La Rose de Sang
corps à l'eau bienfaisante.
Quand
elle rouvrit les paupières, Fulvio était devant elle. Il la considérait avec
une expression qu'elle ne lui connaissait pas. Il regardait ce corps magnifique
avec une sorte de douleur où se mêlait le désir.
Résistant
à l'envie de la prendre dans ses bras, il détaillait ses seins en pomme et le
renflement doré de sa toison. Il avait envie d'y enfoncer sa bouche, de dévorer
sa peau nacrée. Il lui avait tout appris. C'était lui qui lui avait arraché ses
premiers frissons, jouissances et gémissements d'amour.
Avait-elle
offert tous ces trésors à d'autres ?
Les
sangs mêlés de Lombard et de Sicilien bouillonnaient dans ses veines. Des
éclairs passaient sous son crâne. Dans sa fureur jalouse, Fulvio serra les
poings pour se dominer.
— Fulvio..., murmura Zéphyrine.
Elle
avait mis les mains sur sa poitrine, mais ses yeux étaient un appel.
— Prenez garde, vous allez
prendre froid, lança Fulvio avant de tourner les talons.
— Soyez prudents ! zozota demoiselle Pluche.
En
d'autres circonstances, sa recommandation aurait amusé tout le monde. L'heure
n'était pas au rire. Chacun se rendait compte de la gravité de l'instant. En
voyant sa jeune maîtresse et le prince escalader les marches en direction de la
Cité perdue, la digne Arthémise se jeta sur l'épaule de Piccolo pour sangloter.
Il
avait été décidé que Pluche, trop épuisée, resterait avec l'écuyer dans la
grotte pour attendre le retour de Fulvio, Zéphyrine et leurs compagnons.
— Si nous ne sommes pas là dans trois jours, partez, Piccolo.
Tâchez de vous sauver, tentez de regagner Tumbez, puis la Castille d'or,
ordonna Fulvio.
L'ascension
était rude. Les marches taillées dans la pierre assez hautes.
— Neuf cent quatre-vingt-dix-huit... neuf cent
quatre-vingt-dix-neuf..., mille.
Fulvio
comptait à mi-voix. A deux mille marches, le prince fit signe à ses compagnons
de souffler à l'abri d'une plate-forme.
— Sardanapale ! Sentinelle !
prévint Gros Léon qui planait au- dessus de ses maîtres.
Jusqu'à
présent, le petit groupe avait été hors de vue de la cité Passé la plate-forme,
il serait visible des murailles.
La
scène avait été répétée dans la grotte. On assembla un brancard de feuillages.
En raison de sa légèreté, Zéphyrine prit la place du mort. On la camoufla avec
sa fourrure.
Fulvio,
Pando-Pando, Bois-de-Chêne et Paolo soulevèrent chacun un bras de la civière et
on continua l'ascension.
— Deux mille cinq cents ! Nous sommes près des terrasses
agricoles... deux mille six cents, tout va bien, voici la source ! Les
cultivateurs nous ont vus. Ils ne paraissent pas s'inquiéter. Ils quittent leur
travail... Deux mille sept cents... Ne bougez surtout plus... Deux mille huit
cents! Nous entrons dans le cimetière.
Le
visage abrité de sa peau de bête, Fulvio commentait à mi- voix pour Zéphyrine.
Le
soleil descendait à l'horizon.
— Yumac... intipata... nusta yalalla?
Un
garde interrogeait les hommes-pumas. Fulvio donna un coup discret à
Pando-Pando.
— Winay... pata marca ururamba...
puracassitawa... putu- rutu... sampona... Pincullus.
La
réponse de l'Inca disant qu'un des leurs avait été tué à la chasse près de la
rivière et qu'ils voulaient l'exposer pour la nuit sur la pierre de la Lune,
était plausible.
Le
garde, confiant, laissa passer les hommes-pumas. Derrière une idole taillée
dans le rocher, Fulvio fit descendre Zéphyrine du brancard. La nuit tombait sur
Machu Picchu. Bois-de-Chêne et Paolo attachèrent sur la pierre de la Lune une
peau de guanaco roulée qui pouvait, dans l'obscurité, faire croire à un corps
allongé.
Sur
un geste de Fulvio, le petit groupe monta vers la porte basse. Ils arrivèrent
juste au moment où un autre garde fermait la cité.
Pando-Pando
répéta son boniment. De loin, le garde vit le « corps » allongé. Il leur fit
signe d'entrer et bloqua l'ouverture de la muraille grâce à une grosse pierre
carrée qu'il poussa dans l'ouverture à l'aide d'un madrier. Il noua le tout
avec des courroies.
Fulvio
et Zéphyrine échangèrent un regard. Ils étaient dans la Cité perdue.
A
l'intérieur de la ville, les Incas vaquaient à leurs dernières occupations de la
journée. Les femmes rapportaient de l'eau chaude provenant des sources. Des
torches éclairaient les ruelles.
Suivis
de leurs
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