Des hommes criaient ou marmonnaient des prières. Fouets, sifflets et jurons menaient les équipes d’ouvriers et de pauvres épaves enchaînées, qui, dans cette cité de hauts murs sans fin, étaient contraints d’en construire encore et encore. À l’auberge, Carla broyait du noir car elle ne parvenait pas à trouver son fils. Peut-être, même si elle ne l’avait pas dit, Carla était-elle également abattue parce que Tannhauser avait pris Amparo pour amoureuse.
    En ce qui concernait le garçon inconnu, Amparo ne ressentait pas grand-chose. C’était une quête qui exigeait de relier des événements morts depuis longtemps à un futur qui n’existait pas, et cette énigme la déroutait. Son imagination ne s’étendait qu’à quelques heures avant ou après le moment présent. Demain était très loin et hier avait déjà disparu. L’ambition était un mystère et ses souvenirs étaient rares. Elle espérait qu’ils trouvent le garçon, car cela rendrait Carla heureuse. Jusqu’à ce que Carla apparaisse un jour dans les saules, comme un ange sorti de son tube divinatoire, la vie d’Amparo se résumait à tout subir. Depuis, son existence avait été semée d’émerveillement et de beauté. Amparo aimait Carla. Mais la recherche du garçon était une entreprise à laquelle elle se sentait étrangère.
    Quant à Tannhauser, elle l’aimait d’une passion sauvage et terrible, qui la secouait dans son sang, au tréfonds d’elle-même, jusque dans son cœur et son âme. Elle l’avait aimé du jour où il lui avait raconté l’histoire du rossignol et de la rose. La rose rouge qui avait tué celui qui l’adorait. Du bazar turc, Tannhauser lui avait rapporté les chaussons de cuir jaune qu’elle portait maintenant. Il lui avait ramené le peigne d’ivoire, enchâssé d’argent et d’arabesques florales, qu’elle portait dans ses cheveux en bataille. Il l’avait fait gémir dans la nuit quand elle était allongée sous lui. Il l’avait fait pleurer, la tête posée sur sa poitrine tandis qu’il dormait, et qu’elle avait peur qu’il meure. Amparo se savait différente de toutes les autres femmes. Comment ou pourquoi, elle ne pouvait pas l’expliquer, mais il en avait toujours été ainsi. Elle pensait qu’elle avait connu le sexe. Il avait toujours été présent autour d’elle. Dans le rut des taureaux que son père élevait. Dans les masures sordides qu’elle avait partagées au cours de ses errances. Dans les rues encombrées et violentes de Barcelone. Dans la figure du marchand de sucreries qui lui avait défoncé le visage à coups de pied. Dans les garçons de ferme qui riaient en la maintenant par terre et qui, après, lui pissaient dessus. Mais dans le monde qu’elle avait partagé avec Carla, monde de musique, de chevaux et de paix, de telles choses n’existaient pas, n’étaient jamais évoquées, si totalement exclues qu’au début Amparo avait trouvé cela étrange. Dix ans avaient passé et elle les avait oubliées, et, pour elle, de même que pour Carla, le sexe était devenu un mystère négligé et inconnu. Et puis elle avait vu Tannhauser nu. Son cœur s’était presque arrêté de battre en découvrant les dessins, les roues, les croissants de lune et la dague rouge fourchue avec la poignée en tête de dragon dont ses bras, ses mollets et ses cuisses étaient bravement tatoués. Il était vraiment l’homme qu’elle avait vu dans son instrument divinatoire. Elle lui avait montré sa propre nudité, avec une joie sauvage et sans honte, et elle s’était donnée à lui, et il l’avait prise.
    Tannhauser et Carla se

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