La Religion
Macédonien.
Tannhauser sourit. « Laisse-moi t’embrasser. »
Nicodemus s’approcha et Tannhauser le serra contre sa poitrine. « Maintenant, va me sortir Bors de son trou. » Il le laissa aller. « Et prépare quelque chose de savoureux pour les femmes quand je serai parti. Elles mangent comme des moineaux. » Nicodemus commençait à partir quand Tannhauser l’arrêta. « Nicodemus. Tu as effacé mes soucis. »
Le visage du jeune homme s’illumina d’un sourire. Il s’inclina et sortit. Tannhauser s’approcha de la porte et le soleil fit naître des rayons éclatants du bracelet. Seul l’or ressemblait à de l’or et faisait l’effet de l’or. Tout le reste était enclin à décevoir, et c’était pour cela que les hommes l’aimaient. Il perçut un léger tremblement sous les semelles de ses bottes quand le son d’une douzaine d’explosions atteignit l’auberge. Les canons de siège avaient ouvert le feu depuis les pentes du mont Sciberras. Un autre jour venait de commencer pour le fort Saint-Elme.
1 . En français dans le texte.
2 . Vent froid et fort du nord-est soufflant sur la Méditerranée centrale et
occidentale, particulièrement près de Malte.
VENDREDI 8 JUIN 1565
Piazza de l’hôpital, château Saint-Ange
BORS RAVALAIT SON mécontentement d’avoir raté un petit déjeuner chaud en engloutissant du pain et du fromage arrosé de vin, tandis qu’ils traversaient la ville.
« Les femmes me rendent fou », dit Mattias.
Bors feignit la surprise. « Qu’ont donc encore fait ces deux jeunes et tendres filles ? »
Mattias gonfla ses joues et soupira. « Il leur suffit de respirer, non ? » Il écarta ses paumes, comme pour se rendre victime de forces plus puissantes et plus astucieuses que lui. « J’ai l’une, mais je désire également l’autre.
– La comtesse ? fit Bors. Je l’aurais pensée trop hautaine pour toi.
– Elle engendre une fascination dont elle n’est même pas consciente.
– Eh bien, j’oserais dire que tu trouverais un accueil torride entre ses bras, si tu arrêtais de faire danser sa bonne amie et de t’abaisser. À la voir, on n’a pas attenté à sa pudeur depuis la naissance de son fils. Mais, bien sûr, elles sont bien plus habiles à dissimuler ces choses que nous.
– Si ce n’était qu’une question de désir, il n’y aurait pas autant de mystère. Mais j’ai de l’affection pour les deux.
– Attends, dit Bors, quand tout va bien, l’amour est un maquereau perfide.
– Je n’ai pas parlé d’amour.
– Discutons plutôt du nombre d’anges qui peuvent danser sur une tête d’épingle. »
Mattias dit : « Continue.
– En temps de guerre, l’amour agit comme une épidémie, poursuivit Bors. Des rivaux qui se haïssaient deviennent frères, la malveillance devient camaraderie solide, et de parfaits étrangers se serrent dans les bras. Regarde La Valette. Je parierais qu’il y a six mois n’importe lequel des chevaliers italiens ou espagnols aurait dansé la gigue de joie, si quelqu’un lui avait planté un couteau entre les omoplates. Du moins, c’est ce que j’ai entendu. Mais aujourd’hui, il marche sur l’eau. Pourquoi ? » Il s’arrêta pour ménager ses effets dramatiques. « Parce que l’amour est le cheval qui tire le brave chariot de la guerre. Sinon, pourquoi redemanderait-on à se battre ? Quant aux femmes, pendant la guerre, jamais leur chair n’est aussi douce, ni leurs vertus plus éclatantes, ni leur gentillesse plus bienvenue à nos âmes. » Il s’arrêta pour fixer Mattias droit dans les yeux. « Et jamais le trou entre leurs cuisses n’est un puits assez profond dans lequel se jeter. »
Mattias demeura silencieux un moment, réfléchissant à tout cela, et Bors se sentit gratifié. En temps normal, Mattias avait réponse à tout. « Alors, quel est ton conseil ? demanda-t-il.
– Mon conseil ? » Un rire bref s’échappa de la gorge de Bors. « Il y a une putain sous le vent de la crique des Galères que je peux te recommander chaudement, même si elle pèse à peu près aussi lourd que moi. Rien que la voir nue est déjà une merveille inoubliable.
– Ma question était sérieuse.
– Ma réponse également. Ici, le jeu consiste à rester vivant. Et être amoureux, ou livré au désir,est un sérieux handicap pour le joueur. » Il haussa les épaules. « Mais je gaspille mon souffle, car le jeu sans entraves
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