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La Sibylle De La Révolution

La Sibylle De La Révolution

Titel: La Sibylle De La Révolution Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Nicolas Bouchard
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un an
plus tôt. Le prêtre s’en souvenait parfaitement.
    — Allons ma fille, je me
rappelle bien les circonstances. Ton frère est allé jouer dans la cour et ton
père a voulu l’empêcher de tomber alors que toi tu faisais ton ouvrage dans ta
chambre. Comment pourrais-tu être responsable de quoi que ce soit ? Dieu
n’aime pas que l’on s’accuse de péchés que l’on n’a pas commis.
    — Mon père, c’est moi qui ai
incité Henri à aller jouer autour du puits.
    Cette fois-ci le prêtre prêta
attention aux paroles de la petite fille qu’il distinguait à travers le
grillage du confessionnal.
    — Que lui as-tu dit exactement,
ma fille ?
    — Je lui ai dit qu’il ne
fallait surtout pas qu’il aille près du puits.
    — Alors, tu lui as dit des
choses sensées. Tu n’es pas responsable de sa désobéissance !
    — Mais vous ne savez pas !
Je savais que mon père allait mourir à cause d’Henri, je l’ai vu, il fallait
que je l’en empêche mais je n’en ai pas été capable.
    Le ton de la petite fille
monta, monta, elle devait dire ce qu’elle avait sur le cœur depuis des années.
Il fallait qu’elle lui dise tout de sa malédiction : celle de voir les
événements funestes qui allaient se produire mais sans, hélas ! pouvoir
les empêcher.
    — Il y a eu d’abord plein de
signes, des petites choses, je ne m’en suis pas rendu compte tout de suite. Par
exemple, lorsque Louis s’est cassé une jambe alors que je savais que cela
allait arriver. Après, j’ai essayé d’empêcher toutes ces choses, mais je n’y parvenais
pas. Personne ne me croyait ou alors j’arrivais trop tard. Pour Henri cela a
été différent. Je lui ai dit de ne pas approcher du puits et j’ai surveillé la
cour du haut de ma fenêtre. Je l’avais vu, vous comprenez, je savais que mon
père allait mourir. Je croyais encore pouvoir le sauver mais c’est à cause de
moi qu’Henri a grimpé au-dessus du puits, sinon, il n’y aurait sans doute même
pas pensé. Mon père, sauvez-moi, je vous en prie. Au départ, j’ai cru que
c’était une sorte de don de Dieu, mais maintenant je sais que c’est le diable.
Je vous en prie, mon père, sauvez-moi du diable !
    Maintenant, elle sanglotait de
toutes ses forces dans le confessionnal. Le curé, totalement dépassé par les
événements, tentait de la calmer ; il dut appeler deux servantes et un
séminariste pour en venir à bout devant la file des paroissiens confondus qui
attendaient eux aussi pour confesser leurs péchés.
    Le soir, le prêtre alla
discuter avec la femme du fabricant de draperies qui s’était depuis peu
remariée. Ils restèrent une demi-heure à discuter dans le bureau du père.
Lorsqu’ils en ressortirent l’homme et la femme avaient l’air grave, mais on pouvait
lire un certain apaisement sur leur visage.
    Devant la famille rassemblée,
l’ecclésiastique s’adressa à Marie-Adélaïde avec douceur :
    — Ma fille, j’ai reçu ta
confession et sache que tu es absoute. Néanmoins, ces événements fâcheux ont
durablement marqué ton esprit, c’est pourquoi ta mère, sur mes conseils, a pris
la sage décision de t’envoyer au couvent de la Visitation. Là, sous la
surveillance de la mère supérieure, les sœurs qui prient jour après jour pour
notre salut dans ces lieux saints aideront ton âme à retrouver la sérénité qui
devrait être celle d’une petite fille de ton âge. Tu pourras en outre apprendre
le latin et le grec…
    Marie-Adélaïde approuva avec
soulagement. Le prêtre et sa mère avaient raison. Ils avaient enfin compris son
malheur. Dans un couvent baigné de religiosité et d’amour de la foi, elle
trouverait sans nul doute le salut.
     
    La demi-heure qui avait précédé
l’annonce faite à la fillette avait surtout été employée à discuter des
conditions financières concernant sa scolarité. Quant à son salut, lorsqu’on la
laissa à l’entrée du couvent des bénédictines situé à Mamers, à seulement
quelques lieues de sa ville natale, les visions qu’elle eut en chassèrent tout
de suite l’espoir et terrifièrent la petite fille qu’elle était encore. Elle
sut ce qui l’attendait ici.
     

4
            
    Le freluquet revint la chercher
encore plus tôt que prévu. Il avait la mine déconfite d’un petit garçon pris en
faute. Comment un de ces bourreaux qui envoyaient sans sourciller des milliers
d’innocents  – enfin, certains auraient peut-être mérité la prison et

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