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La Revanche de Blanche

La Revanche de Blanche

Titel: La Revanche de Blanche Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Emmanuelle Boysson (de)
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Depuis la prestation de La Grange, elle me vomit, me couvre de billets infâmes. Sais-tu aussi qu’elle est la maîtresse cachée du roi sur qui elle exerce une influence néfaste ? J’imagine qu’elle a réussi à l’embobiner pour qu’il cède à ses désirs. Sache que son mariage n’a d’autre visée que de me détruire encore et toujours. Aussi, je t’en supplie, renonce à cette femme damnée qui te porte déjà malheur.
    Je t’attends, je t’aime, je ne pense qu’à toi.
    Ta Blanche.
    — Va, ordonne-t-elle à Blase en versant un peu de cire sur le dos de l’enveloppe et demande à monsieur de La Boissière une réponse par retour.
    Deux heures plus tard, Blase revient. Penaud, il rend sa lettre à Blanche :
    — Monsieur l’officier n’est pas chez lui. Le garde m’a dit qu’il serait absent jusqu’à la fin de l’été.
    Seule issue : convaincre le roi. Si, d’aventure, il ne cède pas, il faudra jeter la Bouillon avec l’eau du bain, se galvanise Blanche en balançant ses robes dans une malle.
     
    La chaleur est tombée. La voiture qui l’emporte à Saint-Germain roule sous un crachin, un avant-goût de l’automne. De la musique s’échappe du Château-Vieux. Lully donne un concert dans un salon. Blanche s’habille. Blase file aux cuisines. Assise près de la grotte de rocaille, Françoise Scarron reprise. La mine grise, elle scrute Blanche de ses yeux de putois :
    — Bonsoir, Blanche, vous semblez bien pressée…
    — Vous n’assistez pas au concert ?
    Françoise hoche la tête :
    — Je n’en ai pas le cœur. Nous nous sommes encore brouillées, Athénaïs et moi. Nos bouderies sont devenues quotidiennes. Il y a quelques jours, j’avais interdit à Louis-César de monter à cheval ; elle s’est entêtée : le petit est tombé sur ses épaules bossues.
    — Vous devriez en toucher un mot au roi.
    — J’en ai l’intention. Il s’est montré bon envers moi : il a triplé ma pension annuelle qui est passée à deux mille écus. Mais depuis que madame de Montespan le monte contre moi, il me fuit. J’ai décidé de quitter la Cour à la fin de l’année. Vous qui êtes l’amie d’Athénaïs, soyez gentille, tentez de la raisonner.
    Blanche fait mine d’accepter. Fulmine : la Scarron a plus du double de sa rente. Les hurlements du duc du Maine font sursauter les deux femmes. La gouvernante se précipite à son chevet, le prend dans ses bras. Secoué de spasmes, le petit se tord de douleur. Sa jambe craque, se déboîte. Françoise s’affole :
    — Je n’arrive pas à remettre son membre en place. Allez prévenir le roi. Vite, il nous faut un médecin.
    Blanche traverse le salon, bouscule des courtisans, se plante devant le roi, s’écrie en un souffle :
    — Majesté, le duc du Maine est en danger.
    Les violons s’arrêtent. Le roi ordonne à Colbert d’aller chercher des médecins. Athénaïs suit son amant. Louis-Auguste est plus calme. Lorsqu’elle découvre la jambe pendante de son fils, les yeux bleu ciel de la Montespan s’embuent. Le roi enlace sa blonde en larmes.
    — Je crains qu’il ne devienne boiteux, confie Françoise à Blanche. J’avais prévenu Athénaïs qu’il fallait faire venir la faculté plus tôt…
     
    Vers une heure du matin, Blanche s’endort en rêvant à Antoine. Il lui faut attendre trois jours pour pouvoir s’entretenir avec Athénaïs. Après un souper interminable : vingt-cinq plats, trente desserts, la favorite la rejoint. Pliée en deux, elle ordonne à Blanche de dégrafer sa robe.
    — Tout est de la faute de la Scarron. Elle a réussi à m’éloigner de mes enfants ; elle me rend folle. Figure-toi qu’elle est allée pleurnicher devant Louis. Louvois est chargé de tenter une réconciliation. Moi, une Rochechouart de Mortemart, m’abaisser à faire des excuses à une maraude : jamais !
    — Moi aussi, j’ai des ennuis. J’aime Antoine. J’en mourrai s’il épouse Aglaé, clame Blanche, mélodramatique.
    Après un silence gêné, Athénaïs soupire :
    — J’ignorais tes sentiments pour La Boissière. Ma pauvre chérie, décidément, tu n’as pas de veine.
    — Le roi ne t’a pas informée de cette mauvaise farce ? s’étonne Blanche.
    — Il me cache beaucoup de choses.
    — Si tu pouvais le convaincre de casser ces fiançailles… Je t’en prie, Athénaïs, fais-le pour moi.
    — Je vais y réfléchir. Louis se montre moins empressé. Comme toujours, pendant mes grossesses,

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