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La Religion

La Religion

Titel: La Religion Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Collectif
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plus chrétien, une livre d’opium iranien pourrait bien réussir à trouver son chemin jusqu’à votre apothicaire. Peut-être même deux ? »
    Lazaro cligna des yeux, à présent complètement perturbé. « Vous détenez de l’opium en réserve ? Alors que l’hôpital déborde de blessés graves ? »
    Bors songea à la grosse réserve cachée sous la barrique d’eau. Mattias feignit un sourire triste.
    « J’ai peut-être mérité la piètre estime en laquelle vous me tenez, père Lazaro, même si nous étions des étrangers jusqu’à aujourd’hui. Mais mettre de l’opium en réserve ! »
    Lazaro battit en retraite. « Peut-être les plaintes de mes patients ont-elles provoqué une conclusion quelque peu hâtive…
    – Néanmoins, continua Tannhauser levant les paumes pour l’arrêter, en prenant un grand risque personnel, et à un prix considérable, je pourrais acquérir ladite drogue pour vous au bazar turc. »
    Saisi de repentir, Lazaro lui prit la main. « Pardonnez-moi, capitaine, je vous en supplie. »
    Mattias inclina la tête avec un geste gracieux. « Dame Carla sera très honorée d’accepter votre invitation. »
    Le visage de Lazaro se rida d’inquiétude. « Mais dame Carla sera-t-elle assez forte pour un travail aussi lugubre ? » De la tête, Lazaro désigna l’escalier qui menait au cloître des hospitaliers. « On voit des choses, là-dedans, qui retourneraient l’estomac le plus solide, et briseraient le cœur le plus vaillant.
    – La comtesse a un cœur d’or. Mais si son estomac est trop faible, alors votre fierté sera justifiée, et la sienne justement châtiée. Vous la trouverez, avec sa compagne, à l’auberge d’Angleterre.
    – Sa compagne ?
    – Amparo. Si ce sont des ragots vulgaires que vous cherchez, c’est elle la femme avec qui je vis dans le péché. » Lazaro cligna des yeux. Mattias fit le signe de croix. « Dominus vobiscum » , dit-il.
    Et ils s’éloignèrent.
    Dominus vobiscum , songea Bors. Donner sa bénédiction à un prêtre ! Seule une parfaite ignorance des bonnes manières pouvait expliquer un tel culot. Mais l’ignorance jouait un rôle minuscule dans tout ce que faisait Mattias.
     
    LE CHÂTEAU SAINT-ANGE se dressait au-dessus du Grand Port comme une énorme ziggourat flottante, ses murs à pic descendant en gradins de grès jusqu’au bord de l’eau. Du toit de Saint-Ange, la vue du fort Saint-Elme, de l’autre côté du Grand Port, était inégalée, et comme ils escaladaient le dernier escalier de pierre, le cœur de Bors tapait fort, mais pas seulement de fatigue. Il avait été invité dans la loge impériale, et même Néron n’avait jamais disposé d’un cirque aussi spectaculaire que celui-ci.
    Ils émergèrent dans le soleil aveuglant, juste à temps pour être rendu à moitié sourd par une salve du cavalier de Saint-Ange. La grande plateforme d’artillerie, dont les poutres tremblaient et grinçaient sous la force de la détonation, avait été remodelée pour fournir un meilleur poste de tir sur les positions turques. Des jets de fumée filaient au-dessus des eaux cristallines tout en bas, et Bors mit sa main en visière pour observer les artilleurs. Ils se jetaient sur les seize livres comme sur de dangereux animaux à entraver. Ils étaient torse nu alors que l’air était encore frais, leurs bouches grandes ouvertes, cherchant l’air dans les vapeurs sulfureuses, et chaque pouce de leur peau était peint d’un noir de goudron par les relents de poudre et la graisse. Leurs haillons sales dégoulinaient de sueur et étaient tachetés d’ulcères dus aux brûlures qui faisaient partie du travail. Et tous autant qu’ils étaient, neuf par équipe, maudissaient Dieu et le diable, et leurs chères vieilles mères qui leur avaient donné vie en se battant avec les grandes bêtes de bronze pour les remettre en position, le blanc de leurs yeux strié de rouge et leurs visages couverts de suie, comme si c’était une commedia satanique, et qu’ils en étaient les ménestrels fous et démoniaques.
    « J’étais apprenti canonnier, quand j’avais neuf ans, dit Bors, dans l’armée du roi de Connaught. J’en porte encore les marques.
    – Oui, les commotions au cerveau peuvent durer une vie entière, approuva Mattias. »
    Bors éclata de rire. « Comme mon serment de ne plus jamais travailler dans l’artillerie. »
    Dans le haut ciel clair du matin, des douzaines de vautours aux

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