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La Sibylle De La Révolution

La Sibylle De La Révolution

Titel: La Sibylle De La Révolution Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Nicolas Bouchard
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qui
avaient proprement rossé le commerçant. Peu de temps auparavant, elle l’avait
senti. Elle avait vu l’auteur de ses jours traîné à terre et frappé par les
brutes sous le regard effrayé des commis et de la famille. L’événement
lorsqu’il s’était produit avait simplement une impression de déjà-vu. Elle
s’était juste posé la question : « Si papa savait que cela allait
arriver pourquoi n’a-t-il pas fermé la boutique et mis les volets ? »
Puis elle n’y avait plus repensé.
    Et il y eut un autre accident.
Louis, un commis âgé de dix-sept ans, avait voulu chercher un rouleau de drap
dans la réserve. Le tissu se trouvait au sommet de la pile et chaque rouleau surchargé
de broderies, aux points faits parfois de crins de cheval, pesait bien trente
livres. Marie-Adélaïde avait confusément pressenti la catastrophe et s’était
placée dans un coin de la réserve. Le rouleau échappa des mains de Louis qui
tenta de le rattraper, tombant ainsi de l’escabeau. Elle avait entendu ses
cris, ils avaient résonné exactement de la même manière que dans ses souvenirs.
    Le malheureux s’était cassé la
jambe et on l’avait immobilisé dans une soupente avec une attelle le temps
qu’il se remette. Elle était montée le voir. Le garçon l’avait accueillie avec
plaisir car il se morfondait sur sa paillasse.
    — C’est bien gentil à toi de
venir me tenir compagnie, petite Adélaïde.
    — Louis, je voulais te demander
quelque chose.
    — Je ne suis pas capable de
faire quoi que ce soit avec cette maudite jambe, mais si je le peux c’est bien
volontiers que je te rendrai service.
    Elle secoua la tête.
    — Ce n’est pas un service que
je te demande. Je voudrais savoir…
    — Oui ?
    — Pourquoi es-tu monté sur cet
escabeau et as-tu pris ce coupon sachant que tu allais tomber et te casser la
jambe ?
    Le jeune homme la regarda avec
surprise :
    — Comment cela ? Je ne
comprends pas. Que racontes-tu là ?
    — Eh bien, oui, tenta-t-elle
d’expliquer. Tu savais que tu allais tomber, tu aurais pu appeler le vieux
Achille, il t’aurait tenu l’escabeau.
    Il leva les bras au ciel.
    — Gentille Adélaïde, les
enfants me surprendront toujours. Mais je ne savais pas que j’allais tomber,
bien sûr ! Sinon, je ne serais pas monté là-haut comme un benêt !
    Elle insista :
    — Tu ne savais donc pas ?
    — Mais pas le moins du monde,
personne ne peut prévoir ce qui va se passer à l’avance. Bon, c’est vrai que
j’aurais dû réfléchir un peu plus, mais le maître était pressé de servir M me  de Nogera
alors…
    Marie-Adélaïde n’écoutait plus
Louis. Ainsi, tout le monde ne voyait pas comme elle des choses qui allaient se
produire. Peut-être même qu’elle était la seule dans ce cas. Tout de suite,
elle eut peur. Et s’il s’agissait d’un péché ? Et si c’était le démon qui
la tentait ? Que dirait sa mère ou monsieur le curé ?
    « Il ne faut pas que l’on
sache », se dit-elle.
    Puis le soir, alors qu’elle
réfléchissait dans son lit, elle se fit cette nouvelle réflexion :
« Si je vois d’avance ce qui va se passer, je peux prévenir les gens qu’il
va se produire un accident et ainsi l’éviter ! » L’idée la rasséréna.
Ce n’était peut-être pas le démon qui lui avait jeté un mauvais sort. Au
contraire, peut-être pourrait-elle faire le bien et, de cette manière, gagner
sa place au paradis.
     
    Pourtant, elle dut vite
déchanter. Dans une boutique de drapier à Alençon ou ailleurs, il se produisait
toujours quelque menu incident qui venait troubler la vie quotidienne. Un
métier cassait, une ouvrière tombait malade, une broderie était gâchée, un
client n’était pas satisfait. Chaque fois, elle allait prévenir sa mère :
    — Maman, je crois que le métier
va casser, Louisette n’est pas soigneuse.
    — Allons, que racontes-tu là,
ma petite ? Depuis quand t’y connais-tu en broderie ?
    Et l’incident arrivait. Ce type
de circonstances se produisait régulièrement mais jamais elle ne fut capable
d’arrêter la marche du destin.
    Puis vint l’affreux malheur qui
devait changer sa vie. Un après-midi, Marie-Adélaïde se sentit soudain couverte
de sueur. Un cri d’horreur s’étrangla dans sa gorge : son père, il venait
de mourir ! Elle se recroquevilla sur place et faillit se laisser aller à
sangloter. Mais non, il y avait peut-être un espoir. Cela n’était pas arrivé,
du moins pas

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